PARIS :  Manifestation pour defendre le droit a l IVG

Un avis de la CNCDH recommande une constitutionnalisation « sans délai » de l’IVG et dans un « texte dédié »

Après l’adoption d’une proposition de loi par l’Assemblée nationale et le Sénat, et après l’annonce par Emmanuel Macron de la constitutionnalisation de l’IVG dans un projet de loi constitutionnel plus vaste à venir, le sujet n’a pas avancé. Ce jeudi, la Commission consultative des Droits de l’Homme publie un avis relatif à la question. Il y recommande d’inscrire l’IVG dans la Constitution « sans délai » et de le faire dans un « texte dédié ». Ce texte relance le sujet, porté au Parlement par de nombreux élus.
Mathilde Nutarelli

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Le 28 septembre est la journée internationale pour le droit à l’avortement. Ce 28 septembre 2023 est aussi le jour qu’a choisi la Commission consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) pour publier son avis relatif à la constitutionnalisation de l’IVG.

Constitutionnalisation de l’IVG : un débat qui a occupé la précédente session parlementaire

Ce sujet a occupé le Sénat et l’Assemblée nationale lors de la dernière session parlementaire. En novembre 2022, les députés avaient adopté une proposition de loi déposée par l’insoumise Mathilde Panot visant à inscrire le droit à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. En février 2023, c’est le Sénat qui a fait un pas en ce sens, en adoptant cette proposition de loi avec une formulation bien moins contraignante, mais beaucoup y avaient vu un grand pas. Le 8 mars 2023, c’est Emmanuel Macron lui-même qui avait annoncé que la « liberté » de l’avortement serait constitutionalisée dans un texte plus large. Et depuis, plus rien, au grand dam des associations et de la gauche.

IVG : « il faut l’inscrire dans la Constitution avec une formulation la plus protectrice possible »

L’avis de la CNCDH vient relancer le débat, d’autant que ses conclusions sont sans ambages. La Commission recommande en effet « d’inscrire le droit à interrompre sa grossesse dans la Constitution française sans délai », en utilisant « une formulation consacrant et garantissant le droit à interrompre volontairement sa grossesse pour toute personne le souhaitant », que cette inscription « fasse l’objet d’un texte dédié sans attendre une réforme constitutionnelle d’ampleur », et qu’elle se fasse au sein de l’article 1er. Mélanie Vogel, sénatrice écologiste des Français de l’étranger et auteure d’une proposition de loi au Sénat pour constitutionnaliser l’IVG, se réjouit de la publication de cet avis. « C’est un signe que toutes les personnes qui se posent la question de savoir comment mieux protéger le droit fondamental qu’est l’IVG y répondent de la même manière que nous : il faut l’inscrire dans la Constitution avec une formulation la plus protectrice possible, ne pas jouer à le mettre dans une réforme globale avec des éléments inconnus à ce stade, qui n’auront forcément avec aucun rapport avec l’IVG et seront sans majorité », explique-t-elle.

« Il n’y a pas de volonté de la part du gouvernement de tenir ses promesses »

Le problème, c’est que depuis l’annonce d’Emmanuel Macron en mars dernier, aucun pas n’a été franchi par le gouvernement pour avancer dans la constitutionnalisation du texte. « Le plus intelligent serait d’avoir un projet de loi », analyse Mélanie Vogel. Cela permettrait de changer la Constitution en soumettant le texte à un vote au Congrès qui l’adopterait à la majorité des trois cinquièmes. Mais pour l’instant, point de projet de loi à l’horizon. « On est responsables, on a attendu un projet de loi alors qu’on n’a pas le début du commencement d’une idée qui montrerait que le gouvernement voudrait travailler sur un projet de loi », se désole la sénatrice écologiste, « maintenant, cela fait 7 mois, il n’y a pas de volonté de la part du gouvernement de tenir ses promesses, s’il voulait le faire, il l’aurait fait ».

« Si le gouvernement nous contraignait à poursuivre le travail parlementaire et à aller au référendum, je sais qu’on le gagnera »

Alors, la sénatrice n’exclut pas d’aller jusqu’au bout sans l’intervention du Président de la République ou du gouvernement. En effet, si une proposition de loi de réforme constitutionnelle est adoptée par l’Assemblée nationale et le Sénat dans les mêmes termes, elle doit être soumise au référendum. Mélanie Vogel est déterminée : « En tant que parlementaires, c’est notre responsabilité de faire que, même si le gouvernement ne prend pas ses responsabilités, on prenne les nôtres pour qu’on ne se retrouve pas dans une situation où ce n’est pas concrétisé avant les prochaines élections ». Elle assure être prête, avec d’autres parlementaires qui partagent sa conviction, à amener une proposition de loi au bout du parcours législatif. « Si le gouvernement nous contraignait à poursuivre le travail parlementaire et à aller au référendum, je sais qu’on le gagnera. Et on le gagnera de fait contre le gouvernement. C’est le choix qu’ils doivent faire », assure-t-elle.

La question demeure entière sur la formulation d’une éventuelle proposition de loi de révision constitutionnelle, car selon les chambres et les groupes parlementaires, les avis divergent. « C’est une discussion qu’on doit avoir au niveau politique », affirme Mélanie Vogel, confiante. Un pas de plus est-il franchi vers l’inscription de l’IVG dans la Constitution, auquel 81% des Français sont favorables d’après un sondage Ifop de juillet 2022 ?

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