Cyclone Chido

Couvre-feu, bilan provisoire, recensement des victimes… le point sur la situation à Mayotte trois jours après le Cyclone Chido

Soixante-douze heures après le passage dévastateur du cyclone Chido, le ministère de l’Intérieur fait le point sur la situation dans l’archipel. Vingt-et-un morts sont pour le moment dénombrés et un couvre-feu sera instauré dès ce mardi 17 décembre.
Quentin Gérard

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Trois jours après le passage du cyclone tropical, l’heure est à un premier bilan. « Nous déplorons le décès de 21 personnes à l’hôpital », indique place Beauvau dans un point de situation, suite à la réunion au Conseil interministériel de crise (CIC), ce mardi 17 décembre. « 45 personnes en urgence absolue ont été pris en charge ainsi que 1 373 blessés en urgence relative », poursuit-il. Cependant, « le nombre de morts n’est pas en adéquation avec la réalité des 100 000 personnes qui vivent dans un habitat précaire », peut-on également lire. En conséquence, « le préfet a ordonné au sous-préfet la mise en place d’une mission de recherche des morts ».

Des dégradations « majeures »

Dans l’archipel, les dégradations sont « majeures ». Cotés infrastructures, l’aéroport ne peut pas accueillir de vols commerciaux, car la tour de contrôle et les éléments de signalisation sont détruits. Les services publics tels que les bâtiments préfectoraux ont été sévèrement endommagés. « Toutes les infrastructures publiques sont touchées telles que le commissariat, les gendarmeries ou encore le centre opérationnel des sapeurs-pompiers », souligne le ministère de l’Intérieur. De nombreux services sont également inopérants dans les hôpitaux, les urgences sont notamment concernées.

L’électricité « est en cours de rétablissement » et « 50 % de la population en aura accès en début de semaine prochaine grâce à un cargo qui arrivera jeudi avec du matériel ». Même chose pour l’eau. « 50 % de l’eau sera rétablie dans les 48 heures et 95 % dans les sept jours », est-il écrit. Pour les habitations, tous les logements précaires, c’est-à-dire les bidonvilles, sont entièrement détruits.

Des communes sans contact avec la préfecture

Un questionnaire a été envoyé à tous les maires des communes de Mayotte pour recenser les besoins vitaux, les sans-abri, les personnes décédées, les services publics de la commune qui fonctionnement et l’état des télécommunications. Pour l’instant, « douze communes sur quinze sur la Grande-Terre n’ont aucun contact avec la préfecture », indique le ministère de l’Intérieur.

Pour les besoins de premières nécessités, un navire de la compagnie CMA CGM partira ce mercredi 18 décembre pour arriver ce week-end à Mayotte avec entre 100 et 150 conteneurs de nourriture et d’eau. Pour l’habitat, 5 modules militaires de 150 places chacun, avec tentes et lits picots sont en cours de déploiement. 8 000 bâches de la Réunion vont également être envoyées par avion et par bateau dans l’archipel. Le point de situation indique que « la communication a totalement repris avec les réseaux d’établissements scolaires ». Les autorités craignent un départ massif de personnels qui pénaliseraient la reprise scolaire.

1 500 personnels civils et militaires

Des renforts humains arrivent dans l’archipel : 1 500 personnes civiles et militaires. D’ici à jeudi 19 décembre, 800 personnels de la sécurité civile seront acheminés sur l’île. 400 gendarmes, dont deux escadrons de gendarmerie mobile et une compagnie de marche, sont aussi en cours d’acheminement. Mais également 35 policiers du RAID et de la compagnie de sécurisation et d’intervention sont prêts à être projetés depuis la Réunion et sept experts de la gestion de crise arriveront cette semaine. 13 avions sont aussi disponibles.

Un couvre-feu sera instauré à partir de ce mardi 17 décembre, entre 22 heures et 4 heures du matin. Selon place Beauvau, l’état d’urgence n’est pas nécessaire pour le moment. « L’état d’urgence qui ouvre des dispositions spéciales en matière d’assignation à résidence, de visite domiciliaire ou de création de périmètre de protection ne paraît pas adapté en l’état, mais reste une éventualité si la situation devait se dégrader », peut-on lire.

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Victimes à Mayotte : le sénateur Saïd Omar Oili réclame une commission d’enquête sur la gestion de crise

