Martinique France’s Interior Minister Gerald Darmanin official visit
Base navale de Fort-de-France Locaux de l’OFASTVisite des locaux renoves de l’OFAST Reunion de securite sur la lutte contre les trafics illicites (armes et stupefiants) France's Interior Minister Gerald Darmanin and Junior Minister for Public Accounts Gabriel Attal during an official visit to overseas french territory of Martinique. Martinique, FRANCE-02/10/2022//MORELGILES_Sipa.8092/2210021659/Credit:GILLES MOREL/SIMAX/SIPA/2210021714

Narcotrafic : la Cour des comptes pointe les mauvais résultats de l’ancien plan de lutte anti-stupéfiants

Dans un rapport sur la lutte contre le narcotrafic, la Cour des comptes tacle la non-application de certaines mesures du plan 2019-2023. Les sages considèrent notamment que trop peu de forces de sécurité y sont quotidiennement consacrées. Alors qu’un nouveau plan est dans les tuyaux, « il faudra un pilotage plus resserré », prévient la rue Cambon.
Quentin Gérard

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Après les sénateurs au printemps dernier, c’est au tour des sages de la Cour des comptes de s’attaquer au trafic de drogue. Alors que le sujet a été érigé en « cause nationale » par Bruno Retailleau et Didier Migaud, les magistrats effectuent un bilan plutôt négatif du dernier plan de lutte en la matière (2019-2023). « Cinq ans après son lancement, le plan national antistupéfiants présente des résultats mitigés », en concluent-ils, dans un rapport de 90 pages.

L’état des lieux n’est pas plus réjouissant que celui dressé par les sénateurs de la commission d’enquête sur le narcotrafic qui en appelaient déjà au « sursaut » pour éviter que la France tombe ans un « piège » fatal. La Cour des comptes rappelle l’essor grandissant du cannabis. Le marché de la première drogue consommée en France est en « forte hausse » indique-t-elle. La rue Cambon met aussi le doigt sur l’extension d’une gangrène qui gagne les campagnes. « Si 7 % des communes regroupent 90 % des mises en cause », les magistrats notent que « la concentration dans les centres urbains ne doit pas masquer la réalité de l’emprise du trafic sur l’ensemble du territoire puisqu’il touche 79 % des communes ». Les plus fortes augmentations sont observées en Mayenne, à la Réunion, dans la Manche ou en Haute-Marne.

Un effort « interrompu »

Initialement, le plan de lutte comprenait six objectifs : l’amélioration de la connaissance de ces trafics, l’intensification et la rationalisation des activités de terrain, l’accroissement de la lutte contre l’économie souterraine, le renforcement de la saisie des avoirs criminels, le développement de la coopération internationale et le renforcement des capacités de services. Concrètement, cet effort a été « interrompu », jugent les magistrats. Notamment sur le démantèlement des points de deal. « Le harcèlement de ces lieux de vente a permis, en deux ans, une décrue de 25 % du nombre total, mais reste aujourd’hui stabilisé autour de 3 000 points au total », indiquent-ils.

Cependant, le « pilonnage » est difficile à maintenir dans la durée, admettent les sages. Et ce pour plusieurs raisons. Par exemple, le maintien de points de deal dans les zones est difficilement accessible par les forces de sécurité, de nouveaux points se reconstruisent dans des zones proches des points harcelés ou encore la réduction des heures de voie publique consacrées à la lutte anti-délinquance au profit du contact avec la population.

De son côté, la lutte contre le blanchiment est « insuffisamment développée », pointe la Cour des comptes. Le montant du blanchiment de capitaux provenant du trafic de stupéfiants est estimé par le ministère des Finances à 3,5 milliards d’euros par an. « Or, l’office anti-stupéfiants (Ofast), ne compte que sept enquêteurs formés sur ce sujet sur les 200 personnes au niveau central », indique le rapport. « Pourtant, cette question constitue un des leviers les plus efficaces pour lutter contre les trafics », poursuivent les sages.

Augmenter le nombre de cyber-enquêteurs

Pour la Cour des comptes, le nouveau plan qui n’est pas encore finalisé, « nécessitera un renforcement du pilotage stratégique plus resserré », assure les magistrats. Il faudra qu’il soit « du même niveau que celui mis en œuvre au cours des dernières années en matière de lutte anti-terroriste », ajoutent-ils. Notamment face à l’évolution des modalités de ventes. 37 % des transactions régulières s’effectuent par livraisons, via des commandes sur les réseaux sociaux ou internet. Pour faire face à ces changements, la rue Cambon demande que le nombre d’enquêteurs en cyber soit augmenté.

Le rapport recommande aussi de renforcer les mesures de lutte contre la corruption, de mettre en place un tableau de bord permettant de suivre les effectifs et les moyens de l’Ofast et de ses antennes, de renforcer les moyens technologiques et d’investigation ou encore de sécuriser les enceintes portuaires.

Partager cet article

Pour aller plus loin

Dans la même thématique

Paris: Emmanuel Macron Receives Malaysia’s PM Anwar Ibrahim
9min

Société

Lutte contre l’entrisme des Frères musulmans : Emmanuel Macron souhaite une loi « à la fin de l'été »

Emmanuel Macron a annoncé lundi soir, à l’issue d’un conseil de défense consacré à l’influence de la confrérie des Frères musulmans en France, un élargissement des sanctions financières contre les structures accusées de pratiquer « l’entrisme » islamistes. Le chef de l’Etat espère qu’un nouveau texte législatif pourra entrer en vigueur avant 2026. Au Sénat, les élus qui ont travaillé sur ce sujet réclament des mesures qui concernent davantage « le quotidien », mais aussi des dispositifs européens.

Le

académie médecine
4min

Société

Fin de vie : l’Académie de médecine défend une « aide à mourir » comme démarche d’exception devant le Sénat

Auditionnées mercredi 2 juillet par la commission des affaires sociales du Sénat, Claudine Esper et Élisabeth Elefant, représentantes du comité d’éthique de l’Académie nationale de médecine, ont livré une analyse nuancée des propositions de loi sur l’aide à mourir et l’accès aux soins palliatifs. Si elles reconnaissent l’évolution nécessaire du cadre législatif, elles plaident pour un encadrement strict et soulignent les limites éthiques à ne pas franchir.

Le

controle ok
6min

Société

La France condamnée pour contrôle au faciès par la CEDH : « Que faut-il pour que la France prenne en main le sujet ? » s’indigne Corinne Narassiguin

La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour un contrôle d’identité discriminatoire, une première. « Tout ça ne peut pas continuer », dénonce la sénatrice PS Corinne Narassiguin, auteure d’une proposition de loi sur le sujet. Elle pointe le « ciblage » sur les sans-papiers, qui a été demandé à la police par le ministre Bruno Retailleau. « Ça, c’est du contrôle au faciès », dénonce la sénatrice de Seine-Saint-Denis.

Le

Narcotrafic : la Cour des comptes pointe les mauvais résultats de l’ancien plan de lutte anti-stupéfiants
4min

Société

Egalité femmes-hommes : « Si nous avons une réduction de moyens, je ne serai pas en mesure de réaliser le travail qui m’est demandé », alerte Bérangère Couillard

Auditionnée par la délégation aux droits des femmes du Sénat, la présidente du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, Bérangère Bouillard s’inquiète de l’avenir de l’institution à la veille des débats budgétaires au Parlement, et des échéances électorales.

Le