Budget : satisfecit du gouvernement sur sa gestion en 2018, prudence de la Cour des comptes
Le ministre de l’Action et des Comptes publics salue des « engagements tenus » sur le budget 2018. La Cour des comptes relève aussi des chiffres meilleurs mais épingle encore le budget de l’État. Certains sénateurs doutent d’un véritable assainissement des finances.

Budget : satisfecit du gouvernement sur sa gestion en 2018, prudence de la Cour des comptes

Le ministre de l’Action et des Comptes publics salue des « engagements tenus » sur le budget 2018. La Cour des comptes relève aussi des chiffres meilleurs mais épingle encore le budget de l’État. Certains sénateurs doutent d’un véritable assainissement des finances.
Public Sénat

Par Guillaume Jacquot (Sujet vidéo : Quentin Calmet)

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Les commissions des Finances des deux chambres du Parlement retrouvent leur « printemps de l’évaluation ». À l’occasion de l’examen cet été du projet de loi règlement – un texte budgétaire qui acte les résultats financiers de l’année précédente et l’écart entre les prévisions et l’exécution réelle – les sénateurs auditionnaient ce mercredi, dans la foulée des députés, le ministre de l’Action des Comptes publics, Gérald Darmanin, et le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud.

Moins exposé ces derniers temps, Gérald Darmanin avait le sourire devant les parlementaires, vantant des « engagements tenus » et la « crédibilité » du gouvernement dans l’assainissement des finances publiques. L’an dernier, le déficit public s’est réduit à 2,5 % du PIB, un niveau inférieur à l’objectif de 2,8 %. « C’est la première fois depuis 10 ans que le pays parvient à contenir sous le seuil des 3 % du PIB son déficit public », proclame le représentant de Bercy.

Baisse de la dépense publique

La part des dépenses publiques dans le PIB, la richesse produite chaque année dans le pays, recule également : le ratio passe de 55 % à 54,4 %. Le ministre considère que l’engagement d’une baisse de trois points d’ici la fin du quinquennat pourra être tenu. Mais en valeur absolue – c’est-à-dire en milliard d’euros – ces dépenses continuent leur progression.

Malgré la baisse des impôts défendue par le gouvernement, les recettes de l’État ont augmenté sur un an, tirées par la croissance des revenus tirés de la TVA et de l’impôt sur les sociétés, fruits de la conjoncture économique. Gérald Darmanin y voit le signe d’un « cercle vertueux » créé par la diminution des prélèvements obligatoires.

« C’est pratiquement en ligne par rapport à ce qui était prévu », commente Didier Migaud, interrogé par Public Sénat sur la progression des recettes. Mais les sages de la rue Cambon notent tout de même qu’elle est moins importante qu’en 2017 :

Budget 2018 : "Il y a une exécution plus sereine" observe Didier Migaud
00:58

Le président de la Cour des comptes relève aussi un « déficit budgétaire de l’État en hausse ». C’est d’ailleurs ce que reproche la droite, majoritaire au Sénat : l’État est un « mauvais élève » comparé aux collectivités territoriales et à la Sécurité sociale, qui ont concentré l’essentiel de l’effort dans la baisse de la dépense publique.

Sur ces dépenses locales, Gérald Darmanin salue d’ailleurs le travail accompli par les plus grosses collectivités, désormais soumises à une contractualisation budgétaire avec l’État (contrat de Cahors). En échange d’un maintien des dotations de l’État, les plus grandes collectivités territoriales doivent s’engager à limiter chaque année la progression de leurs dépenses de fonctionnement à 1,2 %. Ce nouveau système a « très bien fonctionné », de l’avis de Gérald Darmanin. En moyenne, les dépenses ont diminué « bien en-deçà » de l’objectif prévu.

« Nos recettes ne couvrent que neuf mois de dépenses ! » dénonce Vincent Delahaye

Globalement, la dépense publique a poursuivi sa progression en 2018 (+ 0,3 %), mais à un rythme « plus ralenti » qu’en 2017 (+ 3,2 %), note Didier Migaud. L’exercice est d’ailleurs l’occasion pour la Cour des comptes d’épingler la multiplication des fonds. Ces structures sortent du bilan de l’État et échappent au contrôle parlementaire.

Un point fait néanmoins consensus : la sincérité budgétaire a progressé. Autrement dit, l’adéquation entre ce qui doit être dépensé, et les moyens qui sont mis en face, s’améliore. « Il y a une exécution plus sereine du budget 2018 parce que la loi de finance initiale comportait sensiblement moins de sous-budgétisations par rapport à la loi de finance initiale pour 2017 », reconnaît le premier président de la Cour des comptes. Ce que reconnaissent aussi Les Républicains.

Les résultats définitifs de l’exécution du budget 2018 sont cependant loin de dissiper le scepticisme, voire les critiques, de la majorité sénatoriale de droite et du centre à la commission des Finances. « On ne peut pas être satisfait. Il n’y a pas vraiment d’assainissement des finances publiques », s’alarme le centriste Vincent Delahaye. « Nos recettes ne couvrent que neuf mois de dépenses ! » Le sénateur de l’Essonne s’inquiète du déficit de l’État « le plus gros depuis 2014 ». Regardez :

Budget 2018 : "Il n'y a pas vraiment d'assainissement des finances publiques", dénonce Vincent Delahaye
01:04

120.000 fonctionnaires en moins : toujours « un objectif du gouvernement »

La dette fait aussi partie des motifs d’inquiétude les plus sérieux. Si Gérald Darmanin assure que le gouvernement a réussi à « stabiliser » l’endettement public (à 98,4 % du PIB), plusieurs parlementaires évoquent le risque d’un « impôt différé » avec le risque d’une hausse des taux d’intérêt sur les emprunts d’État.

L’exercice 2018 pourrait donc se résumer, suivant les uns, à un verre à moitié plein, suivant les autres, à un verre à moitié vide. Mais déjà les nuages s’amoncellent dans le ciel pour cette année 2019. Le coût des mesures prises en faveur des gilets jaunes (mesures d’urgence de décembre 2018 et annonces d’Emmanuel Macron d’avril 2019, comme la baisse de l’impôt sur le revenu) devrait mettre à rude épreuve les trajectoires imagées par le gouvernement.

C’était d’ailleurs l’occasion de rappeler pour Gérald Darmanin les deux axes prévus pour réduire les dépenses : la révision des niches fiscales des entreprises, et le levier de la masse salariale de l’État. Alors qu’Emmanuel Macron semblait avoir lâché du lest sur l’objectif de réduction de 120 000 postes dans la fonction publique, le ministre des Comptes publics a réaffirmé que le chiffre constituait « toujours un objectif du gouvernement ».

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