Deuxième budget d’urgence : compromis entre les deux chambres du Parlement

Deuxième budget d’urgence : compromis entre les deux chambres du Parlement

La commission mixte paritaire entre députés et sénateurs, réunie ce 23 avril, s’est révélée conclusive, ce qui accélère l’adoption définitive du nouveau projet de loi de finances rectificative. Le Sénat conserve plusieurs de ses apports, mais certains amendements emblématiques ont disparu.
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Cette fois encore, la gravité de la situation a permis aux deux assemblées de surmonter leurs divergences. Réunis en début d’après-midi ce 23 avril, les sept députés et les sept sénateurs des commissions des Finance sont parvenus en commission mixte paritaire (CMP) à un texte commun sur le projet de loi de finances de finances rectificatives, le deuxième du confinement. Il devrait logiquement être adopté définitivement par les deux assemblées ce soir. « Nous votons un plan de soutien enfin significatif, tout en renforçant son efficacité », s’est félicité Albéric de Montgolfier, le rapporteur général de la commission des Finances au Sénat. « La volonté de conclure et l’urgence a primé sur un certain de mesures qui nous semblaient importantes », témoigne aussi le sénateur LR Jérôme Bascher. Ces quelques concessions ne devraient être que temporaires et pourraient revenir très vite dans le débat. Un troisième budget rectifié semble se dessiner pour la mi-mai.

Même satisfaction du côté de la majorité de l’Assemblée nationale. « Les deux chambres ont su travailler en bonne intelligence pour renforcer massivement les mesures de soutien aux emplois, entreprises et aux ménages », a salué le rapporteur général de la commission des Finances, le député Laurent Saint-Martin (LREM).

L’exonération des heures supplémentaires plafonnée, le soutien aux dons alimentaires encouragé

Le Sénat a pu conserver certains de ses apports, mais certains amendements emblématiques ont été retirés. Introduite par la majorité de droite, l’exonération d’impôt et de cotisations sociales sur les heures supplémentaires effectuées entre le 16 mars et jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire, figure dans le texte de la CMP, mais le dispositif sera plafonné à 7500 euros. Une « solution intermédiaire », constate le président PS de la commission des Finances au Sénat.

L’abaissement du taux de TVA de 20 à 5,5% pour les tenues de protection des soignants (gants, surblouses) est conservé, et vient compléter la TVA à 5,5% sur les masques, introduite par les députés. Même chose pour le rehaussement à 1000 euros du plafond de déduction à l’impôt sur le revenu des dons aux associations caritatives comme les banques alimentaires : il est retenu. Trois groupes (LR, PS, RDSE) avaient voulu encourager le mécénat privé de solidarité relevant du « dispositif Coluche ».

Le Sénat a également été entendu lorsqu’il proposait un mécanisme pour les petites entreprises qui ont échoué à obtenir un prêt garanti par l’État : un mécanisme de prêts participatifs, adossés au Fonds de développement économique et social (FDES) est inscrit dans le texte. L’apport de 8 millions d’euros pour le financement de la dotation d’élu local, destinée aux très petites communes et qui s’était révélée sous-budgétée, a été également conservé en CMP.

Enfin, le Sénat a obtenu l'information préhalable des commissions des Finances avant toute prise de participation importante de l'Etat dans une entreprise.

Les taxes sur les assurances et le crédit d’impôt pour les commerces fermés sont retirés

Plusieurs mesures n’ont en revanche pas fait long feu en commission mixte paritaire. C’est le cas des deux taxes introduites sur les compagnies d’assurances, un des rares secteurs à bénéficier d’une conjoncture favorable, grâce à la baisse des sinistres. Lors des débats le 22 avril, le ministre Olivier Dussopt avait estimé que le produit de la taxe exceptionnelle de 10%, sur le montant de la réserve de capitalisation des acteurs de l’assurance, aurait pu s’élever à 1,9 milliard d’euros. L’amendement, introduit par les sénateurs centristes, n’a pas été retenu en CMP, car le gouvernement négocie avec le secteur. Les sénateurs gardent l’idée d’une épée de Damoclès. « Les assurances ont senti le vent du boulet », veut croire le sénateur LR Jérôme Bascher. « Le rapporteur général Albéric de Montgolfier (LR) a bien dit que si d’ici le 3e projet de loi de finances rectifié, il n’y avait pas de contribution substantielle, on reviendrait à la charge », a expliqué la sénatrice centriste Sylvie Vermeillet.

La transformation du report de charges en annulation de charges, sous forme de crédit d’impôt, pour les commerces et établissements, passe également à la trappe. L’amendement interdisant l’accès au Fonds de solidarité pour les entreprises basées dans un paradis fiscal a connu le même sort, malgré les déclarations de Bruno Le Maire ce matin même (lire notre article). Les rapporteurs généraux des deux chambres ont estimé que cet amendement aurait un effet marginal, voire inutile, car le Fonds s’adresse à des petites entreprises, qui n’ont pas de filiales dans les paradis fiscaux.

Selon Vincent Éblé (PS), il y a dans le texte de la commission mixte paritaire « quelques inflexions qui ne sont pas considérables ». Le président de la commission des Finances juge « préoccupant » l’absence de recettes dans le 2e PLFR. Déjà les regards sont tournés vers le troisième. « Dans quelques semaines, nous devrons y revenir : des moyens supplémentaires seront probablement encore nécessaires, notamment pour le dispositif de chômage partiel et le fonds de solidarité ; après le plan de sauvetage, il faudra agir pour la relance économique », a réagi le rapporteur général LR Albéric de Montgolfier. Dans son texte, le Sénat voulait notamment majorer de deux milliards d’euros le Fonds de solidarité.

Le PLFR, deuxième du nom, a été largement adopté par le Parlement ce jeudi soir. Le Sénat a conclu la navette, en l'adoptant par 332 voix pour, 15 voix contre (et 12 abstentions). Le premier avait été adopté le 20 mars de manière identique par les deux chambres.

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