POLLUTION AND FLOODING
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La justice condamne l’Etat pour de la pollution à l’arsenic dans l’Aude : « Une avancée décisive »

Le tribunal administratif de Montpellier enjoint à l’Etat de réaliser les travaux nécessaires pour réduire la pollution liée à l’ancien bassin minier de Salsigne, dans l’Aude. En 2020, la sénatrice socialiste du département, Gisèle Jourda, avait obtenu le lancement d’une commission d’enquête sur les pollutions industrielles et minières des sols.
Romain David

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Fait rare : l’Etat a été condamné par la justice à mettre en place des mesures de réparation écologique pour contenir la pollution issue de l’ancien bassin minier de Salsigne dans l’Aude. Dans son ordonnance, le tribunal administratif de Montpellier enjoint le préfet de l’Aude à prendre, dans un délai d’un an, « toutes les mesures utiles pour réparer le préjudice écologique constaté et prévenir l’aggravation des dommages ». Il s’agit de « maitriser la diffusion des polluants issus des anciennes mines », notamment de l’arsenic retrouvé dans les sols et les cours d’eau environnant. Par ailleurs, l’État est condamné à verser la somme de 5 000 euros à l’une des quatre associations requérantes, Terres d’Orbiel, « en réparation de son préjudice moral ».

Le site de Salsigne, à une quinzaine de kilomètres au nord de Carcassonne, est devenu un cas emblématique de la pollution industriel des sols, au point d’avoir motivé une commission d’enquête sénatoriale en 2020. « On ne peut que saluer la décision du tribunal qui marque une avancée décisive puisqu’elle contraint l’Etat », réagit auprès de Public Sénat la sénatrice PS de l’Aude Gisèle Jourda, qui avait été la rapporteure de cette commission d’enquête. « Désormais, mon rôle en tant qu’élue sera de faire en sorte que les travaux nécessaires soient ben réalisé en cette période de disette budgétaire. »

Pollution à l’arsenic

Cette ancienne mine d’or, l’une des plus grandes d’Europe, a fermé en 2004 après plus d’un siècle et demi d’exploitation, mais en 2018, un épisode méditerranéen provoque des crues dans les cours d’eau environnants et une série d’inondations. Cet événement soulève de vives préoccupations chez les riverains. « On a retrouvé des taux alarmant d’arsenic chez les bébés » se souvient Gisèle Jourda qui évoque l’inertie des autorités de santé. « On a cherché à mettre la poussière sous le tapis. J’ai écrit directement au président de la République. »

« Au Sénat, mon groupe a demandé l’ouverture d’une commission d’enquête, les macronistes s’y sont opposés car ils craignaient que l’on affole inutilement les populations. Finalement, c’est grâce au soutien des centristes et du président Larcher que nous avons pu lancer nos travaux », se souvient encore la sénatrice.

Le tribunal administratif de Montpellier considère que l’Etat « a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en n’exigeant pas une diminution plus significative des polluants ou en ne prenant pas les mesures qui devaient s’imposer à lui depuis l’arrêt de l’exploitation des mines ».

Si des opérations de réhabilitation d’une partie du site ont été lancées dès la fin des années 1990, tenant pour l’essentiel à des destructions de bâtiments et au remblayage des galeries, la commission d’enquête du Sénat épingle « l’absence de véritable concertation » entre l’État, les collectivités territoriales et les associations de riverains pour la mise en place d’un plan d’action. « À défaut d’obligation législative, la définition d’un tel plan reste facultative, laissée à la libre appréciation du préfet concerné », écrivent les élus.

Après la publication du rapport, une nouvelle membrane d’étanchéité a néanmoins été posée sur le bassin de stockage de Montredon, où repose une partie des déchets miniers de Salsigne, destinée à empêcher l’infiltration des eaux de pluies.

Un arsenal législatif trop fragile ?

Les travaux du Sénat ont donné lieu à la présentation d’une proposition de loi transpartisane, un texte ambitieux d’une vingtaine d’articles visant à consacrer un droit opposable à la protection des sols, et à poser les principes d’une politique nationale de prévention et de gestion des sites et sols pollués. Si elle n’a jamais été inscrite à l’ordre du jour, une partie des dispositions ont toutefois été reprises, sous forme d’amendements, dans la loi Climat & Résilience du 22 août 2021.

Pourtant, Gisèle Jourda déplore l’absence « d’un grand texte de protection des sols, comme il en existe pour l’eau ou l’air ». « Le problème avec les sols, c’est que vous touchez à la propriété privée. Si le législateur impose des réglementations, cela risquerait d’impacter la vente des parcelles. Nous sommes face à une superposition des contraintes. » Une directive européenne de protection des sols est actuellement en cours d’adoption. Elle vise à parvenir à 100% de sols en bonne santé d’ici à 2050, un objectif néanmoins « non contraignant ».

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