Interdiction des listes communautaristes : « Une question de volonté politique » pour Bruno Retailleau

Interdiction des listes communautaristes : « Une question de volonté politique » pour Bruno Retailleau

Après avoir déposé sa proposition de loi visant à interdire les listes communautaristes aux élections, Bruno Retailleau était au ministère de l’Intérieur, ce matin. « On a partagé un constat : celui d’un islam politique en train de se radicaliser » indique-t-il.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Vendredi, le président du groupe LR du Sénat déposait sa proposition de loi « tendant à assurer le respect des valeurs de la République face aux menaces communautaristes ». Après la proposition de loi sur la neutralité religieuse adoptée en séance publique il y a deux semaines, une partie de la droite sénatoriale est bien décidée à continuer d’occuper le terrain de la laïcité, face à un exécutif qu’elle juge laxiste sur cette question.

« Est-ce qu’on ne fait rien comme d’habitude » ?

Afin d’accentuer un peu plus la pression sur le gouvernement, à quatre mois des élections municipales, Bruno Retailleau, accompagné du président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand, a rencontré ce matin Christophe Castaner, Laurent Nunez et Nicole Belloubet. « On a partagé un constat : celui d’un islam politique en train de se radicaliser et est en train de s’étendre. La question est de savoir : est-ce qu’on ne fait rien comme d’habitude (…) ou est-ce qu’on rappelle les principes constitutionnels et républicains qui s’imposent à tous ? » résume le sénateur de Vendée.

Son texte, composé de 4 articles, apporterait, selon lui, une riposte à « l’essor de l’islam radical » en interdisant les listes ou le financement des candidats qui tiendraient « des propos contraires à la souveraineté nationale, la démocratie, la laïcité. Dans le sens où le candidat aurait soutenu des revendications d’une section du peuple fondée sur l’origine ethnique ou religieuse ».

Bruno Retailleau fustige le « parti de l’impossibilisme »

Comme nous l’écrivions vendredi, une telle loi pourrait, néanmoins, se heurter à des difficultés d’ordre constitutionnelles et conventionnelles (Convention européenne des droits de l’Homme). « Il (Christophe Castaner) m’a dit qu’il regarderait la proposition de loi. Il m’a dit qu’elle pourrait poser quelques difficultés. Je lui ai dit que de toute façon, à chaque fois qu’on déposait un texte, on nous objectait le caractère anticonstitutionnel. C’était le cas pour la loi sur la Burqa (2004) (…) c’était le cas pour la loi El Khomri qui prévoyait dans un de ses articles qu’une entreprise pouvait, dans le cadre de son règlement intérieur, imposer le principe de la neutralité religieuse. Mais le Conseil Constitutionnel a validé » rappelle-t-il avant de pointer du doigt ceux qu’il qualifie du « parti de l’impossibilisme » « qui se cachent derrière des principes constitutionnels pour ne rien faire ». « Moi, ma proposition de loi s’appuie sur des principes républicains et constitutionnels » assure-t-il.

L’une des difficultés de sa proposition de loi, comme nous l’expliquait le constitutionnaliste, Benjamin Morel vendredi, réside dans la définition constitutionnelle de la laïcité. Un « terme polysémique dans la société, mais en droit, il englobe simplement la neutralité de l’État et le non-financement des cultes » soulignait-il.

« La laïcité, c’est aussi un devoir de chaque citoyen »

Bruno Retailleau l’a bien compris et n’écarte pas non plus la « voie constitutionnelle ». « J’avais proposé qu’à l’article 2 de la Constitution, on rappelle ce qu’est la laïcité. Parce que chaque Français connaît la laïcité du point de vue de la neutralité de l’État (…) Mais la laïcité, c’est aussi un devoir de chaque citoyen. Nul ne peut se prévaloir de sa croyance, de sa religion, pour échapper à la règle commune » insiste-t-il en référence à la charte de la laïcité à l’école.

Pour conclure, le président du groupe LR du Sénat estime qu’il ne s’agit pas « d’une question de modalité juridique. C’est une question de volonté politique. Oui ou non, Emmanuel Macron (…) veut-il combattre l’islam politique en France. C’est la seule question qui vaille ? ».

« Comment définir juridiquement une liste communautariste ? » s’interroge Philippe Dallier

Au groupe LR du Sénat, ce matin, certains restaient néanmoins dubitatifs sur l’aboutissement de cette proposition de loi. « Je n’y crois pas beaucoup. On va dire que c’est un projet de loi d’appel » confie un élu. « En tous les cas, c’est un vrai sujet, je pense que le ministre de l’Intérieur en est bien conscient (…) Je ne sous-estime pas les difficultés d’ordre constitutionnelles. Parce que, comment définir juridiquement une liste communautariste qui a la volonté de s’opposer aux valeurs de la République ? C’est un sujet compliqué » reconnaît Philippe Dallier, vice-président LR du Sénat. Fin octobre, Gérard Larcher avait estimé lui aussi que c’était aux tribunaux de trancher.

Dans la même thématique

France Israel Palestinians Campus Protests
6min

Politique

Sciences Po bloqué : la droite sénatoriale dénonce « la pensée totalitaire d’une minorité d’extrême gauche »

La mobilisation de plusieurs dizaines d’étudiants en soutien aux Palestiniens se poursuit à Sciences Po. Après avoir été délogés par les forces de l’ordre dans la nuit de mercredi à jeudi, les étudiants occupaient toujours les lieux ce vendredi. Une action en miroir de celles qui ont lieu sur les campus américains. La droite sénatoriale dénonce l’importation « du wokisme » d’outre Atlantique.

Le

Interdiction des listes communautaristes : « Une question de volonté politique » pour Bruno Retailleau
5min

Politique

Européennes 2024 : après le discours d’Emmanuel Macron, Olivier Faure veut saisir l’Arcom au nom de « l’équité » entre les candidats

Le Parti socialiste demande que le discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe, prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne, soit décompté des temps de parole et inscrit dans les comptes de campagne de la majorité présidentielle. Pour le patron du PS, invité de Public Sénat, le chef de l’Etat est devenu « candidat à cette élection européenne ».

Le