PMA : les associations LGBT ne veulent pas de filiation dédiée qui créerait « une nouvelle discrimination »
Plusieurs associations LGBT étaient auditionnées, ce jeudi, par la commission spéciale du Sénat chargée d’examiner le projet de loi de bioéthique. Pour les associations, le dispositif ad hoc pour l’établissement de la filiation prévu dans le texte, crée « une nouvelle discrimination ».

PMA : les associations LGBT ne veulent pas de filiation dédiée qui créerait « une nouvelle discrimination »

Plusieurs associations LGBT étaient auditionnées, ce jeudi, par la commission spéciale du Sénat chargée d’examiner le projet de loi de bioéthique. Pour les associations, le dispositif ad hoc pour l’établissement de la filiation prévu dans le texte, crée « une nouvelle discrimination ».
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C’est la mesure phare du projet de loi bioéthique, l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes et aux femmes célibataires (article1). Actuellement réservée aux couples hétérosexuels, cette PMA élargie aux couples de lesbiennes et aux femmes célibataires sera remboursée par la Sécurité sociale. Votée par les députés en première lecture, cette mesure rencontre l’opposition d’une large partie des sénateurs. « Le Sénat est majoritairement à droite. Je veux vous inviter à ne pas commettre certaines erreurs du passé, après les oppositions au PACS, au mariage (pour tous et à adoption » a lancé Catherine Michaud, présidente de l’association Gaylib lors de son audition devant la commission spéciale du Sénat chargée d’examiner le projet de loi bioéthique.

Pendant plus de deux heures, les représentants de cinq associations LGBT (l’Association des familles homoparentales (ADFH), Association des parents et futures parents gays et lesbiens (APGL), GayLib Inter-LGBTet SOS homophobie), ont alterné les prises de parole pour faire part de leurs attentes autour de ce texte. Si tous se sont félicités de l’ouverture à la PMA à toutes les femmes, tous ont déploré qu’elle soit accompagnée d’un « droit spécifique », « dérogatoire » : à savoir la reconnaissance conjointe anticipée (RCA).

Le projet de loi prévoit un dispositif ad hoc pour l’établissement de la filiation pour les couples de femmes ayant recours à une PMA avec tiers donneur. Ces couples de femmes devront « consentir devant notaire à faire une PMA avec tiers donneur » et « au même moment, elles s’engageront à devenir les mères de l’enfant à naître » a expliqué, hier devant la commission du Sénat, Nicole Belloubet. La ministre de la Justice a souligné que « l’égalité en matière de procréation » doit être considérée « par rapport à la situation des couples », qui est différente entre les couples hétérosexuels et homosexuels.

« Nous sommes en faveur de l’extension du droit commun »

PMA: "Cette loi créé un droit dérogatoire pour les femmes lesbiennes. C’est créer une nouvelle discrimination. "
02:27

« Nous sommes en faveur de l’extension du droit commun » lui a répondu indirectement ce matin, Véronique Cerasoli, porte-parole de l’association SOS homophobie avant de poursuivre : « Cette loi a pour ambition de mettre fin à des discriminations envers certaines personnes, et notamment les femmes lesbiennes. Or créer un droit dérogatoire à leur encontre. C’est créer une nouvelle discrimination. C’est donc prendre d’une main ce que l’on donne de l’autre ».

Par conséquent, certaines associations militent pour que le droit de filiation existant pour les enfants nés d’une PMA avec donneur au sein d’un couple hétérosexuel, s’applique aux enfants d’un couple homosexuel. Les associations observent que le projet de loi établit une filiation différente entre un enfant et la mère qui accouche « selon qu’elle est en couple avec un homme ou avec une femme ».

Du côté de l’association des familles homoparentales, « nous soutenons la modalité de reconnaissance conjointe anticipée (RCA) qui a été votée par l’Assemblée nationale puisque cette modalité permet de respecter la solidarité des femmes en couple lorsqu’elles s’engagent dans une PMA (…) Mais, nous souhaiterions que ce système soit étendu à tous les enfants nés par PMA avec don de gamète » a proposé Alexandre Urwicz, le président de l’association.

« Il n’y a aucune raison de créer des petits droits pour les personnes homosexuelles »

« Nous avons constaté qu’à créer des petits droits, on est toujours obligé d’y revenir. On y revient après de nombreuses souffrances (…) On met les gens dans des tiroirs (…) Alors que le plus simple, c’est d’ouvrir les portes de notre maison républicaine à tout le monde sans discrimination. Les personnes homosexuelles sont des citoyens comme tout le monde. Il n’y a aucune raison de créer des petits droits pour les personnes homosexuelles » a fait valoir Marie-Claude Picardat, porte-parole de l’association des parents et futures parents gays et lesbiens.

La sénatrice LR et rapporteure de la commission spéciale, Muriel Jourda a objecté que « plusieurs juridictions ont indiqué qu’il n’y avait pas de discrimination à traiter différemment des personnes qui étaient dans des situations différentes. Et qu’en réalité, les femmes seules ou homosexuelles n’étaient pas la même situation de fait que des couples hétérosexuels face à la procréation ».

Les associations LGBT ont également regretté le refus d’intégrer les personnes trans à la PMA ou encore la PMA post-mortem. « Cela marque une forme d’incohérence. Une femme seule ne pourrait pas achever un projet parental avec les gamètes de son défunt conjoint. Mais pourrait avoir accès à la PMA avec un tiers donneur en tant que femme célibataire » a déploré Catherine Michaud.

Enfin, les intervenants ont demandé la reconnaissance des enfants nées de GPA à l’étranger, alors que la Cour de Cassation vient d’élargir sa jurisprudence, en validant l'entière transcription à l'état civil des actes de naissances d’enfants nés à l’étranger dans le cas de deux couples d'hommes.

Le projet de loi bioéthique sera examiné en séance publique au Sénat à partir du 21 février.

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