Ce matin, la proposition de loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur » a été adoptée par la commission des affaires économiques du Sénat. Elle prévoit des assouplissements sur les pesticides et le stockage de l’eau, et entend calmer les tensions entre les agriculteurs et l’Office français de la biodiversité.
Sécurisation, blaireaux, loups… les pétitions sur la chasse adressées au Sénat se multiplient
Par Romain David
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Le site internet du Sénat est devenu depuis quelques mois le théâtre d’une bataille rangée entre chasseurs et militants anti-chasse. Plusieurs e-pétitions postées sur le portail dédié de la Chambre Haute réclament une limitation de cette activité. En réponse, la Fédération nationale des chasseurs a elle aussi déposé un texte sur la plateforme, ciblant le portefeuille des associations de défense des animaux. L’objectif des uns et des autres : passer les 100 000 signatures en 6 mois, un seuil à partir duquel le Sénat s’engage à se pencher sur le texte en vue d’une éventuelle action parlementaire, généralement sous la forme d’une mission d’information, pouvant elle-même donner lieu à une proposition de loi. Une situation qui ne doit rien au hasard : la « Chambre des territoires » est réputée pour être traditionnellement favorable à la chasse, avec de nombreux élus qui sont eux-mêmes pratiquants.
En 2021, la pétition intitulée « Morts, violences et abus liés à la chasse : plus jamais ça ! », du collectif « un jour un chasseur », avait atteint le nombre de signatures requis en seulement deux mois. Ses auteurs y dénonçaient les accidents de chasse ayant eu pour victime de simples promeneurs ou des riverains, notamment la mort de Morgan Keane, 25 ans, abattu par un chasseur alors qu’il coupait du bois dans son jardin pendant le confinement de décembre 2020. Leur principale revendication : faire interdire la chasse deux jours par semaine sur l’ensemble du territoire. Les sénateurs ont lancé une mission parlementaire sur le sujet en novembre dernier, ses conclusions ont été rendues publiques ce mercredi 14 septembre, et écartent la possibilité d’une interdiction hebdomadaire.
» Lire notre article : Le Sénat préconise un délit d’entrave à la chasse
La réponse de Willy Schraen
C’est dans le cadre de cette mission parlementaire que le président de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen, auditionné par les élus en février dernier, a annoncé son intention de répliquer au « harcèlement sécuritaire » dont sont victimes selon lui les chasseurs par le dépôt d’une série de pétitions. À ce stade, un seul texte sur la plateforme du Sénat porte son nom : il vise à mettre fin à la réduction fiscale dont bénéficient les associations à l’origine « d’actions d’entrave, de violence, d’intrusion et de dégradation au nom de la cause animale ». Cette pétition ayant atteint les 100 000 signatures en juin dernier, la conférence des présidents a lancé une mission d’information « flash », piloté par la commission des finances. Elle doit se pencher sur la situation des associations qui ont été épinglées par la justice.
Lundi 12 septembre, une autre pétition anti-chasse, pour mettre fin au déterrage des blaireaux, une pratique considérée comme cruelle et déjà interdite dans plusieurs pays européens, a dépassé les 100 000 signatures. Rebelote : la conférence des présidents va devoir se pencher sur la question. Citons également un texte sur l’abattage des loups, qui demande à ce que soit revu le pourcentage de canidés abattus chaque année à des fins de régulation. Postée en juillet, cette pétition cumule pour l’heure moins de 2 000 signatures.
« Cela donne aussi une idée des préoccupations des Français »
Dans les couloirs du Palais du Luxembourg, la multiplication de ces pétitions autour de la chasse commence à susciter un certain agacement. « Ça devient insupportable », confiait il y a quelques jours à Public Sénat Jean-Noël Cardoux, le président LR du groupe d’études chasse et pêche. « On va encore mobiliser un groupe de travail pour un sujet d’ordre réglementaire. A titre personnel, je suis pour qu’on limite la plateforme des e-pétitions aux sujets régaliens ».
Même du côté des écologistes, on admet que cette inflation devient contre-productive. « Il y a toujours des thématiques clivantes, qui suscitent plus de débats que d’autres. Cela donne aussi une idée des préoccupations des Français », estime Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste, solidarité et territoires. « Le risque, c’est aussi de laisser croire qu’ouvrir une action parlementaire aura nécessairement un impact, alors qu’il ne se passe pas toujours grand-chose. Il faudrait sans doute revoir les règles de publication, proposer un système de filtrage qui soit plus strict sur les thématiques avant que le texte ne puisse être soumis aux signatures. En contrepartie, le Sénat pourrait prendre un engagement plus ferme sur la transposition parlementaire. »