Depuis l’annonce d’Édouard Philippe d’une limitation de la vitesse à 80kmh sur 400 000 routes secondaires à partir du 1er juillet, un vent de contestation souffle à la Haute assemblée. Trois sénateurs, Michel Raison (LR), Jean-Luc Fichet (PS) et Michèle Vullien (centriste) ont multiplié les auditions (acteurs de la sécurité routière, représentants des collectivités locales, usagers de la route…) afin d’évaluer « l’efficacité et l’impact » de cette mesure perçue par bon nombre d’élus locaux « comme une atteinte à la ruralité » (voir notre article). Dès le 4 janvier dernier, 50 sénateurs avaient adressé un courrier au Premier ministre afin de connaître les résultats de l’expérimentation d’une limitation à 80kmh effectuée sur trois tronçons de route entre 2015 et 2017.
« Je demande solennellement (…) comme président du Sénat, d'avoir accès à un dossier qui n'est pas un secret d'État. Car, si réellement, ça doit sauver des vies, alors il faut y aller » avait martelé Gérard Larcher.
« Une décision brutale prise « sans concertation »
Ce jeudi, 4 mois après sa mise en place, le groupe de travail issu de la commission des lois et de l’aménagement du territoire rendait ses conclusions. « La décision, annoncée par le Premier ministre (…) le 9 janvier 2018, de réduire de 90 km/h à 80 km/h la vitesse maximale autorisée sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central au 1er juillet 2018 a été annoncée brutalement et sans concertation avec les acteurs concernés » déplorent les élus avant d’ajouter que la mesure « est vécue comme pénalisante par de nombreux territoires enclavés pour lesquels la route constitue un moyen de déplacement incontournable.».
Le gouvernement avait également fixé « une clause de revoyure » au 1erjuillet 2020 destinée à mesurer l’efficacité de cette mesure. « Peu compréhensible » pour le groupe de travail. « Une telle évaluation aurait dû avoir lieu avant la généralisation de cette mesure à l’ensemble du territoire ».
Une décision « décentralisée au niveau des départements »
Par conséquent, le rapport demande que la décision d’une baisse de la limitation de vitesse maximale sur les routes secondaires « soit décentralisée au niveau des départements ». « Une telle décentralisation de la décision est au demeurant la règle s’agissant de la gestion de la voirie et de la détermination des vitesses maximales autorisées » estiment les auteurs.
Sur la méthode, le 1er juin prochain, seraient ainsi créées dans chaque département, « des conférences départementales de la sécurité routière », co‑présidées par les présidents de conseil départemental et les préfets de département.
Elles seraient chargées « d’identifier les routes ou les tronçons de route accidentogènes pour lesquels une réduction de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h permettrait de « réduire le nombre d’accidents de manière certaine ». Le 1er janvier 2019, entrerait alors en vigueur la limitation à 80kmh sur les tronçons recensés. Et en 2021 aurait lieu le bilan de l’impact de ces limitations sur la sécurité routière.
Enfin, selon le rapport sénatorial, la fin de la généralisation de la limitation à 80kmh sur les routes secondaires permettrait d’allouer plus de moyens à la prévention, comme la sensibilisation dans les écoles primaires, mais aussi à la réduction des comportements à risques, comme par exemple l’usage des téléphones portables au volant.