Contrôles, indicateurs de comparaison… Brigitte Bourguignon détaille au Sénat les mesures du gouvernement sur les Ehpad

Contrôles, indicateurs de comparaison… Brigitte Bourguignon détaille au Sénat les mesures du gouvernement sur les Ehpad

Auditionnée mardi 29 mars par la commission d’enquête du Sénat sur les Ehpad, la ministre déléguée à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon, a fait valoir les dispositifs que l’exécutif souhaite instaurer avant la fin du quinquennat. La publication d’« indicateurs clefs » pour chaque établissement devrait notamment permettre aux familles d’affiner leur choix.
Romain David

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Temps fort ce mardi après-midi des travaux de la commission d’enquête sénatoriale sur le contrôle des Ehpad : l’audition de la ministre déléguée à l’Autonomie, Brigitte Bourguignon. Dans la foulée des révélations du livre enquête du journaliste Victor Castanet, Les Fossoyeurs, sur la mise en place d’un système d’optimisation des coûts dans les Ehpad du groupe Orpea, au détriment du bien-être des résidents, les sénateurs cherchent à comprendre comment les comportements et les pratiques décrites par le journaliste ont pu échapper aux contrôles organisés par l’administration.

« Démonter un système n’est pas aussi simple que de faire un contrôle sur un signalement de maltraitance », a expliqué Brigitte Bourguignon, qui a tenu à faire valoir le tour de vis mis en place par l’Etat ces dernières semaines. À commencer par les rapports de l’Igas (Inspection générale des affaires sociales) et de l’IGF (inspection générale des finances) - qui ne seront que partiellement rendus publics, le PDG d’Orpea ayant invoqué le secret des affaires, précise la ministre -, mais dont les conclusions ont poussé le gouvernement à saisir le procureur de la République. « L’Etat demandera également le remboursement des financements publics irrégulièrement employés en enclenchant pour la première fois une procédure de demande de remboursement », ajoute Brigitte Bourguignon.

70 établissements épinglés en deux mois

Depuis la publication du livre de Victor Castanet, l’Etat a procédé, entre février et mars, au contrôle inopiné de plus de 230 Ehpad, en plus de ceux qui étaient déjà planifiés par l’administration. À l’issue de ces contrôles, « 70 injonctions ou sanctions ont été prononcées. Elles ont été jusqu’à la mise sous administration provisoire, voire la fermeture » de certains établissements, précise Brigitte Bourguignon. Le gouvernement entend désormais adopter une série de mesures pour systématiser ces contrôles et surtout contraindre les établissements à davantage de transparence sur leur mode de fonctionnement.

Renforcement des contrôles inopinés et des évaluations

Selon les chiffres de la ministre, l’administration procède chaque année au contrôle d’environ 10 % des quelques 7 400 Ehpad de France. Soit « 634 contrôles en 2014, 708 en 2015, 649 en 2016, 668 en 2018, 671 en 2019 », a détaillé Brigitte Bourguignon, qui n’a pas fourni de chiffres pour l’année 2017, ni pour les deux dernières années, durant lesquelles les personnels ont été largement mobilisés par la lutte contre l’épidémie de covid-19. « Tous les Ehpad seront soumis à un contrôle systématique dans les deux prochaines années, l’objectif est de poursuivre à ce rythme », annonce Brigitte Bourguignon. « Nous investissons dans les moyens humains des ARS avec 150 embauches supplémentaires pour que les agences soient, dans la durée, capables d’assumer cette tâche essentielle », précise-t-elle.

Un effort sera également porté sur les évaluations externes, introduites par la loi du 2 janvier 2002. « L’évaluation externe porte de manière privilégiée sur la pertinence, l’impact et la cohérence des actions déployées par les établissements et services, au regard d’une part, des missions imparties et d’autre part des besoins et attentes des populations accueillies », précise le site internet de la Haute Autorité de Santé (HAS). « Il était nécessaire de refondre le système d’évaluation externe des établissements pour le rendre totalement indépendant, et plus régulier avec une évaluation tous les 5 ans contre 7 aujourd’hui », explique Brigitte Bourguignon. Ces évaluations s’effectueront « sur la base d’un nouveau référentiel publié par la HAS le 10 mars, et qui laisse toute la place à la parole des personnes et des familles ».

Un système de notation à destination des résidents et des familles

« Nous devons rendre aux résidents et aux familles le pouvoir d’agir sur leur choix d’établissement », a encore soutenu Brigitte Bourguignon devant la Haute Assemblée, faisant valoir la volonté du gouvernement d’imposer aux Ehpad « une cure de transparence ». « Nous avons ainsi décidé de publier chaque année 10 indicateurs clefs qui permettent d’évaluer et de comparer les établissements pour éclairer les choix », annonce-t-elle. Ces indicateurs concerneront notamment « les taux d’encadrement, de rotation des personnels, d’absentéisme, le profil des chambres, le plateau technique de l’établissement ou encore le budget quotidien pour le repas par personne. »

Ces éléments viendront renforcer le comparateur de prix déjà disponible sur la plateforme de www.pour-les-personnes-agees.gouv.fr « Ils vont être rendus publics rapidement, on a aussi rendu obligatoires les enquêtes de satisfaction des résidents », ajoute celle qui fut présidente de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale avant d’entrer au gouvernement.

Retracer le parcours des fonds publics

Sur le plan financier, Brigitte Bourguignon souhaite « sacraliser la section soin, de manière qu’il ne puisse plus y avoir d’interactions » avec d’autres dépenses. Concernant les rétrocommissions évoquées par Victor Castanet dans son ouvrage, c’est-à-dire un système de ristournes mis en place entre Orpea et ses fournisseurs, qui aurait permis au groupe de dégager des bénéfices sur les fonds publics dont il bénéficiait, le gouvernement entend passer au crible la comptabilité des établissements. « On va demander aux Ehpad et aux groupes de transmettre leurs comptes sous forme de comptabilité analytique pour avoir une vision claire et sincère de l’affectation des recettes et des dépenses, établissement par établissement, tant sur le personnel que sur les consommables ».

« Toutes les modifications réglementaires possibles pour mettre en place ces mesures seront prises rapidement », promet encore la ministre, c’est-à-dire avant la fin du quinquennat. Les dix indicateurs à destination du grand public feront notamment l’objet d’un décret « pris avant le 1er mai ».

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