Incidents au Stade de France : commission d’enquête, audition, résolution… les sénateurs veulent des réponses

Incidents au Stade de France : commission d’enquête, audition, résolution… les sénateurs veulent des réponses

48 heures après les débordements de la finale de la ligue des champions au Stade de France, les sénateurs veulent des explications sur la gestion de l’évènement. En attendant une potentielle commission d’enquête, la ministre des Sports et le ministre de l’Intérieur seront auditionnés mercredi.
Simon Barbarit

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« Fiasco », « chaos », « honte »… Les qualificatifs ne manquent pas pour décrire les incidents qui ont émaillé la finale de la ligue des champions au Stade de France samedi soir qui opposait le Real Madrid et Liverpool.

Bousculades, tentatives d’intrusion d’individus sans billet, supporters sous le choc de l’intervention des forces de l’ordre ou victimes de vols… Les dysfonctionnements à l’entrée du stade ont repoussé le coup d’envoi de plus d’une demi-heure. Certains supporters munis d’un billet n’ont même pas pu assister au match.

« La communication du ministre est surréaliste. C’est inacceptable »

Gérald Darmanin et Amélie Oudéa-Castéra vont devoir s’expliquer devant le Sénat sur la gestion de l’évènement par les pouvoirs publics, mercredi à 17h00. « La communication du ministre est surréaliste. C’est inacceptable. La France est la risée du monde entier », s’alarme Michel Savin, président du groupe d’études « Pratiques sportives et grands événements sportifs », qui demande depuis dimanche la mise en place d’une commission d’enquête sur ce raté.

> > Lire notre article. Incidents au Stade de France : le sénateur Michel Savin demande une commission d’enquête

Un évènement sportif qui tourne au désastre à cause de débordements de supporters, ou plutôt selon le terme usité de « pseudo-supporters », l’histoire n’est pas nouvelle et elle interroge à chaque fois sur les responsabilités.

A la sortie d’une réunion de crise qui se tenait au ministère des Sports ce lundi matin, le gouvernement a ciblé les supporters anglais et « la fraude massive industrielle et organisée de faux billets ».

« 30.000 à 40.000 supporters anglais se sont retrouvés au Stade de France, soit sans billet soit avec des billets falsifiés », a fustigé Gérald Darmanin lors d’un point presse. « Les billets normalement sont électroniques. Et à la demande de Liverpool […] les 22 000 billets anglais ont tous été faits en papier », a-t-il ajouté.

> > Lire notre article. Stade de France : Gérald Darmanin et Amélie Oudéa-Castéra auditionnés au Sénat cette semaine

« Quand on est aux responsabilités, il faut prévoir toutes les hypothèses »

Ancien ministre des Sports, aux manettes lors de l’Euro 2016, Patrick Kanner ne veut « pas tirer sur l’ambulance » mais s’interroge. « Depuis 6 ans, un trafic de ce genre s’est peut-être mis en place. La fraude évolue dans le temps et dans l’espace. Mais ce serait une nouvelle forme de délinquance », à laquelle le patron des sénateurs socialistes n’avait pas vraiment eu à faire face lorsqu’il était au pouvoir. Il prend soin d’ajouter : « Quand on est aux responsabilités, il faut prévoir toutes les hypothèses ».

Quelques minutes avant ce point presse, Michel Savin était dubitatif sur la défense du ministre. « Je ne pense pas qu’il y ait eu 30 à 40 000 faux billets. On fait l’amalgame entre les supporters anglais qui était dans la Fan Zone et ceux qui se sont dirigés aux Stade de France », esquisse-t-il. Gérald Darmanin a rappelé que Jürgen Klopp, l’entraîneur de Liverpool « avait appelé à venir en France les supporters, même non munis de billet […] une partie infime mais extrêmement vivante à bousculer le système de sécurité ».

« Nous sommes passés à deux doigts d’une catastrophe »

Mais ce qui hérisse Michel Savin, c’est d’entendre que le « ministère de l’Intérieur justifié le choix du préfet de police de lever le préfiltrage « afin d’éviter l’écrasement des personnes sur les grilles ».

 « Le ministère de l’Intérieur a privilégié l’accueil des délinquants dans le stade. Nous sommes passés à deux doigts d’une catastrophe. N’importe qui aurait pu rentrer dans l’enceinte muni d’armes ou d’explosifs », s’alarme-t-il.

A un an de la Coupe du monde de rugby et à deux ans des JO, les incidents qui ont entaché la finale de la ligue des champions inquiètent les sénateurs. Patrick Kanner ne compte plus les réunions avec Bernard Cazeneuve pour l’organisation de l’Euro 2016 « sous la pression terrible de la menace terroriste et qui s’est déroulée sans incident majeur ». « Je rappelle que c’est notre gouvernement qui a monté les dossiers de l’organisation de la coupe du monde de rugby et des JO. La France était considérée comme un pays particulièrement ciblé par le terrorisme. Mais nous avions apporté les garanties suffisantes en matière de sécurité », insiste-t-il.

Dans un communiqué, le sénateur de la Vienne, Bruno Belin, compare les images de supporters tassés sur des grilles « au drame du Heysel » qui fit 39 morts en 1985 en Belgique lors de la finale de coupe d’Europe opposant la Juventus à Liverpool. Lui aussi demande la mise en place d’une commission d’enquête « pour dégager les responsabilités de ces incidents inadmissibles ».

« C’est un zéro pointé pour Gérald Darmanin »

« L’utilisation inappropriée de la force. Le filtrage des supporters inexistant. C’est un zéro pointé pour Gérald Darmanin. Un constat d’incompétence qu’on ne peut masquer en rejetant la faute sur les supporters anglais », tranche le sénateur socialiste Jérôme Durain. Membre du Beauvau de la sécurité, l’élu de Saône-et-Loire note que depuis quelques mois, le maintien de l’ordre lors d’évènements sportifs « consiste à interdire les supporters de déplacement. C’est une facilité qui nous prive d’un savoir-faire ». Quant à l’opportunité d’une commission d’enquête, Jérôme Durain préférerait qu’elle porte sur la question plus générale « du maintien de l’ordre ». « Le gouvernement doit prendre conscience qu’une foule n’est pas nécessairement dangereuse. Ce sont des débats que nous avons régulièrement comme au moment des manifestations de gilets jaunes », souligne-t-il.

Proposition de résolution sur le maintien de l’ordre

Le groupe communiste du Sénat pointe également la doctrine de maintien l’ordre de la préfecture de police de Paris. « 8 000 policiers et gendarmes étaient déployés ce soir-là il ne s’agit donc pas d’une question d’effectifs mais bien de doctrine d’emploi de ceux-ci », insistent les sénateurs dans un communiqué. Les sénateurs du groupe déposeront, dès la reprise de la session parlementaire « une proposition de résolution visant à pacifier le maintien de l’ordre en France et à tirer les leçons de l’escalade de la violence et l’usage disproportionné de la force publique par les autorités, dont les policiers et les gendarmes sont eux-mêmes victimes » peut-on lire.

 

 

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