Climat : le Sénat pousse pour « un accord ambitieux » à la COP26

Climat : le Sénat pousse pour « un accord ambitieux » à la COP26

Dans une résolution transpartisane adoptée ce 2 novembre, les sénateurs rappellent la « nécessité » que la conférence sur le climat de Glasgow débouche sur des résultats et poursuive le cadre posé dans l’accord de Paris en 2015.
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Les deux semaines à venir seront décisives pour le climat. La 26e conférence internationale sur le climat, qui s’est ouverte le 31 octobre à Glasgow, sera pour ainsi dire le moment de vérité sur les engagements signés en 2015 à Paris, au moment de la COP21. Les 191 Etats qui ont ratifié l’Accord de Paris se sont engagés à limiter le réchauffement climatique à un niveau inférieur à deux degrés Celsius par rapport au niveau préindustriel, mais aussi à poursuivre leurs efforts pour limiter encore la progression à 1,5 degré. Or, les engagements des pays sont actualisés tous les cinq ans. Après un an de retard dû à la pandémie, le moment est venu.

Face aux enjeux de cette nouvelle conférence internationale, les sénateurs ont tenu à marquer le coup. Ils ont adopté en séance ce 2 novembre une proposition de résolution « visant à affirmer la nécessité d’un accord ambitieux lors de la COP 26 de Glasgow ». Un tel accord permettra de « garantir l’application effective de l’Accord de Paris sur le climat », poursuit l’intitulé. Comme toutes les résolutions parlementaires, le texte est politique mais non contraignant. La Constitution interdit toute injonction en direction du gouvernement ou mise en cause de sa responsabilité. L’appel sénatorial est cependant bienvenu. « La mobilisation des parlementaires est nécessaire, pour que l’exécutif se mobilise effectivement, à la hauteur des ambitions affichées », reconnaissait en octobre Stéphane Crouzat, ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique. « Il ne faut pas sous-estimer la puissance d’un symbole », a considéré le président du groupe écologiste, Guillaume Gontard. « Nous l’avons déposée afin de rappeler la responsabilité de la France sur ce sujet et réaffirmer le rôle de notre pays dans les négociations internationales », a expliqué le sénateur LR Didier Mandelli.

Transpartisan, le texte a été signé par des représentants de la quasi-totalité des groupes au Sénat. On compte notamment le sénateur écologiste Ronan Dantec (président du groupe de travail Enjeux internationaux – Climat), et le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Jean-François Longeot (Union centriste). Seul un membre du groupe communiste manque parmi les signataires. La sénatrice Marie-Claude Varaillas regrettait que « seuls trois groupes aient été associés à sa rédaction » initialement. Autre déception : le manque de force du texte. « Comment produire un sursaut majeur avant l’hécatombe du vivant sur cette planète », s’est-elle demandé. La résolution a été adoptée à l’unanimité, moins l’abstention des communistes. Malgré ce point de vue dissonant, la secrétaire d’Etat a salué l’état d’esprit dans lequel la résolution est née. « Le fait que vous la portiez ici d’une seule voix est essentiel », a déclaré Bérangère Abba.

Les sénateurs insistent sur le financement de l’aide au développement

Le texte adopté par le Sénat rappelle qu’il est « impératif » de respecter l’objectif de 100 milliards d’euros versés aux pays en développement, promesse formulée en 2009 à Copenhague (COP 25). « Sans intégration des enjeux de développement, nous ne pouvons espérer construire les nouvelles régulations dont nous avons besoin », a insisté le sénateur Ronan Dantec. La contribution française, de 3 milliards d’euros en 2015, devait être portée à 5 milliards en 2020. Son engagement atteindra même 6 milliards à partir de 2021. À l’échelle internationale, tous les pays sont loin de respecter leurs engagements. « Aujourd’hui, nous atteignons péniblement les 67 milliards », a rappelé lors des débats Bérangère Abba. La secrétaire d’État chargée de la Biodiversité espère néanmoins une « avancée », après les récentes annonces du G20.

La résolution juge surtout « impératif » que les modalités de l’article 6 de l’Accord de Paris soient fixées à Glasgow. Concrètement, les Etats doivent se mettre d’accord sur un système d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre, entre pays fortement émetteurs et nations plus vertueuses. « Derrière cet article, c’est potentiellement une nouvelle géographie économique du monde qui se dessine », a résumé Ronan Dantec. Ces négociations ont déjà signé l’échec de deux COP après les Accords de Paris.

Autre enjeu à prendre en compte à Glasgow : comment mesurer les différents efforts mis en œuvre par les signataires de l’accord de Paris. Pour le sénateur Philippe Tabarot (LR), cette COP doit être l’occasion de fixer « un cadre robuste garant de réciprocité ».

À l’heure où les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre sont revus à la hausse par plusieurs États, notamment au sein de l’Union européenne, les débats ont aussi l’occasion de tirer un premier bilan des Accords de Paris. Pour le socialiste Joël Bigot, la COP21 de Paris est un « héritage » sur lequel il faut s’appuyer. « Pour sortir des postures de Cassandre, cette résolution vous donne une feuille de route, ou plutôt, une feuille de rappel des objectifs que nous nous sommes fixés lors des Accords de Paris », a-t-il détaillé à la ministre. Pour Philippe Tabarot (LR), si la COP21 constitue toujours une « boussole », « six ans après, son héritage apparaît bien maigre ». Le contexte international apparaît aussi délicat, même si les Etats-Unis sont revenus à la table. « Nous ne pouvons que déplorer l’absence de dirigeants de certains pays émergents », a mis en avant Frédéric Marchand (LREM). Et de citer la Chine et la Russie, respectivement premier et quatrième plus gros émetteurs au niveau mondial.

« La France est loin d’être exemplaire », regrette le centriste Hervé Maurey

Comme plusieurs sénateurs l’ont rappelé, l’un des enjeux sera de tenir les engagements. La récente condamnation de l’État par le tribunal administratif, pour avoir manqué à ses engagements de réduction d’émissions, a été mise en exergue par plus d’un parlementaire. « Je dois malheureusement souligner que la France est loin d’être exemplaire », a par exemple reproché Hervé Maurey (Union centriste).

Quant au futur, le défaitisme n’a pas déteint dans les interventions. La sénatrice Marta de Cidrac (LR) a ainsi salué un accord préliminaire sur la lutte contre la déforestation, mais aussi les engagements de l’Inde en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, des « premiers signes encourageants », selon elle. « Un succès constituerait un formidable message d’espoir pour la planète, j’irais jusqu’à dire que ce serait une véritable espérance pour la jeunesse qui aspire à vivre dans un monde où l’horizon s’éclaircirait enfin », a aussi appelé de ses vœux Didier Mandelli (LR). Côté gouvernement, Bérangère Abba a considéré que cette nouvelle COP était « à la croisée des chemins ». Glasgow doit être « un moment fondateur, un moment exceptionnel, tant les enjeux et les défis auxquels nous faisons face appellent à une mobilisation générale. » Outre la finalisation des règles de mise en œuvre de l’Accord de Paris, la France plaidera pour des objectifs « ambitieux » : 1,5 degré, plutôt que deux.

Le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, Jean-François Longeot a rappelé qu’à ce stade, la somme des engagements permettrait de limiter la hausse globale des températures à 2,7 degrés, un niveau « dramatique », selon lui. La délégation de sénateurs qui se rendra à Glasgow défendra deux idées : l’universel et le multilatéralisme.

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