Pêche en Méditerranée : une mer « sinistrée »

Pêche en Méditerranée : une mer « sinistrée »

La mer Méditerranée pourrait être vidée de ses poissons en une année. C’est le résultat auquel pourrait mener l’industrie de la pêche moderne en l’absence de régulation. Non sans difficultés, l’Union européenne, en partenariat avec les pays voisins bordant la Méditerranée, cherche des compromis pour préserver tant la ressource que l’emploi. Un objectif difficile dans un espace que beaucoup considèrent comme « sinistré ».
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Par Alexandre Delrieu

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Les progrès techniques et technologiques de l’industrie halieutique depuis l’après-guerre, encouragés et subventionnés par les États, ont permis l’essor d’une pêche massive source d’emplois et de revenus pour l’ensemble de la filière. Cette pêche a provoqué une surexploitation des ressources marines, entraînant la diminution inquiétante des stocks de poissons. La sonnette d’alarme est tirée dans les années 1980 par les organisations de protection de l’environnement. Les États européens s’accordent alors sur une Politique Commune des Pêches (PCP) qui vise à « garantir la durabilité de la pêche et de l'aquaculture sur le plan environnemental, économique et social ».

Réguler l’effort de pêche

Chaque année, suivant un marathon de négociations à Bruxelles, les États membres de l’Union européenne s’accordent sur des quotas de pêche. Les quotas sont des limites de captures établies pour chaque espèce de poisson, permettant une pêche respectueuse de l’environnement. Ces décisions s’appuient sur le Rendement Maximal Durable (RMD) établis par les organes consultatifs scientifiques. Il s’agit du « volume de capture que l’on peut prélever sur un stock sans remettre en question la reproduction naturelle de ce stock », explique Stephan Beaucher, consultant indépendant en politiques publiques de gestion des pêches pour des ONG environnementales.

Si syndicats de pêcheurs et organisations environnementales reconnaissent que la surpêche a diminué depuis la mise en œuvre de ces outils de pilotage, de nombreuses difficultés demeurent, particulièrement en mer Méditerranée. « La Méditerranée ce n’est pas que l’Europe, c’est aussi l’Afrique et la Turquie » rappelle Alain Cadec, député européen et président de la commission Pêche du Parlement européen. Ainsi, les États européens doivent, tant bien que mal, s’entendre avec leurs voisins  pour fixer les tonnages de capture maximums.  

La Méditerranée, une mer « sinistrée »

"La Méditerranée est sinistrée" #pêche #UMED
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Malgré les efforts déployés, Alain Cadec et Stephan Beaucher partagent le même constat : la Méditerranée est « complètement sinistrée ». En cause, la quantité de poisson pêché est en moyenne 90% supérieure au seuil permettant aux stocks de se renouveler, estime Stephan Beaucher.

« Si on prend pour exemple le stock de mulet dans le Golfe du Lion, on est à douze fois le Rendement Maximal Durable. C'est-à-dire qu’on a une surpêche de 1100% » ajoute-t-il.

Hubert Carré, Directeur Général du Comité National des Pêches Maritimes et des Élevages Marins (CNPME), porte un constat plus nuancé. Selon lui, la surpêche n’est pas la seule responsable du faible renouvellement des stocks de poisson. Il insiste sur les spécificités de la Méditerranée, « une mer fermée qui se renouvelle peu, avec des pays qui n’ont pas fait tous les efforts possibles et imaginables pour la qualité de l’eau, et on s’aperçoit qu’on est aujourd’hui dans une saturation ». À ces facteurs s’ajoute selon lui une mauvaise qualité de l’alimentation des poissons dans le bassin.

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La question de la gestion des pêches en mer Méditerranée n’est cependant qu’un volet des défis à relever dans la gestion des pêcheries européennes. La politique des quotas s’inscrit dans une logique de transition vers une pêche durable et raisonnée qui implique le consommateur dans la chaîne de distribution, notamment en privilégiant les circuits courts sur le littoral. « On a développé avec France Filière Pêche un logo qui s’appelle « Pavillon France » pour rétablir dans l’esprit français une certaine traçabilité et une économie écoresponsable », souligne Hubert Carré.

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