Budget 2023 : le Sénat vole au secours du budget d’Action Logement

Budget 2023 : le Sénat vole au secours du budget d’Action Logement

Lors de l’examen du budget 2023, le Sénat s’est opposé à un transfert de crédits budgétaires d’Action Logement, un organisme paritaire qui aide les salariés à se loger, au Fonds national d’aide à la pierre (FNAP), en charge de politiques publiques étatiques. Gabriel Attal a prévenu que si Action Logement n’abondait pas, les bailleurs sociaux seraient mis à contribution.
Louis Mollier-Sabet

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

C’est une sorte de partie de poker qui s’est joué ce jeudi au Sénat. L’exécutif avait initialement prévu, dans le budget 2023, que l’organisme paritaire géré par les partenaires sociaux, Action Logement, compense 300 millions de baisses de cotisations en abondant le Fonds National des Aides à la Pierre (FNAP), un organisme sous la tutelle de Bercy. Une atteinte au paritarisme « insupportable » pour les sénatrices et sénateurs présents, qui ont appelé l’Etat à prendre sa place dans la politique de logement, et à ne pas « ponctionner » les organismes paritaires qui gèrent mieux leurs finances.

 

« Cela ferait supporter le poids du financement du logement aux bailleurs sociaux »

 

« À l’heure où plus de 2 millions de foyers sont en attente de logements sociaux, il paraît dangereux de vouloir déstabiliser ce modèle vertueux », s’est tout de suite inquiété Valérie Létard, sénatrice centriste. Cette spécialiste du sujet a d’ailleurs déposé un amendement supprimant cette disposition, en arguant que le FNAP pourrait se reporter sur des crédits non-consommés ou des réserves de trésorerie.

Une solution pas idéale, puisqu’elle ferait « supporter le poids du financement de la construction et de la rénovation aux bailleurs sociaux », a expliqué Dominique Estrosi Sassone, sénatrice LR, mais contrainte par le fameux article 40 sur la « recevabilité financière » des amendements, qui a obligé les parlementaires à parfois recourir à des contournements de la règle pour proposer des solutions, tout au long de ce projet de loi de finances.

La sénatrice des Alpes-Maritimes, rapporteure pour avis sur les crédits concernant l’hébergement et l’urbanisme, le rappelle : « L’article 40 nous empêche de faire supporter la charge à l’Etat, ce qui serait parfaitement légitime. Je rejoins Valérie Létard sur les dangers qui pèsent sur le financement d’Action Logement, mais nous sommes démunis parce que supprimer cette ponction rejaillirait sur les bailleurs. Il faut que vous nous donniez de véritables garanties. »

« L’argent d’Action Logement devient l’argent de l’Etat, alors que c’est l’argent des salariés ! »

L’amendement de Valérie Létard a fini par ressembler à une sorte d’ultimatum posé au gouvernement, ou au moins à ce que l’on appelle un « amendement d’appel » particulièrement insistant pour que le gouvernement trouve une autre solution pour financer ses politiques de logement.

« À chaque fois qu’Action Logement finance les politiques publiques à la place de l’Etat, c’est toujours des euros en moins pour le logement, parce que ce sont censées être des politiques additionnelles. Là, on conforte le fait que l’argent d’Action Logement devient l’argent de l’Etat, alors que c’est l’argent des salariés ! Comment on trouve des infirmières à Paris si on ne peut plus les loger ? C’est ça qui est en jeu », a plaidé Valérie Létard.

La gauche a soutenu sans équivoque l’amendement de Valérie Létard, face à cette « ponction inacceptable », selon les mots du sénateur écologiste Daniel Breuiller. Tout comme une partie de la droite, incriminant des « mauvaises pratiques » de l’Etat, selon les mots du sénateur LR, René-Paul Savary, qui a « dénoncé le fait d’aller ponctionner dans les poches de ceux qui gèrent mieux au niveau paritaire que quand l’Etat s’en occupe directement. »

« Ce qui n’est pas mis par Action Logement sera mis par les bailleurs sociaux, je suis franc et sincère »

Mais face à l’ultimatum des sénateurs, Gabriel Attal a tenu le cap : « On est dans une situation financière contrainte, cela impose de faire des choix qui sont toujours des choix difficiles. Cela ne donne pas les marges pour faire tout ce que nous voudrions faire, et cela impose que tous les acteurs soient mis à contribution. Ce qui n’est pas mis par Action Logement sera mis par les bailleurs sociaux, je suis franc et sincère, je ne lèverai pas le gage sur ces amendements. »

Quand on fixe un ultimatum, c’est mieux de le tenir, et les sénateurs ont par conséquent voté l’amendement de Valérie Létard, qui supprime donc cette contribution de 300 millions au FNAP, sans qu’une autre solution ne soit mise sur la table pour le moment. La navette parlementaire dira si l’exécutif reste sur ses positions ou si le coup de semonce du Sénat aura permis de faire bouger les choses.

Dans la même thématique

Formulaire de demande de RSA (Revenu de solidarite active), allocation assurant aux personnes sans ressources un revenu minimum variable selon la composition du foyer
7min

Politique

Assurance-chômage : Quand le candidat Macron promettait une « assurance-chômage pour tous » en 2017

« Oui, il y aura une réforme de l’assurance-chômage cette année », a annoncé le Premier ministre, ce mercredi 27 mars, chez nos confrères de TF1. Troisième réforme en la matière depuis l’élection du Président de la République, ses conditions ont largement été durcies en sept ans… loin de la promesse du candidat Macron qui proposait de faire de l’assurance-chômage, un droit « universel ».

Le

French PM gathers the government for a seminar on work
10min

Politique

Réforme de l’assurance chômage : « Depuis 2017, les partenaires sociaux se sont fait balader et avec Gabriel Attal, ça sera la même chose »

La nouvelle réforme de l’assurance chômage que prépare le gouvernement passe mal chez les sénateurs. « On a dévoyé la gouvernance de l’assurance chômage », dénonce la sénatrice LR Frédérique Puissat, qui défend le rôle des syndicats et du patronat. « Attaché » aussi au paritarisme, le centriste Olivier Henno, « comprend » en revanche l’idée de réduire la durée des indemnisations. Quant à la socialiste Monique Lubin, elle se dit « atterrée » que le gouvernement relaye « cette espèce de légende selon laquelle les gens profiteraient du chômage ».

Le