Culture du clash ou refus du désaccord : débat entre Eugénie Bastié et Jean Birnbaum
« La guerre des idées » et « Le Courage de la nuance », ce sont les titres des derniers livres des invités de Livres & vous. L’une est éditorialiste au Figaro et se revendique conservatrice, l’autre est directeur du Monde des livres et libéral, ils livrent leur vision du débat d’idées.

Culture du clash ou refus du désaccord : débat entre Eugénie Bastié et Jean Birnbaum

« La guerre des idées » et « Le Courage de la nuance », ce sont les titres des derniers livres des invités de Livres & vous. L’une est éditorialiste au Figaro et se revendique conservatrice, l’autre est directeur du Monde des livres et libéral, ils livrent leur vision du débat d’idées.
Public Sénat

Par Nils Buchsbaum

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

« Je pense que les idées ont toujours été plus ou moins en guerre. Toute discussion est même le début d’une guerre », déclare Eugénie Bastié, éditorialiste dans les pages « Idées et Débats » du Figaro. Selon elle, « il est faux de dire que le débat est seulement un dîner de gala où tout le monde s’entend bien. Il y a toujours eu de l’anathème dans la vie des idées, des positions très opposées ».
Il y aurait donc un « retour de la guerre des idées, après la parenthèse enchantée des années 1980-90 » où dominait l’idée selon laquelle la fin de l’Histoire et des idéologies était venue, « comme si les idées divergentes avaient disparu et qu’on allait tous se réconcilier autour de la démocratie, du marché et des droits de l’homme », affirme Eugénie Bastié à Guillaume Erner.


Selon Eugénie Bastié : « Auparavant les visions du monde étaient très opposées mais de façon argumentée »

« Il y a aujourd’hui des clivages très profonds et une nouvelle forme de sectarisme », continue Eugénie Bastié. Mais pour elle ce n’est pas nouveau : « Ce sectarisme avait déjà existé auparavant, par exemple dans les années 1960-70 ». La différence serait « qu’aujourd’hui, ce sectarisme se double d’une nouvelle dimension qui est une dimension d’affect. C’est-à-dire qu’auparavant les visions du monde étaient très opposées mais de façon argumentée, aujourd’hui, on veut faire taire des idées parce qu’elles blessent. Les idées sont des offenses et ça, je crois que c’est assez nouveau ».


Pour Jean Birnbaum la nuance serait la capacité à rentrer en dissidence avec soi-même… penser contre soi-même.


« J’ai ressenti la nécessité intime et solide de faire ce livre », déclare Jean Birnbaum. Pour ses deux précédents livres, « j’avais participé à des dizaines de réunions publiques dans des milieux très différents et j’ai ressenti un durcissement, un culte du clash, une mauvaise foi généralisée ».
Il a également parfois éprouvé soupçon et hostilité dans les réunions auxquelles il a participé. Il raconte : « On me disait « mais d’où tu parles, de qui est ce que tu fais le jeu en disant ce que tu dis ». Dans son livre « Le courage de la nuance », il la définit donc comme « la capacité à rentrer en dissidence avec soi-même, penser contre soi-même ».

Mais Eugénie Bastié souligne cependant que « notre époque est paradoxale : elle a le culte du clash mais en même temps elle refuse le clash. Toute dispute intellectuelle est immédiatement qualifiée de clash. Le désaccord est vu comme quelque chose d’intolérable ». Pour sa part, elle soutient ne pas être relativiste : « J’ai des convictions sur un certain nombre de sujets. Je ne crois pas à l’objectivité intellectuelle, mais je crois à une forme d’honnêteté intellectuelle qui consiste à dire oui j’ai des convictions, je parle d’un certain endroit, mais je peux me mettre à la place de l’autre, faire droit à sa parole ».

Retrouvez cette émission en replay ici

Le courage de la nuance, Jean Birnbaum, éditions du Seuil
La guerre des idées, Eugénie Bastié, éditions Robert Laffont

Partager cet article

Dans la même thématique

Culture du clash ou refus du désaccord : débat entre Eugénie Bastié et Jean Birnbaum
5min

Politique

Financement de la lutte contre les violences faites aux femmes : « Il faut donner à l’administration les moyens de ses missions », prévient la commission des finances

Cinq ans après un premier rapport sur le financement de la lutte contre les violences faites aux femmes, les sénateurs Arnaud Bazin et Pierre Barros ont présenté ce jeudi 3 juillet un nouveau rapport sur le sujet. Les deux élus pointent un financement trop faible et une politique publique peu lisible.

Le

Culture du clash ou refus du désaccord : débat entre Eugénie Bastié et Jean Birnbaum
2min

Politique

Travail le 1er mai des boulangers et des fleuristes : « Nous souhaitons évidemment protéger ce 1er mai, mais par contre nous souhaitons clarifier la situation »

Invitée de la matinale de Public Sénat, la sénatrice de Vendée, Annick Billon, a défendu les principes de sa proposition de loi visant à permettre aux fleuristes et aux boulangers d’ouvrir le 1er mai. Un texte qui vise à éviter que ces commerçants soient exposés à des amendes en cas d’ouverture.

Le