Fermeture des marchés : « C’est la mort annoncée du commerce de proximité ! »
L'annonce lundi soir par le Premier ministre Édouard Philippe de la fermeture des marchés de plein air pour lutter contre la propagation de l'épidémie Covid-19, - sauf dérogation locale, ne passe pas auprès de Joel Maurigney, le président de la CGAD (Confédération générale de l’alimentation en détail). Il craint pour l’activité des petits commerçants. Entretien.

Fermeture des marchés : « C’est la mort annoncée du commerce de proximité ! »

L'annonce lundi soir par le Premier ministre Édouard Philippe de la fermeture des marchés de plein air pour lutter contre la propagation de l'épidémie Covid-19, - sauf dérogation locale, ne passe pas auprès de Joel Maurigney, le président de la CGAD (Confédération générale de l’alimentation en détail). Il craint pour l’activité des petits commerçants. Entretien.
Public Sénat

Par Propos recueillis par Sandra Cerqueira

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Vous jugez «  inadmissible » la décision du gouvernement de fermer les marchés ouverts ou couverts. Pourquoi ?

Joel Maurigney : Parce que tout un pan de l’économie se retrouve à l’arrêt. C’est la mort annoncée du commerce de proximité.  20% des commerces ne sont pas sédentaires. Leur activité repose sur les marchés avec de la vente en camion 4 à 5 fois par semaine : des boulangers, charcutiers, poissonniers, fromagers, primeurs…Le commerce de bouche est directement impacté par cette décision avec une perte sèche de son chiffre d’affaires, du personnel qui va se retrouver au chômage. Certains ne s'en remettront pas. À cause d’une dizaine de marchés qui ne respectaient pas les consignes de sécurité en France, on décide d’une interdiction stricte. Imaginez combien de commerçants, d'artisans et de producteurs vont être en difficulté. Beaucoup n’auront droit à rien. 402 000 entreprises sont concernées avec plus d’un million d’actifs.

Vous parlez même de « mépris » du gouvernement à l’égard des petits commerces ?

Oui, c’est indéniable ! On se sent clairement oubliés face à la grande distribution. Le 15 mars dernier lors de la réunion à Bercy avec Bruno le Maire les représentants de Leclerc, Carrefour étaient présents autour de la table. Le représentant des petits commerces que je suis a lui été appelé  une heure avant le début de la réunion avec un suivi à distance en visioconférence, ce qui en dit long. Je déplore que le lobbying de la grande distribution ait encore fait son effet. Dans ces moments de crise nous avons besoin de sentir que tout le monde est soutenu et que l’on se sert les coudes et là clairement ce n’est pas le cas.

En cette période de confinement, la fermeture des marchés n’est pas sans conséquences dans les milieux ruraux ?

Effectivement pour beaucoup d’habitants dans les petits villages le marché est le seul endroit où faire ses courses et maintenant que nous ne pouvons plus nous déplacer à plus d’un kilomètre de 4*4*notre domicile, comment font ceux qui n’ont pas de voiture pour s’approvisionner ? Sans compter que le marché apporte plus que des produits : c’est un garant de lien social pour bon nombre de personnes isolées dans les zones rurales.

En conséquence vous demandez aux maires de demander des dérogations aux préfets, comme le propose le Premier ministre ?

Nous avons écrit aux maires pour leur expliquer que c’est possible de laisser des marchés ouverts en respectant les mesures de sécurité sanitaire ( un guide pratique a d’ailleurs été mis en place pour tous les acteurs concernés) Nous avions déjà mis en place su7r de nombreux marchés tout un système de marquage au sol pour obliger les gens à s'espacer, et des portiers pour filtrer la clientèle, organiser les files d'attente, pour qu'il n'y ait pas trop d'affluence en même temps. C’est donc possible ! Les personnes ne sont pas moins les unes sur les autres dans les rayons de certains supermarchés.

Nous demandons donc aux maires de demander des dérogations aux préfets pour que les marchés puissent ouvrir à nouveau. Ce sont eux qui doivent défendre leurs commerces de proximité qui font vivre des filières locales dans tout le pays. C’est leur rôle. Très peu de maires nous ont répondu pour l’instant. L’économie de proximité représente 72% de l’emploi total du commerce. J’espère que la situation va vote évoluer, et que les maires vont être réactifs, car les conséquences pourraient être irrémédiables.  

Partager cet article

Dans la même thématique

« La copie n’est pas acceptable aujourd’hui » : le Sénat s’apprête à modifier en profondeur le budget 2026 de la Sécurité sociale
7min

Politique

« La copie n’est pas acceptable aujourd’hui » : le Sénat s’apprête à modifier en profondeur le budget 2026 de la Sécurité sociale

À la veille du coup d’envoi des débats en séance publique sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, les rapporteurs de la majorité sénatoriale veulent se montrer intraitables sur le retour des principales mesures d’économies et la disparition des mesures les plus coûteuses, comme la suspension de la réforme des retraites.

Le

Fermeture des marchés : « C’est la mort annoncée du commerce de proximité ! »
2min

Politique

Education nationale : « Je suis malheureux de l’instabilité ministérielle », déclare Jean-Michel Blanquer

Invité de la matinale de Public Sénat, l’ancien ministre de l’Education nationale et auteur de « Civilisation française » (aux éditions Albin Michel) s’est exprimé sur la valse de ministres à l’Education nationale depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022. Selon lui, « il y aurait dû avoir un ou une ministre après moi, pendant 5 ans ».

Le

General policy speech by Prime Minister at Senate
10min

Politique

Budget : comment le Sénat va réduire l’effort demandé aux collectivités de 4,6 à 2 milliards d’euros

La majorité sénatoriale veut revenir sur l’effort demandé par le gouvernement aux collectivités. Le premier ministre a déjà fait des gestes devant les régions et les départements. « Un premier pas », reconnaît le sénateur LR Stéphane Sautarel, mais insuffisant. Pour compenser l’allègement de l’effort sur les collectivités, la majorité sénatoriale entend renforcer les économies sur d’autres ministères, notamment sur la « jeunesse, la recherche ou la culture ».

Le