Avignon: Gisele Pelicot at the courthouse of Avignon
Gisele Pelicot. Gisele Pelicot walks with her lawyers Stephane Babonneau and Antoine Camus as they arrive at the courthouse of Avignon during the trial of her former husband Dominique Pelicot accused of drugging her for nearly ten years and inviting strangers to rape her at their home in Mazan, a small town in the south of France in Avignon, Southern France on September 23, 2024.Gisele Pelicot marche avec ses avocats Stephane Babonneau et Antoine Camus et son fils alors qu ils arrivent au palais de justice d Avignon lors du proces de son ancien mari Dominique Pelicot accuse de l avoir droguee pendant pres de dix ans et d avoir invite des inconnus a la violer a leur domicile de Mazan, une petite ville du sud de la France a Avignon le lundii 23 septembre 2024//ALAINROBERT_1Y8A9924/Credit:Alain ROBERT/SIPA/2409231431

Viol : vers un texte pour inscrire la notion de consentement dans le code pénal ?

Depuis maintenant plusieurs semaines le procès des viols de Mazan interroge sur la nécessité de faire évoluer la législation française afin d’introduire la notion de consentement dans le code pénal. Ce vendredi, le nouveau garde des Sceaux, Didier Migaud s’y est montré favorable.
Simon Barbarit

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C’est un simple « oui » qui pourrait faire évoluer la définition du viol en droit français dans les prochains mois. Invité de la matinale de France Inter, Didier Migaud a répondu par l’affirmative à une évolution de la définition du viol dans le code pénal afin d’y inscrire la notion de consentement.

Depuis quelques semaines, cette question revient sur le devant de la scène à la lumière des révélations du procès Pelicot. Le huis clos refusé par la victime Gisèle Pélicot, a permis une plus grande publicité et de ce fait relancé le débat de société autour de la notion de consentement (lire notre article).

Actuellement l’article 222-23 du code pénal définit le viol comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ». La notion de consentement n’y est donc pas mentionnée.

Un engagement d’Emmanuel Macron

En mars dernier, Emmanuel Macron avait exprimé son intention d’inscrire dans le droit français la notion d’absence de consentement en matière de viol, dans un échange filmé avec l’association, « Choisir la cause des femmes », fondée par Gisèle Halimi. Mais depuis, cette perspective est devenue incertaine avec l’annonce surprise de la dissolution de l’Assemblée nationale début juin qui a mis un terme aux travaux d’une mission d’information sur ce sujet.

Le simple « oui » du garde des Sceaux ce matin est néanmoins un peu court pour comprendre les enjeux d’une telle orientation législative. Elus et praticiens du droit sont eux-mêmes divisés sur l’opportunité d’inscrire la notion de consentement. Le prédécesseur de Didier Migaud semblait lui-même réservé. « La définition du viol telle que nous l’avons dans notre code pénal, nécessairement mais implicitement rappelle le défaut de consentement, puisqu’on parle de violence, de surprise, de contrainte. Ce sont des choses qui me semblent claires. Je ne suis pas insensible à l’idée d’être peut-être plus pédagogue auprès des victimes. Ça se réfléchit », avait déclaré le 1er février dernier, devant la délégation au droit des femmes, Éric Dupond-Moretti. Notre législation « sait ce que c’est que le viol et le réprime de façon plus sévère que les autres pays européens », avait-il ajouté.

Le risque du déplacement du débat vers le comportement de la victime

Interrogée par Public Sénat la semaine dernière, Julia Courvoisier, avocate au barreau de Paris avait mis en garde contre toute évolution juridique en ce sens. « Définir juridiquement le viol par l’absence de consentement de la plaignante conduirait à déplacer le débat sur son comportement. L’infraction serait alors caractérisée dès lors que la plaignante affirme qu’elle n’a pas donné son consentement. Ça mettrait fin au débat judiciaire ».

D’un point de vue opposé, la sénatrice écologiste, Mélanie Vogel a déposé à l’automne 2023 une proposition de loi visant à substituer les quatre éléments constitutifs du viol inscrit dans le code pénal par la reconnaissance de l’absence de consentement comme élément constitutif de l’agression sexuelle et du viol. Elle n’a pour l’instant pas été examinée par le Sénat.

La sénatrice socialiste, Laurence Rossignol, ancienne ministre aux droits des femmes, souhaite quant à elle, enrichir le code pénal mais sans ôter les quatre éléments constitutifs de l’infraction : violence, contrainte, menace ou surprise. « On pourrait ajouter un alinéa chapeau pour indiquer que le viol est une relation sexuelle non consentie. Mais il ne s’agit pas de bouleverser l’architecture l’article 222-23. Je pense qu’il permet de couvrir beaucoup de cas. Ce qui pose problème dans la législation actuelle ce n’est pas le nombre de relaxe ou d’acquittement, mais les classements sans suite », explique-t-elle.

« La définition pénale du viol part du principe que toutes les femmes sont consentantes »

Dans l’émission Parlement Hebdo sur les chaînes parlementaires, la sénatrice écologiste Sandrine Rousseau a salué la position du nouveau ministre de la Justice. « C’est pourquoi nous nous battons, pour que le consentement des femmes soit absolument respecté par les hommes […] Ce que démontre le procès de Mazan, c’est que nous avons absolument besoin de faire évoluer la législation. Parce qu’aujourd’hui, la définition pénale du viol part du principe que toutes les femmes sont consentantes et qu’il faut faire la preuve du non-consentement. La réalité, c’est qu’il faut conquérir le consentement. C’est comme ça qu’on s’assure du respect et de l’égalité dans la relation ».

 

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