Le documentaire "Trois destins" réalisé par Debra Kellner raconte les histoires intimes de trois familles qui ont fui les persécutions et leurs pays déchirés par la guerre. Les jumelles afghanes Sagha et Sahar accompagnées de leurs parents, la famille syrienne de Mohammed et enfin Zahra et ses enfants qui ont fui Alep. Tous ont conscience que retourner chez eux équivaudrait à une mort certaine : « On aimerait retourner chez nous mais notre pays est en guerre. On prie pour que l’Afghanistan redevienne tranquille et en paix. Et qu’il n’y ait plus de kidnappeurs et de talibans qui tuent les gens » espèrent les deux jumelles.
De la fuite au calvaire
Ces trois familles qui ont tout perdu, témoignent des atrocités qu´elles ont vécues et de leur lutte pour rester en vie. Malgré son jeune âge, Saghar évoque le parcours du combattant auquel elle et sa famille ont dû faire face avec des mots simples : « on était dans le radeau mais c’était comme être assis sur l’eau. Le radeau était rempli d’eau. C’était horrible ».
D’autres comme Zahra, dans ces moments difficiles, préfère se dire que c’était leur destinée : « C’est l’histoire de notre destinée, nous sommes là pour souffrir » ne cesse-t-elle de répéter à ses fils.
Des familles qui ont tout risqué et vendu tout ce qu´elles possédaient pour passer clandestinement en Europe, dans l´espoir d´offrir à leurs enfants une scolarité, la sécurité et l´espoir d´une vie meilleure. Pour entreprendre leur traversée vers l’Europe, les passeurs demandent bien souvent des sommes importantes : 4 000 euros pour chaque membre de la famille de Mohammed. Certaines familles finissent quant à elles par renoncer à rejoindre l’Europe faute d’argent.
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La course à l’asile
Le rôle joué par le hasard est essentiel pour comprendre leur histoire. Le désespoir et la peur ont jeté ces gens dans une véritable course contre la montre pour rejoindre ces pays où ils rêvent de pouvoir vivre en paix et en sécurité. Dès le plus jeune âge on veut y croire : « Je prie Dieu pour que notre demande d’asile ne soit pas refusée » implore Sahar.
Or, dans le même temps, l´Europe ferme ses frontières : déjà en 2016, 12 000 personnes s’étaient retrouvées bloqué à la frontière entre la Grèce et la Macédoine. Dans ces camps de fortunes, la xénophobie et la violence se répandent comme une traînée de poudre : pour Zahra, tout cela s’explique par le fait qu’« on est tous sous pression ici c’est pour ça qu’on se bagarre. Nous ne sommes pas des terroristes […] On est juste venu demander protection à l’Occident ».
Certaines familles auront la chance de se trouver une terre promise, d’autres, fatalistes, en sont réduites à penser qu´elles sont maudites et que leur étoile n´est pas la bonne. « On nous a dit que l’Europe allait nous aider mais ce n’est qu’une illusion […] En Europe tu seras toujours un réfugié et un vagabond » évoque pleine de regret la femme de Mohammed. Mais pour Mohammed le constat est différent : « tout le monde émigre tout le monde se réfugie en Europe. Un tiers des Syriens est réfugié, dispersé un peu partout en Europe. Certains en Allemagne, en Suède, les autres Syriens sont morts », si on ne veut pas mourir il faut partir.
En fin de compte, tous doivent maintenant vivre avec les conséquences et les chagrins de leurs rêves brisés : comme le fils de Zahra qui va devoir vivre avec les atrocités de la guerre : « c’est devenu banal pour moi de voir quelqu’un de mort avec une tête une main ou un pied coupé. J’y suis habitué et ça ne me dérange plus ».