Incendies en Gironde : le Sénat se préoccupe du vieillissement de la flotte de Canadairs

Incendies en Gironde : le Sénat se préoccupe du vieillissement de la flotte de Canadairs

Dans un rapport sur le budget 2022, la commission des finances du Sénat insistait sur le « nécessaire renforcement » des moyens aériens de la sécurité civile.
Guillaume Jacquot

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« Ouvrez les yeux, donnez-nous les moyens de travailler. Des efforts ont été faits mais la réponse n’est pas à la hauteur. Avec le réchauffement climatique, on ne va pas vers des étés plus sereins. » Ce dimanche, dans Sud-Ouest, Christophe Govillot, le porte-parole du Syndicat national du personnel navigant de l’aviation civile a lancé un cri d’alarme sur l’état de la flotte. Ces appareils sont stratégiques pour pouvoir venir à bout des incendies monstres qui ravagent la Gironde, dans des zones forestières difficiles voire impossibles d’accès par la route.

Outre la concentration de la flotte anti-incendie à Nîmes, ce qui a valu une salve de critiques de la part d’élus girondins, c’est aussi la question de l’âge des aéronefs qui se pose aujourd’hui avec acuité. « On a des avions sur le parking qui ne peuvent pas voler », a insisté le responsable syndical, lui-même pilote de Canadair. Sur la flotte composée de 22 avions, beaucoup sont cloués au sol. Sur les sept Dash (des avions rapides), deux sont dans l’impossibilité de voler, et un est en attente de livraison. Quant aux Canadairs, 9 sur les 12 sont opérationnels.

« Un sérieux motif de préoccupation »

C’est d’ailleurs sur l’état de ces 12 Canadairs CL415 qu’un chapitre du rapport budgétaire du Sénat en novembre dernier a fortement mis en garde. Leur vieillissement constitue « un sérieux motif de préoccupation », exposait alors le sénateur LR Jean-Pierre Vogel, rapporteur spécial de la commission des finances sur le programme sécurité civile du budget 2022. Selon sa publication, l’âge moyen des Canadairs atteignait quasiment 25 ans, un retrait des plus anciens était d’ailleurs envisagé à l’horizon 2025-2030. Autant dire demain, à l’échelle de l’aviation. Leur âge avancé a rendu les opérations de maintenance plus longues, réduisant ainsi leur disponibilité. Le sénateur avertissait d’ailleurs : « Le vieillissement de la flotte aérienne de la sécurité civile est d’autant plus préoccupant que les risques de feux de forêt devraient s’intensifier à l’avenir, dans un contexte marqué par le réchauffement climatique. »

Selon la Direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises, le coût de la modernisation des appareils existants a été jugé prohibitif, sans compter les indisponibilités longues que les réparations auraient nécessitées. Environ quatre à cinq millions d’euros par appareil. Le problème n’est pas seulement budgétaire et opérationnel, il est aussi industriel. Des pièces détachées manquent. Bombardier, qui avait racheté la société Canadair dans les années 1980, en a cessé la production en 2015.

Une solution européenne pour remédier au problème

Dès 2019, le sénateur Jean-Pierre Vogel a recommandé d’envisager le remplacement des Canadairs vieillissants, et dans cette optique, « d’accélérer les négociations européennes en cours pour le lancement d’un appel d’offres commun de nouveaux bombardiers d’eau amphibies ».

Dans Sud-Ouest, Christophe Govillot a rappelé que l’Europe avait acheté 12 appareils de type Canadair. La France en disposera de deux, mais pas avant 2025. Le sénateur Jean-Pierre Vogel insistait sur la nécessité pour l’Europe d’une commande coordonnée. « Le constructeur Viking attend de nouvelles commandes pour mettre en place les chaînes de fabrication », avertissait-il.

Interrogé ce matin sur France Inter, le ministre chargé des Relations avec le Parlement Franck Riester a de son côté affirmé que l’effort de modernisation a été fait « régulièrement ». Selon le rapport sénatorial, cette année devrait être marquée par la poursuite de l’exécution de la commande d’avions de type Dash, des avions plus rapides que le Canadair, pouvant transporter jusqu’à 10 000 litres d’eau mais pouvant aussi servir à du transport de secours. Un appareil Dash devrait être livré et s’ajouter à ceux fournis depuis 2019.

Les investissements vont même se poursuivre. « Dans les budgets à venir, il y a une ambition pour se doter encore et toujours de davantage d’avions bombardiers d’eau », a promis le ministre.

Dans une moindre mesure, le rapport sénatorial a également mis l’accent sur la flotte d’hélicoptères de la sécurité civile. Après plusieurs accidents et incidents, la flotte a été réduite à 33 appareils opérationnels. En réponse au questionnaire qui lui a été adressé, la Direction générale de la Sécurité civile estimait le besoin cible à 38 appareils. Visant le long terme, le sénateur chargé du rapport a même considéré que le besoin serait en réalité plus élevé, « eu égard à la sollicitation croissante de la flotte ». Les inquiétudes ne se limitent cependant pas au matériel. Christophe Govillot notait que la Sécurité civile ne comptait que 16 commandants de bord, « quand il en faudrait 22 ». L’incendie couve également à la Sécurité civile.

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