Radicalisation : comment un enfant peut y tomber
Invitée de l’émission « On va plus loin », Lau Nova vient nous raconter comment sa fille adolescente Charlotte, est tombée dans le salafisme et quelles ont été les conséquences de cette radicalisation.  

Radicalisation : comment un enfant peut y tomber

Invitée de l’émission « On va plus loin », Lau Nova vient nous raconter comment sa fille adolescente Charlotte, est tombée dans le salafisme et quelles ont été les conséquences de cette radicalisation.  
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Cela peut arriver à tout le monde. C’est le constat glaçant que fait Lau Nova, auteure  de « ma chère fille salafiste » (éditions La boîte à Pandore), qui raconte l’histoire de son enfant de 12 ans devenue salafiste, en quelques années.

Au départ, il s’agit d’une famille unie, banale. Tout semble s’emballer avec la dépression du père, puis une peine de cœur pour la petite fille de 12 ans. Lau Nova tente, après coup, de trouver des explications au parcours radicalisé de sa fille : la « quête de l’adolescence », « la recherche de sens », « il y a peut-être le prétexte d’un garçon à reséduire, qui lui, est de confession musulmane. L’idée que peut-être en adoptant une partie de sa culture, elle pourra le reconquérir » s’interroge la mère.

Lau Nova pense pendant de longs mois que sa fille fait sa crise d’adolescence et que c’est par opposition à ses parents athées, qu’elle s’intéresse à l’islam. « Malheureusement, je vais le penser pendant trop longtemps. Pratiquement trois ans, avant de comprendre » regrette-t-elle.

Sa fille est embrigadée par une communauté : « D’un seul coup, je vais comprendre qu’elle se trouve prise par un système qu’elle ne maîtrise pas » analyse-t-elle.

 

 La gamine s’entoure d’amis qui vivent la même chose, lit des livres sur le salafisme et interagit avec une communauté sur Facebook qui la prend en main.

« Je n’avais pas de culture religieuse à lui apporter et je n’avais pas d’intérêt non plus pour une religion. Donc, je ne pouvais pas l’accompagner dans ce choix-là. Et c’est ce qui fait ce premier pied dans l’islam radical. C'est-à-dire qu’au sein de la famille, quand il n’y a pas de références, pas de guide, finalement l’enfant va chercher ailleurs» explique Lau Nova.

« [Les prédicateurs salafistes] sont plus faciles d’accès que des imams (…) qui ont un discours apaisé, un islam des Lumières (…) La propagande salafiste est très présente par les différents médias, réseaux, internet… »

« À la portée de chaque enfant »

Aujourd’hui, la fille de Lau Nova, a 18 ans. Elle vit en Grande-Bretagne, est mariée à un homme qui a deux autres femmes. « Les contacts sont de plus en plus rares car dans le processus d’adoption de ce mode de vie, finalement il est assez rare que le mari accepte que l’épouse garde des liens assez fréquents avec sa famille, si elle n’abonde pas dans le même sens. Donc la rupture familiale est presque inscrite dans le processus » déplore cette mère engagée. Mais Lau Nova garde espoir et pense que sa fille ne persistera pas dans cette voie :

« Aujourd’hui je sais que j’ai perdu Charlotte, en tant que Charlotte, et qu’aujourd’hui c’est Amina, qui vit sa vie de jeune fille. Mais je suis convaincue qu’elle va se sortir de ce communautarisme parce que je ne peux pas imaginer qu’avec une éducation comme elle a reçue, elle puisse se sentir bien indéfiniment (…) dans ce courant-là. Je pense que c’est un passage et qu’à un moment donné, il y a une petite étincelle qui va suffisamment briller pour qu’elle se rende compte qu’elle y perd beaucoup ».  

Interrogée sur une possible volonté de la part de sa fille, de se rendre en Syrie ou de contacter des réseaux terroristes, la mère de Charlotte est catégorique : « Je sais qu’elle n’a jamais eu cette intention-là. Ce qui est intéressant c’est de signaler qu’il y a une autre forme de radicalité que celle de Daech (…) [Ma fille] est vraiment dans une démarche religieuse, très pieuse. C’est vraiment une quête personnelle. Sauf que la réalité c’est qu’aujourd’hui, ça la conduit à un mode de vie complètement absurde, complètement isolé du reste du monde ».

 

En 2011, lorsque cette histoire est arrivée à Lau Nova, elle s’est sentie très seule. Ce phénomène de radicalisation chez les adolescents étant peu connu, peu médiatisé. Aujourd’hui, elle discute avec beaucoup de parents : « Il y a beaucoup de familles qui sont touchées. Des familles très diverses (…) que ce soit à la campagne ou à la ville, des catégories socioprofessionnelles très variées aussi ». Et d’ajouter : « Finalement, c’est à la portée (…) de chaque enfant».

 

 

Radicalisation : comment un enfant peut y tomber. interview de Lau Nova (en intégralité)
10:02

Interview de Lau Nova en intégralité

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