C’est avec une déclaration fracassante, et qui en restera probablement au stade des mots, que Laurent Wauquiez (LR) a interrompu son long silence médiatique. Samedi, devant des membres de l’Association des maires ruraux de France réunie en congrès à l’Alpe d’Huez, le président de la région Auvergne Rhône-Alpes s’est érigé en pourfendeur d’un des chapitres sensibles de la loi Climat et résilience, l’objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN).
Cet objectif contraignant impose de réduire de moitié, d’ici à 2031, la consommation d’espaces naturels et agricoles par rapport à la décennie précédente. Deuxième phase, la loi impose le zéro artificialisation nette en 2050, c’est-à-dire de ne plus construire sur des espaces naturels, à moins de renaturer des surfaces équivalentes. L’ancien président des Républicains a fustigé une loi « ruralicide » et annoncé que la collectivité qu’il dirige sortirait du dispositif. « Mettre sous cloche les décisions des permis de construire sur la ruralité, cela signifie qu’on s’interdit toute forme d’avenir […] J’ai décidé que la région se retirait du processus. On le fait en lien avec les départements avec lesquels on a échangé dessus », a-t-il déclaré sous les applaudissements.
Pour rappel, la loi du 22 août 2021 impose, entre autres, aux régions de fixer un objectif de réduction de la bétonisation des terres à travers leur document de planification (Sraddet). Théoriquement, difficile pour le président de la région de choisir unilatéralement de se soustraire à cet objectif. « Sur le plan du droit, un président ne peut pas décider de ne pas appliquer la loi », rappelle tout d’abord maître Arnaud Gossement.
« Le juge administratif, aurait la possibilité d’amener la région à respecter la loi »
Si le Conseil régional suivait son président dans cette voie, le préfet interviendrait pour le rappeler à l’ordre. « Le préfet a toute une palette de mesures à sa disposition, à commencer par le dialogue. Si la région décidait de s’arc-bouter, le juge administratif, dans un deuxième temps, aurait la possibilité d’amener la région à respecter la loi », ajoute l’avocat spécialisé dans le droit de l’environnement. Ce cas de figure s’est déjà produit. L’an dernier, le tribunal administratif a ordonné à des municipalités, qui refusaient de faire travailler leurs agents municipaux au moins 35 heures par semaine, de se conformer à la loi.
Autre donnée importante : les régions sont loin d’être le seul échelon impliqué dans le respect du zéro artificialisation nette. « Dans l’artificialisation des sols, l’élu clé c’est le maire ou l’intercommunalité », insiste Arnaud Gossement. Il n’est donc pas dit que tous les maires de la région décideront de suivre d’une seule voix Laurent Wauquiez.
La sortie de l’élu LR, qui n’a jamais abandonné ses ambitions présidentielles, a déjà été fermement condamnée au gouvernement ou dans la majorité présidentielle. « Vous ne pouvez pas être un élu de la République et vous soustraire aux lois votées par le Parlement, ça n’existe pas », s’est notamment indignée la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. « S’il ne respecte pas la loi, j’espère qu’effectivement il y aura des sanctions », a également déclaré Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement.
Les conséquences d’une telle déclaration semblent avant tout politiques, avant d’être juridiques. Il faut d’ailleurs rappeler à ce titre que sa famille politique, LR, était largement à l’origine d’une proposition de loi votée en juillet pour assouplir et donc permettre la mise en œuvre du ZAN.