Hôpital : le Sénat adopte une proposition de loi pour garantir un nombre minimum de soignants par patient

Hôpital : le Sénat adopte une proposition de loi pour garantir un nombre minimum de soignants par patient

Le Sénat a massivement voté en faveur d’un texte du groupe socialiste visant à inscrire dans la loi des ratios minimum de soignants par patient dans les établissements de soins. Pour le groupe socialiste, à l’initiative du texte, il s’agit d’assurer de « meilleures condition de travail » au personnel hospitalier d’améliorer la prise en charge des patients.
Guillaume Jacquot

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C’était l’une des recommandations de la commission d’enquête sénatoriale sur la situation de l’hôpital et le système de santé français. En janvier 2022, le rapport de Catherine Deroche (LR) préconisait un renforcement significatif des effectifs d’infirmiers et d’aides-soignants, afin d’améliorer les ratios de patients par soignants. Il suggérait en parallèle un mécanisme d’alerte lorsque ces ratios dépasseraient un seuil critique.

Les ARS averties en cas de dépassement des ratios

Une proposition de loi, portée par l’ancien président de la commission, Bernard Jomier (apparenté PS) et cosignée par ses collègues socialistes, a traduit cette ambition. Elle a été adoptée très largement ce 1er janvier par 257 voix contre 16, les seules oppositions provenant du groupe Union centriste, partagés sur l’efficacité de la proposition.

Le texte demande, pour chaque spécialité et activité à l’hôpital, un ratio minimal d’infirmiers et d’aides-soignants « par lit ouvert ou par nombre de passages pour les activités ambulatoires », dans l’objectif de « garantir la qualité des soins et des conditions d’exercice ». Ces ratios seront définis après l’avis de la Haute Autorité de santé, pour une période maximale de cinq ans. Lorsque les ratios définis ne peuvent pas êtres respectés pendant une durée de plus de trois jours, le chef d’établissement devra en informer le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS). A l’échelle des hôpitaux, l’organisation des soins, au regard des ratios, sera soumise à l’approbation des commissions médicales et chargées des soins infirmiers.

Le gouvernement s’oppose à une solution jugée « rigide »

Le gouvernement n’a pas souscrit à la solution proposée par les sénateurs. « Le but est légitime, mais adopter le texte serait contreproductif », a averti Agnès Firmin Le Bodo, ministre chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, plaidant plutôt pour d’ « agilité » au niveau des services. « Décréter des ratios ne réglerait rien. Leur rigidité aggraverait même les problèmes », s’est-elle inquiétée. Et de s’interroger sur les conséquences juridiques d’un ratio qui ne serait pas respecté. La ministre redoute également des conséquences collatérales comme des « rappels de personnes, des fermetures de lits » voire des fermetures de services.

Lors de l’examen en commission des affaires sociales, les sénateurs ont instauré une entrée progressive du dispositif. La Haute Autorité de santé aura deux ans pour préparer sa nouvelle mission. Le gouvernement aurait, quant à lui, jusqu’au 1er janvier 2027, pour établir les ratios réglementaires. Ces délais seraient de nature à « permettre au gouvernement d’engager les dynamiques de recrutements et de soutien budgétaire aux établissements qui doivent accompagner le dispositif », soulignait la rapporteure Laurence Rossignol (PS).

« Une perspective se dessine de meilleures conditions de travail »

Le vote du Sénat a été salué par différents représentants de soignants. « Une perspective se dessine de meilleures conditions de travail, une attente forte de la part des équipes de soins », a souligné Rémi Salomon, président de la Conférence nationale des présidents de commissions médicales. L’Ordre des infirmiers « se félicite de l’adoption », et le syndicat infirmier SNPI lance un « merci » à la Haute Assemblée pour son soutien à la « quasi-unanimité » à « l’une des principales revendications des soignants ». « Les normes internationales sont de 6 à 8 patients par infirmière en France nous en sommes au double, au mépris de la qualité des soins », a-t-il souligné.

Actuellement, seulement certaines unités sont soumises à des ratios réglementaires, c’est notamment le cas en réanimation, dans les soins intensifs de néonatalogie (prise en charge des jeunes bébés) ou encore la dialyse médicale. Cependant, ces ratios ne sont pas toujours respectés comme l’a montrée une enquête chambre régionale des comptes d’Île-de-France de 2018. Le rapport de la commission d’enquête du Sénat rappelait toutefois qu’une amélioration du ratio de patients par infirmier entraînait une chute de la mortalité.

Le groupe socialiste espère désormais un « examen rapide par l’Assemblée nationale » du texte.

 

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