Hier, dans une tribune publiée dans Le Figaro, 100 sénateurs ont dénoncé le contenu du programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. L’un des signataires de la tribune, Olivier Paccaud était invité de la matinale de Public Sénat. Le sénateur de l’Oise estime que cet enseignement ne doit pas être réalisé par des associations, mais par les parents ou par les enseignants.
Lutte contre le narcotrafic : que contient la proposition de loi du Sénat ?
Par Simon Barbarit
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« C’est un travail d’intérêt public », insistait en juillet dernier Jérôme Durain, sénateur socialiste, lors du dépôt de sa proposition de loi visant à « Sortir la France du piège du narcotrafic ». Jérôme Durain, président de la commission d’enquête sur ce sujet souhaitait alors, avec Etienne Blanc (LR), rapporteur de la commission et également cosignataire du texte, « tendre la main au gouvernement », à l’époque démissionnaire.
Pour ce faire, leur texte reprend dans 20 articles une large partie des 35 recommandations de la commission d’enquête, sur la restructuration des acteurs de la lutte contre le narcotrafic, la lutte contre le blanchiment ou encore la clarification du statut d’indicateur et de repenti. Depuis la nomination du gouvernement Barnier, les deux élus s’échinent à souligner l’intérêt qu’aurait le gouvernement à reprendre leur texte. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, ancien patron de la droite sénatoriale, a déjà fait part de sa volonté de reprendre les travaux du Sénat. Et les deux sénateurs essaieront de faire pencher la balance au profit de leur proposition de loi plutôt qu’un projet de loi (d’initiative gouvernementale), auprès du ministre de la Justice, Didier Migaud, lors d’un entretien ce lundi.
Rappelons que l’ancien garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti avait annoncé au printemps plusieurs pistes pour lutter contre le « haut du spectre » du narcotrafic.
« DEA à la française »
Parmi les points forts de la proposition de loi, on retrouve à l’article 1, le renforcement de l’Office antistupéfiants (Ofast) structurée en une véritable « DEA à la française » (Drug Enforcement Administration, l’agence américaine de lutte contre la drogue, ndlr). L’office serait placé « sous la double tutelle des ministères de l’intérieur, et de l’économie et des finances » avec « une compétence exclusive sur les crimes liés au narcotrafic, ainsi qu’un pouvoir d’évocation sur l’ensemble des enquêtes ».
L’Ofast serait aussi placé en surplomb d’un futur parquet national antistupéfiants (Pnast) (article 2) que la commission d’enquête estimait indispensable. Il serait l’équivalent judiciaire de l’Ofast rénové. Le nouveau parquet aurait pour compétence la lutte contre le narcotrafic du « haut du spectre ». Pour ce faire, il disposerait d’un monopole sur la gestion des « repentis » et des futurs informateurs « civils ».
Refonte du statut de repenti
S’inspirant de la législation italienne « anti-mafia », les sénateurs souhaitent réformer le statut des repentis qu’ils jugent insuffisamment exploité en France. Les élus ont pris conscience, lors de leurs travaux, qu’un « informateur n’est pas celui qui est innocent de toute infraction ». C’est pourquoi ils proposent d’étendre le statut de repenti à ceux qui ont commis des crimes de sang. Ils veulent aussi renforcer son attractivité avec « la perspective d’une réduction de peine en échange des informations transmises à l’autorité judiciaire ». Toutefois, le repenti aurait aussi des devoirs fixés dans une convention « et dont le non-respect sera sanctionné par l’interruption des mesures de protection mises en place par la justice ».
De même, le Sénat souhaite révolutionner le statut des informateurs transformé sous leur plume, en infiltrés civils (à distinguer des policiers ou gendarmes infiltrés) en contrepartie d’une complète immunité pénale sous réserve de respecter des conditions strictes.
Autre série de mesures jugées primordiales par les élus, la confiscation et les saisies des avoirs des trafiquants. « La seule fois où j’ai vu pleurer un trafiquant, ce n’est pas quand on lui a annoncé la décision de justice mais quand on a annoncé qu’on saisissait sa maison », avait confié un policier auditionné par la commission d’enquête.
La proposition de loi instaure une procédure d’injonction pour richesse inexpliquée en amont de la procédure judiciaire pour obliger les personnes suspectées de trafic de stupéfiants ou de complicité à s’expliquer sur tout écart manifeste entre leurs revenus et leur train de vie. La procédure de gel judiciaire des avoirs des narcotrafiquants (article 5) est envisagée comme un « mécanisme d’urgence en cas de risque de dissolution ou de transfert des avoirs d’un narcotrafiquant à l’international ».
Une mesure visant à créer « un dossier coffre », dénoncé par le Conseil national des Barreaux comme « une atteinte au principe du contradictoire et aux « droits de la défense », pourrait donner lieu à d’âpres débats au Parlement. Le dossier-coffre sous le contrôle d’une collégialité de magistrats, a, en effet, pour but de soustraire au contradictoire certains éléments de procédure pour les techniques spéciales d’enquête les plus sensibles, comme le recours à des technologies de pointe, d’écoutes ou de balisages.
Lutte contre la corruption
Enfin, l’un des points sensibles des travaux de la commission d’enquête avait porté sur la corruption. « Sans la corruption, qu’elle soit publique ou privée, les trafics ne prospèrent pas. Cela peut toucher des personnels des ports ou aéroports, des policiers, des gendarmes, des douaniers… Aucune profession n’est épargnée, dès lors que vous avez des trafiquants qui offrent des sommes très conséquentes. », avait alerté Stéphanie Cherbonnier, cheffe de l’Office anti-stupéfiants, devant les sénateurs.
La proposition de loi prévoit « la mise en place de points de contact unique de signalement de faits de cette nature ou de comportements suspects dans les administrations les plus exposées ou les services publics sensibles que sont les services portuaires et aéroportuaires », et étend « la conduite d’enquêtes administratives régulières (ou « criblages ») dans ces services, publics comme privés, pour mieux protéger les agents des services et administrations les plus exposés ».
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