Les jeunes et les maths : une équation complexe

Les jeunes et les maths : une équation complexe

Dans 20 ans en 2022, ce mois-ci, Tâm Tran Huy et ses invités se penchent sur le rapport des jeunes aux maths. Pourquoi les jeunes Français n’ont-ils pas la bosse des maths ? Comment cette matière est-elle enseignée en France et pourquoi les filles sont moins nombreuses à étudier les maths et à embrasser une carrière scientifique ? Autant de questions sur lesquelles se penchent jeunes et experts dans l’émission du mois de septembre.
Public Sénat

Par Tam Tran Huy

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Mention très passable pour les jeunes Français en maths

 

Premier constat, démontré par de nombreux classements internationaux : le niveau des jeunes Français en maths est très moyen. Et surtout, il baisse : le niveau d’un élève en 4ème en 2019 est le même que celui d’un élève en 5ème en 1995. En 25 ans, nous avons donc perdu l’équivalent d’un niveau, d’une classe ! Une situation d’autant plus dommageable souligne le neuropsychologue Stanislas Dehaene que « les mathématiques sont un développement de l’esprit qui est indispensable pour tous. D’ailleurs, elles sont aussi demandées dans d’autres domaines. Ce n’est pas une petite élite qui a besoin des maths. » Il y a donc bien du travail pour rendre les maths moins abstraites, pour intéresser les élèves. Un défi auquel s’attelle Estelle Kollar, enseignante au collège et qui connaît un grand succès avec le compte Wonderwomath sur TikTok. Son objectif : « viser des élèves en très grandes difficultés ou qui n’ont pas d’atomes crochus avec les maths » et « donner du sens » à la matière.

 

Recherche enseignants en mathématiques

 

Ce manque d’intérêt pour les maths a pour corollaire un manque d’attractivité aujourd’hui du métier d’enseignant, particulièrement en mathématiques. Pierre Arnoux, vice-président de la Commission française pour l’enseignement des mathématiques souligne que, depuis plusieurs années déjà, « on a moins de candidats que de postes ». Solène Abadie, étudiante en Master 2 MEEF, qui prépare le CAPES de mathématiques souligne d’ailleurs que cette année, dans sa promo, « au premier cours, on nous a demandés qui veut être prof dans la salle, la moitié disait 'c’est mon plan B'. » Le plus beau métier du monde manque aujourd’hui de reconnaissance, les conditions d’exercice sont difficiles, les salaires restent bas, ce qui explique donc que les élèves avec un bon bagage en mathématiques ne se tournent plus vers l’enseignement.

 

Le retour des maths dans le tronc commun, une bonne réforme ?

 

Face à ce constat, la réforme du lycée de 2019 n’a guère amélioré la situation, bien au contraire. En retirant les maths du tronc commun et en créant une spécialité de 9h en classe de première d’un niveau très exigeant, la réforme a provoqué l’abandon des maths pour de nombreux élèves deux ans avant le Bac. Face au tollé suscité, le gouvernement a annoncé un retour partiel des maths dans le tronc commun, à raison d’1h30 par semaine. Mais pour Pierre Arnoux, ce rétropédalage s’est fait dans la précipitation et la désorganisation générale.

 

Maths : des inégalités femmes-hommes flagrantes

 

Cette réforme a surtout eu pour effet d’accentuer les inégalités femmes-hommes dans l’étude des maths. Beaucoup de lycéennes arrêtent les maths en première et se ferment donc de nombreuses portes. Pourtant, les petites filles en maternelle ne sont pas moins bonnes que les petits garçons en maths. Alors comment expliquer ces disparités ? Dès le CP, explique Stanislas Dehaene, en quelques mois, les disparités apparaissent : « A l’entrée en CP, il n’y a pas de différence garçons/filles. En 4 mois, les garçons deviennent meilleurs et au bout d’1 an, la différence devient importante. Les petites filles internalisent que les maths, ce ne sera pas pour elles. »

 

 

Face à ce constat déjà ancien, l’association « Femmes et mathématiques », présidée par Anne Boyé, organise des expositions qui mettent en avant de grandes figures féminines dans les sciences, des journées de sensibilisation dans les collèges et lycées pour que les jeunes filles se projettent vers des carrières scientifiques. L’école Polytechnique, qui fête cette année le cinquantenaire de l’ouverture de son concours d’entrée aux femmes, s’est aussi lancée dans des actions pour que plus de femmes soient tentées par la carrière d’ingénieure. Le choix fait par Bérénice Dieu, étudiante à Centrale Supelec, très minoritaire dans sa promo. Pour le chercheur Thomas Breda, enseignant à l’école d’Economie de Paris, il faut aussi voir le problème à l’envers : « Une partie du problème, c’est aussi de faire faire aux garçons des lettres, des métiers du soin et des métiers connotés féminins. »

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