« On y est entré, le tout est de réfléchir sur comment en sortir. » René-Paul Savary a assez bien résumé l’objectif de cette commission d’enquête : réfléchir à « l’adéquation » entre les dispositifs type passe sanitaire ou vaccinal, et la situation épidémique. En clair : à partir de quel moment pourra-t-on se passer du passe vaccinal ? À cet égard, l’éclairage de Santé publique France semble nécessaire, puisque c’est l’autorité administrative qui est en charge de la surveillance épidémiologique – et des campagnes de prévention – et qui est donc celle qui consolide et analyse les principales données résumant la situation sanitaire du pays. La directrice générale de Santé publique France a dont été interrogée sur les critères quantitatifs qui pourraient éventuellement être mis en place pour décider de seuils à partir desquels l’on pourrait se passer du passe vaccinal, un peu dans l’esprit de ce qu’avait proposé la majorité sénatoriale au début de l’examen du projet de loi sur le passe vaccinal. Geneviève Chêne n’a pas vraiment été en mesure de répondre clairement aux questions des sénatrices et des sénateurs, invoquant la différence entre fonctions de « gestion » et les études menées par Santé publique France : « Notre éclairage est contributif sur la surveillance épidémiologique. Ce n’est pas notre rôle de participer à la décision mais simplement de documenter les aspects scientifiques. Nous ne faisons pas de gestion. »
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« Le pic est passé à l’échelle nationale »
En effet, Santé publique France n’a pas réalisé « d’évaluation spécifique du passe sanitaire puis vaccinal », comme l’affirme sa directrice générale, qui fait tout de même état au Sénat d’une adhésion assez large aux dispositifs selon les études mensuelles menées : fin janvier par exemple, 68 % des répondants disaient approuver la mise en place du passe vaccinal. Mais avec un Omicron moins sévère que le variant Delta, ne pourrait-on pas envisager une « extinction » du passe vaccinal ? Geneviève Chêne tient à rappeler qu’en l’état, si « le pic est passé à l’échelle nationale », le « reflux » n’est pas encore arrivé et le niveau de circulation de l’épidémie reste très élevé. Certaines régions sont aussi plus touchées que d’autres. Ce point d’étape épidémiologique a fait s’interroger les sénatrices et sénateurs de la commission d’enquête sur d’éventuels critères épidémiologiques à partir desquelles les autorités sanitaires pourraient envisager de lever certaines restrictions et en particulier le passe vaccinal. Laurent Burgoa (LR) évoque notamment une extinction du passe à l’échelle régionale et René-Paul Savary (LR) la mise en place d’une « période transitoire » où il serait exigé pour « les personnes d’un certain âge et celles ayant des comorbidités. »
À ces interrogations, Geneviève Chêne s’autorise simplement à répondre que Santé publique France pourrait effectivement fournir des données « à l’échelle territoriale la plus fine » mais que ce n’est pas à elle de rentrer dans la « gestion » de l’épidémie. De même, René-Paul Savary évoque la baisse des primo-vaccinations, qui pourrait signifier que le passe vaccinal n’incite plus à la vaccination et qu’il a par conséquent perdu de son utilité. Geneviève Chêne répond là encore très factuellement en dégageant une « tendance stable » de la primovaccination autour de 200 000 injections par semaine depuis l’annonce du passe vaccinal. Mais la directrice générale de Santé publique France rappelle aussi qu’il ne faut s’arrêter aux primo-vaccinés : « Un autre critère, c’est l’incitation au rappel, qui n’est pas négligeable, puisque c’est le rappel qui est particulièrement efficace pour les formes sévères d’Omicron. Pour le rappel, on est en ce moment autour de 1,4 million d’injections par semaine. »
2 % des cas du variant BA.2
Santé Publique France publiera ce soir son dernier point épidémiologique, dans lequel on apprend que le nouveau variant BA.2 constitue désormais 2 % des cas détectés et séquencés. La proportion reste faible, mais Geneviève Chêne attire a tenu à attirer l’attention sur l’augmentation rapide de cette proportion : « En quelques semaines on est passé de 0,1 % à 1 % puis à 2 %. Une étude danoise fait état d’une plus forte contagiosité de BA.2 par rapport à Omicron. On observe ça de manière extrêmement attentive. » Un refrain qui n’est pour le moment pas alarmiste, mais dont la musique n’est tout de même pas douce à nos oreilles.
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