Gilets jaunes : la réforme de la Constitution pourrait ne pas reprendre avant mars

Gilets jaunes : la réforme de la Constitution pourrait ne pas reprendre avant mars

Benjamin Griveaux a fortement laissé entendre que l’examen de la révision constitutionnelle serait reporté afin de prendre en compte les idées du grand débat annoncé par Emmanuel Macron, en réponse à la crise des gilets jaunes. L’incertitude demeure sur le nouveau calendrier.
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La réforme constitutionnelle, dommage collatéral de la crise des gilets jaunes. Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a annoncé ce mercredi 12 décembre que la réforme constitutionnelle et institutionnelle devra attendre les retours du grand débat, voulu par Emmanuel Macron, lors de sa réponse aux gilets jaunes.

« Le Président a exprimé le souhait que puisse s’ouvrir une réflexion sur le calendrier de la révision constitutionnelle afin que les travaux du Parlement puissent pleinement tenir compte des idées qui remonteront du grand débat national sur la question démocratique, de la citoyenneté, sur la question du vote blanc. Ces éléments-là feront partie du débat sur la révision constitutionnelle » a expliqué Benjamin Griveaux, lors du compte rendu du Conseil des ministres (voir la vidéo).

Interrogé pour savoir si l’examen ne reprendrait qu’en mars, le ministre répond : « Ça veut dire que l'examen ne peut pas ne pas tenir compte de ces remontées. Et les remontées se clôtureront début mars ».

L’équation compliquée du calendrier

Reste à voir quand pourrait reprendre l’examen de cette réforme fourre-tout, qui prévoit la baisse d’environ un tiers du nombre de parlementaires, le non-cumul des mandats dans le temps, une accélération du débat parlementaire et une dose (autour de 15%) de proportionnelle. C’est d’ailleurs l’une des revendications qui revient chez les gilets jaunes.

Le terme du grand débat étant prévu pour le 1er mars, on pourrait imaginer une reprise des travaux en mars ou avril. Mais il faudrait le temps d’analyser et sélectionner la masse des doléances, ce qui pourrait repousser l’inscription à l’ordre du jour. La réforme sera-t-elle au moins examinée au printemps ? Du côté du gouvernement, rien n’est précisé à ce stade.

« On ne sait pas ce qui va se passer dans les jours qui viennent, a fortiori l’année prochaine… »

Dans le calendrier parlementaire de l’Assemblée, le gouvernement aura l’ordre du jour sur deux semaines, à partir du 11 mars. Il l’aura à nouveau la semaine du 8 avril, avant une suspension des travaux (vacances) à partir du 15 avril, pour deux semaines. Le 13 mai, le gouvernement retrouve la main sur l’ordre du jour pour deux semaines. Mais le calendrier risque d’être bousculé, avec les élections européennes, prévues le 26 mai… Equation compliquée. Alors que le gouvernement doit rapidement trouver un moyen de faire adopter les dernières annonces du Président, un sénateur remarque qu’« on ne sait pas ce qui va se passer dans les jours qui viennent, a fortiori l’année prochaine… »

La réforme constitutionnelle, stoppée en juillet dernier pour cause d’affaire Benalla, devait reprendre son examen à l’Assemblée en janvier prochain. Mais au Sénat (à majorité LR-UDI), sans qui une réforme de la Constitution n’est pas possible, les doutes s’exprimaient depuis la crise des gilets jaunes. Le risque de paraître trop décalé et de « réfléchir à notre tambouille », selon les mots d’un sénateur, était soulevé. « Ce serait un peu lunaire » disait un autre, l’un des responsables de la majorité sénatoriale.

« Une mesure de sagesse »

Alors face à ce report, le président du groupe PS du Sénat, Patrick Kanner, salue la décision du gouvernement. « C’est bien, c’est une mesure de sagesse. Si le gouvernement entend les gilets jaunes et les parlementaires, peut-être sortirons-nous avec un texte meilleur. Il faut donner du temps au temps » lance le sénateur PS du Nord. « Si ça peut permettre l’arrivée de nouvelles mesures qui favorisent l’arrivée d’une démocratie renouvelée, avec la question de la participation des citoyens à l’élaboration de la loi, je suis favorable à ce report » ajoute Patrick Kanner. Il rappelle que son groupe avait déjà « consulté sur Internet » au sujet de la réforme constitutionnelle.

De son côté, le président du groupe centriste du Sénat, Hervé Marseille, « prend acte et attend de connaître les modalités ». « Ils ont décidé d’organiser une consultation. Le gouvernement est cohérent avec lui-même » note le sénateur UDI des Hauts-de-Seine. Sur la question du calendrier, Hervé Marseille rappelle que l’examen de la réforme, composée de trois textes, prend forcément du temps : « Si vous faites le projet de loi constitutionnel, la loi organique, la loi simple, il faut plus de deux mois pour voter, entre l’Assemblée et le Sénat »…

Kanner : « La prise en compte du vote blanc, c’est de la nitroglycérine »

La « prise en compte du vote blanc », proposée lundi dernier par Emmanuel Macron, ne fait déjà pas l’unanimité. « C’est sympathique, mais ça a des conséquences majeures. C’est de la nitroglycérine. Je ne suis pas certain qu’il ait vu les conséquences » met en garde Patrick Kanner. Explication : « Si le vote blanc est considéré comme un vote exprimé, dans l’absolue, si un Français sur deux vote blanc à la présidentielle, il n’y a pas de Président. Autre cas : si au second tour Macron/Le Pen, si le vote blanc avait été reconnu, beaucoup de gens, notamment à gauche, auraient voté blanc. Pareil lors des régionales entre Xavier Bertrand et Marine Le Pen ». Il y aurait alors des sièges laissés vides dans les assemblées.

Le grand débat comportera quatre grands thèmes. Outre la question des transports et de l’énergie, et celle des impôts, le débat portera sur « ce que signifie être citoyen aujourd’hui en France, comment faire évoluer la pratique de la démocratie, de la citoyenneté » a détaillé le porte-parole du gouvernement, ainsi que sur « l’organisation de l’Etat et de nos administrations » et la façon de répondre « aux besoins des Français ». De quoi donner pas mal d’idées pour la réforme constitutionnelle. Reste une autre option, que certains évoquent parfois mais qui n’est pas sur la table : enterrer la réforme.

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