Féminicide de Mérignac : Éric Dupond-Moretti reconnaît « un problème de coordination » entre la police et la justice

Féminicide de Mérignac : Éric Dupond-Moretti reconnaît « un problème de coordination » entre la police et la justice

Dans le cadre d’une audition sur la numérisation de la justice, le garde des Sceaux a été interrogé sur le féminicide survenu à Mérignac le mois dernier et qui a conduit à une mission d’inspection sur les conditions de remise en liberté et le suivi de l’auteur des faits.
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Auditionné par la commission des lois du Sénat, aux côtés d’Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la fonction publique, sur la numérisation de la justice, Éric Dupond-Moretti a été interrogé par la sénatrice LR, Marie Mercier sur le féminicide de Mérignac.

En mai dernier, un homme, déjà emprisonné pour violences conjugales en 2020, a tiré plusieurs coups de feu dans les jambes de son épouse avant de l’immoler par le feu alors qu’elle était encore en vie. Un meurtre abominable qui avait conduit la Chancellerie et le ministère de l’Intérieur à diligenter une mission d’inspection pour étudier les conditions de remise en liberté et le suivi de l’homme qui purgeait une peine de prison avec sursis.

« Cette affaire est tellement significative […] elle a montré plusieurs dysfonctionnements dans la transmission de l’information entre la police et la justice […] Est-ce que vous pensez que des outils informatiques plus performants auraient pu éviter ce drame ? », a demandé Marie Mercier, la sénatrice LR, rapporteure par le passé de la loi Schiappa, mais aussi de la loi Billon sur les crimes sexuels sur mineurs.

« Il y a un certain nombre de dysfonctionnements »

« Vous me posez une question singulière et infiniment délicate. Aurait-on pu éviter ? Je ne peux pas répondre à cette question dont il est vrai qu’on ne peut pas réécrire l’Histoire […] Il y a un certain nombre de dysfonctionnements. Nous avons demandé s’ils étaient ou non constitutifs d’une faute déontologique. Nous aurons la réponse à la fin du mois », a répondu, Éric Dupond-Moretti. « Pour autant, un certain nombre de dysfonctionnements ont été mis en lumière. Oui. Il y a des problèmes de coordination. Le ministère de l’Intérieur et le ministère de la justice conduisent des travaux visant précisément à améliorer la prise en charge des victimes, notamment pour les faits de violences conjugales » a-t-il ajouté indiquant que la plateforme de signalement pour les violences sexuelles et sexistes allait être élargie à d’autres infractions sous la dénomination Plateforme Nationale d’Aide aux Victimes (PNAV).

« Chaque fois qu’un crime est commis, c’est la faute du ministère de la justice »

Dans un long développement, Éric Dupond-Moretti a regretté « une vision fait-diversière de la justice. On en demande davantage au ministère de la justice qu’on pouvait le faire il y a 10 ou 15 ans. On lui demande non seulement de juger les crimes, mais aussi de les compter. Chaque fois qu’un crime est commis, c’est la faute du ministère de la justice. C’est une caricature qui a des buts politiciens, certains s’en sont emparés », a-t-il relevé.

Sur le fond de la question, le ministre est revenu sur les différentes mesures d’aide aux victimes que permet la loi, comme les téléphones grave danger ou encore le bracelet anti-rapprochement, qui n’avaient pas été déployés dans cette affaire. « J’ai donné un coup de patte la fois dernière en disant que ces bracelets anti-rapprochement ne pouvaient pas rester dans les tiroirs. On en a augmenté l’utilisation de 100 % » s’est-il félicité avant d’expliquer que les magistrats s’étaient davantage emparés du téléphone grave danger, car ce dispositif est plus ancien. « Le bracelet anti-rapprochement, parfois, il n’est pas posé parce que la victime ne souhaite pas qu’il soit posé. Il faut aussi le dire ça », a-t-il insisté.

En conclusion, Éric Dupond-Moretti est revenu sur la question initiale de la sénatrice. « Aurait-on pu l’éviter ? On essaye, bien sûr, de faire au mieux avec ces outils mais vous n’empêcherez jamais un fou furieux de s’affranchir d’une ordonnance d’éloignement et d’un bracelet, malheureusement ».

Lors de cette audition, le garde des Sceaux a rappelé « l’effort sans précédent » de son ministère pour la numérisation de la justice, avec une enveloppe de 232 millions d’euros pour 2021, pour la mise à niveaux des équipements, l’accès aux logiciels métiers, la communication électronique et la signature électronique des actes de procédure.

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