25 décembre 1989, une image fait le tour du monde. Une fumée blanche occupe une cour d’immeuble. Le cameraman filme de loin, puis avance doucement. Les nuages opaques laissent place à deux cadavres en sang, qui gisent sur le sol. Le plan se resserre finalement sur le buste d’un des deux morts, Nicolae Ceausescu et sa femme Elena viennent d’être exécutés. Une page politique se tourne : elle marque fin de la dictature communiste en Roumanie.
Les citoyens roumains sont encore marqués par l’histoire dictatoriale du pays. Nicolae Ceausescu, qui n’a jamais dépassé l’école primaire nous dit-on, comme sa femme, souhaitait faire de la Roumanie le premier pays sans dette. Celui qui est arrivé au pouvoir en 1965 a donc imposé des restrictions à toute la population. Le prix de l’alimentation a augmenté. D’abord celui du café, des pois chiches, puis celui de l’orge. Une inflation très douloureusement vécue par les Roumains. Une situation de pénurie, ajouté à une liberté d’expression muselée par la Securitate (une police politique), et des arrestations arbitraires.
Après la chute, quelle reconstruction ?
Qu’a-t-on reconstruit à la chute de Ceausescu ? Le bilan paraît assez médiocre, selon les protagonistes interrogés dans le documentaire. L’exemple de la santé est le plus significatif, dans ce pays laissé à l’abandon. « L’hygiène des hôpitaux est déplorable, les gens y meurent », témoigne Carmen Uscatu, membre d’une association du secteur médical. Aucun hôpital n’a été construit ces 30 dernières années, nous explique-t-on. Une des principales raisons de ce délaissement est la présence des élites communistes au pouvoir et de celle de leurs héritiers. Alina Cicani défend l’idée que la démocratie roumaine n’est pas totalement achevée, car il n’y a pas eu de rupture claire après la chute du dictateur Ceausescu. Elle constate alors qu’aujourd’hui encore, « le décalage entre le discours officiel et la parole des citoyens fait douloureusement écho à la période communiste ».
« La Roumanie prétend avoir tourné le dos à son passé », Alina Cicani, réalisatrice
Roumanie : "J'ai peur de mourir avant d'avoir vu une autoroute chez nous"
Mais les citoyens ne se laissent pas décourager par les traces qu’a laissées la dictature. Depuis janvier 2017, un mouvement de colère sociale dénonce la corruption qui gangrène le pays, le manque d’infrastructures sociales, ou encore l’absence d’autoroutes. Et dans certains cas, la révolte se transforme en initiative. En 2019 par exemple, un entrepreneur roumain du nom de Stefan Mandachi, a décidé de construire le premier mètre d’autoroute. Un élan de changement gagne lentement le pays.