Pesticides, mercure, terres rares : les cheveux des sénateurs contaminés

26 sénateurs socialistes ont accepté de soumettre une mèche de leurs cheveux à une analyse toxicologique et les résultats sont inquiétants. Ils font état de la présence de mercure, pesticides, plastifiants mais aussi des terres rares. A l’origine de cette initiative, la sénatrice, Angèle Préville estime avoir « des preuves tangibles » de la contamination des Français à différents polluants.
Simon Barbarit

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Des sénateurs qui servent de cobayes, l’information est suffisamment rare pour être relevée. Et pourtant, le 12 juillet dernier, 26 sénateurs socialistes ont confié volontairement une mèche de leurs cheveux au laboratoire privé et indépendant toxseek. « C’est une idée que j’avais depuis très longtemps pour mettre en avant la contamination que nous avons tous, mais qui n’est pas connue, qui est un impensé. J’ai eu l’occasion de rencontrer Matthieu Davoli (cofondateur de toxseek). Je lui ai demandé de faire des tests sur des sénateurs […] Il me semblait important, symboliquement, que nous nous soumettions aux tests pour avoir des preuves tangibles quand on est en défense d’amendements ou quand on parle de contaminants dans les lois », explique la sénatrice du Lot, Angèle Préville, auteure d’un rapport parlementaire sur la pollution plastique en 2020.

1 800 polluants organiques et 49 métaux dépistés

Avec pas moins de 1800 polluants organiques et 49 métaux dépistés, la sénatrice a bien eu des preuves. L’ensemble des sénateurs testés se sont vus dépister la présence d’au moins un pesticide et de mercure dans leurs cheveux. 69 % des sénatrices et sénateurs sont contaminés par le DNOP, un plastifiant utilisé dans les fils électriques, les carrelages et les adhésifs, mais également dans les cosmétiques. « Ce n’est pas une matière plastique, c’est un perturbateur endocrinien, un additif qui sert à rendre plus souple le plastique », précise la sénatrice.

Terres rares : « On est certainement au-dessus de la moyenne des Français »

93 % des sénatrices et sénateurs testés ont également dans leur cheveu une présence de terres rares supérieure à la moyenne de la population. « Et ça, c’est un énorme problème car ce sont des matériaux qui même en toute petite quantité vont avoir de gros effets sur notre santé. Et on pense que c’est à l’origine de l’électrosensibilité […] On est certainement au-dessus de la moyenne des Français. C’est dû au fait qu’en tant que sénateur, on manipule beaucoup tous les terminaux numériques, ordinateurs, téléphones, tablettes… » insiste Angèle Préville.

Sept sénatrices et sénateurs ont d’ailleurs « une contamination significative » aux terres rares, dont le sénateur Yan Chantrel, représentant les Français établis hors de France, en l’occurrence le Canada.

Après avoir modifié ses habitudes, il a accepté d’être retesté à l’automne prochain, avec deux de ses collègues déclarant des symptômes pouvant être associés à une intolérance aux champs magnétiques (fatigue importante, maux de tête…).

Le président du groupe socialiste, Patrick Kanner qui s’est également fait dépister, n’est pas vraiment surpris par les résultats de ses analyses. « J’habite Lille qui est une ville très polluée, je passe du temps dans les transports, je ne mange pas bio tous les jours… Est-ce que cela m’effraie ? Non. En revanche c’est plutôt pour mes enfants et mes petits-enfants que ce type de constat m’inquiète. L’objectif de cette démarche était de sensibiliser, de lancer un cri d’alarme, maintenant il faut des propositions d’action. »

Forte de ces analyses, Angèle Préville plaide pour une réduction drastique des pesticides. Si la sénatrice indique manger bio, ses cheveux ont néanmoins révélé la présence d’un pesticide. Pour ce qui est des terres rares, elle préconise une meilleure information des citoyens sur les conséquences de l’usage du numérique.

« Si certaines ne sont pas interdites, on ignore les conséquences de l’effet cumulé de ces substances, qui ont tendance à ne pas se dégrader ou à se séparer […] Il est grand temps de prendre conscience de l’existence de ces substances nocives et de leur impact sur la santé des populations, pour remettre en question notre rapport à la production, à la chimie, aux objets qui nous entourent et à ce que nous confions à nos enfants », alerte le groupe socialiste du Sénat dans un communiqué de presse.

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