Trois semaines après le passage ravageur du cyclone Chido sur Mayotte, le sénateur RDPI (Renaissance) de l’archipel Saïd Omar Oili était l’invité de la matinale de Public Sénat. Victimes de Chido : « J’ai posé des questions régulièrement aux services de l’Etat et je n’ai jamais eu de réponses » Interrogé par la journaliste du Journal de Mayotte Mathilde Hangard, le sénateur exprime son fort agacement concernant la gestion de crise de l’Etat. Auteur d’une demande de commission d’enquête sur la gestion de crise, l’élu a écrit le 7 janvier un courrier au ministre des Outre-mer afin de connaître le bilan des victimes de la catastrophe naturelle. A date, les chiffres officiels font état de 39 morts, 124 blessés graves, 4 232 blessés légers. « J’ai posé des questions régulièrement aux services de l’Etat et je n’ai jamais eu de réponses », s’indigne-t-il, « je ne peux pas, au nom des victimes et de ceux qui souffrent, laisser tomber ce sujet-là, parce qu’il y a des gens qui sont peut-être ensevelis sous les décombres et que l’on n’a jamais retrouvés ». Saïd Omar Oili s’inquiète pour les Mahorais et déplore un manque de communication, d’anticipation et de transparence dans l’aide apportée aux sinistrés. « On n’a pas cherché [les personnes disparues]. Je suis élu local depuis vingt-cinq ans. Il y a des gens, quand on va dans les quartiers, je ne les vois pas. Ils sont où ? », demande-t-il sur le plateau de Public Sénat. « Je n’accuse personne, mais pour l’heure […] il n’y a pas de transparence, on dit tout et son contraire ». Mathilde Hangard, présente sur place, souligne que malgré les annonces de la préfecture, certains habitants n’ont toujours pas accès à l’eau, que des queues se forment dans les supermarchés, qu’on s’éclaire encore à la bougie par endroits et que des Mahorais doivent faire parfois plusieurs kilomètres pour trouver du réseau. Le ministère de l’Intérieur annonce pourtant sur son site que « presque 100 % de la population est raccordée à l’eau courante », que « 72, 5 % des clients sont alimentés » en électricité et qu’entre 85 et 93 % des abonnés des opérateurs sont couverts par le réseau. « J’espère qu’au nom de ces victimes, on ira jusqu’au bout de cette commission parlementaire » Ces écarts, Saïd Omar Oili ne se les explique pas. C’est la raison pour laquelle il a demandé au président de son groupe la constitution d’une commission d’enquête sur la gestion de crise. « J’espère qu’au nom de ces victimes, on ira jusqu’au bout de cette commission parlementaire, pour qu’enfin ce genre de choses ne se passe plus dans nos territoires vulnérables », affirme-t-il. D’autres territoires ultramarins sont sujets aux cyclones, comme La Réunion ou les Antilles. Au travers de cette commission d’enquête, l’élu souhaite également mettre en lumière le manque d’anticipation. « Pourquoi, alors que depuis le 8 décembre nous savions tous que le cyclone allait taper Mayotte et qu’il serait très violent, n’a-t-on pas prépositionné des gens sur place pour aller chercher les victimes ? », s’interroge-t-il, « on le voit dans le monde entier, lorsqu’un événement pareil arrive, on prend les mesures de précaution, ça n’a pas été fait cette fois-ci ». Projet de loi d’urgence pour Mayotte : un texte « plein de mesures mélangées » Pour faire face à l’urgence et la reconstruction, qui s’annonce colossale, le nouveau gouvernement planche sur un texte d’ « urgence », présenté ce matin en conseil des ministres, et sur un texte « de refondation » présenté en mars. Des projets de loi qui laissent sceptique le sénateur de Mayotte. Il juge le texte d’urgence fourre-tout, avec « plein de mesures mélangées ». Pourtant, les enjeux sont majeurs, en particulier en ce qui concerne la rentrée scolaire des élèves de l’archipel. Sur le plateau de Public Sénat, Saïd Omar Oili s’inquiète : « Dans l’étude d’impact de la loi d’urgence, on parle de 47 % des établissements publics détruits. Comment peut-on imaginer faire une rentrée de 117 000 élèves ? Ce n’est pas possible ». D’autant que les salles de classe manquaient bien avant le passage du cyclone, d’après le sénateur. Ce que l’élu attend surtout, ce sont des moyens, alors que l’examen du projet de loi de finances sera repris la semaine prochaine au Sénat. Il dénonce l’interventionnisme déconnecté de l’Etat. « Les gens qui viennent chez nous s’occuper de la reconstruction ne connaissent pas la culture mahoraise. La gestion même de la crise est désastreuse, parce qu’on a fait venir des gens de l’hexagone et il n’y a pas d’élus locaux et d’habitants parmi eux », déplore-t-il. Lutte contre l’immigration à Mayotte : « C’est un problème de moyens » Le second projet de loi à venir concernant l’archipel s’attaquera à l’immigration. C’est le souhait des ministres des Outre-mer Manuel Valls et de l’Intérieur Bruno Retailleau. « Nous avons un problème avec l’immigration », affirme Saïd Omar Oili. « Il n’y a jamais eu autant de barques arrivées chez nous que depuis qu’il y a eu le cyclone, car tous les bateaux militaires qui devaient contrôler les frontières se sont échoués », explique-t-il. Mais pour lui, la solution ne réside pas nécessairement dans un nouveau durcissement du droit du sol. « Il y a de l’hypocrisie dans tout ce que nous faisons : nous avons demandé depuis longtemps la fin des cartes de séjour territorialisées », s’indigne-t-il. Ces cartes de séjour, qui n’existent qu’à Mayotte, interdisent leur détenteur de se déplacer dans tout autre département français. Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, avait prévu de les supprimer en février 2024, lors de son passage sur l’archipel. Saïd Omar Oili plaide également pour une augmentation des moyens dans le contrôle des côtes de l’île pour empêcher toute arrivée illégale. « Aux Antilles, ils ont des patrouilleurs partout, c’est un problème de moyens », affirme-t-il. Interrogé sur la présence de Marine Le Pen à Mayotte en début de semaine, Saïd Omar Oili est catégorique : « Je ne veux pas que Mayotte serve de politique au niveau national. J’ai l’impression que notre île est devenue un jeu humain. 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