Italie : moins de parlementaires, pour plus de démocratie ?

Italie : moins de parlementaires, pour plus de démocratie ?

Si la France y réfléchit, l'Italie le fait. Le 8 octobre dernier, le parlement italien a voté une réduction du nombre de ses parlementaires. Ils devraient passer – si les Italiens le confirment par référendum — de 945 à 600 dans les prochaines semaines. Mais doit-on sacrifier une représentation équitable des territoires pour des raisons budgétaires ? Une représentation réduite est-elle gage d'une démocratie plus directe, plus efficace ? Flora Sauvage est allée à la rencontre des parlementaires italiens mais aussi de militants.
Public Sénat

Par Pauline Vilchez et Flora Sauvage

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

C’était le cheval de bataille du Mouvement 5 étoiles. Adopté à une écrasante majorité le 8 octobre dernier, le parlement italien va réduire drastiquement le nombre de ses parlementaires qui passeront de 945 à 600. Le jour du vote, devant les caméras, Luigi di Maio, dirigeant du Mouvement 5 Étoiles exulte : « C’est une immense victoire pour le peuple et pour les citoyens italiens ».

À Rome, la baisse du nombre de parlementaires fait quasi l’unanimité. Dans le bar S.Calisto, une institution du Trastevere, l’un des quartiers populaires de la capitale, rares sont les opposants à cette mesure.

Pour Ernesto, retraité, les parlementaires « nous coûtent trop cher et en plus ils ne décident pas assez rapidement, je pense que cette réduction est positive ».

Ernesto retraité italien

Mais pour certains, moins de parlementaires c’est aussi moins de territoires représentés au niveau national, comme l'explique Massimo, géomètre. « Je ne crois pas que cela soit une bonne chose car cela va nuire à la représentation démocratique et cela va nuire à la représentation des minorités au sein du parlement. C’est pour ça que je pense qu’il faut que le nombre de parlementaires reste stable ».

« Avec cette réduction, on a estimé 1 milliard d’euros d'économies sur 10 ans ».

Pour le Mouvement 5 étoiles en perte de vitesse, la diminution du nombre de députés et de sénateurs est une mesure qui pourrait lui permettre de renouer avec son électorat. Pour Vittoria Baldino, députée du Mouvement 5 étoiles, parti antisystème, réduire d’un tiers le nombre de parlementaires va générer des économies conséquentes pour le budget de l’État. « Avec cette réduction, on a estimé 1 milliard d’euros d'économies sur 10 ans entre les indemnités des députés et des sénateurs, mais aussi avec tous les coûts que le parlement n’a plus avec 345 parlementaires en moins. Cela rend aussi possible un rapport plus direct entre les citoyens et leurs représentants ».

Andrea Marcucci, sénateur du parti démocrate

À l’été 2019 après la chute de la coalition entre le mouvement 5 étoiles et la ligue de Matteo Salvini, le parti antisystème a fait de la baisse du nombre de parlementaires la condition non négociable de son alliance avec le parti démocrate. Initialement opposés à cette mesure, les sociaux-démocrates ont posé leurs conditions en échange de leur ralliement comme l'explique Andrea Marcucci, sénateur du parti démocrate : « Aujourd’hui on a adhéré à la proposition du mouvement 5 étoiles de réduire le nombre des parlementaires - proposition qui avait déjà été approuvée par la majorité parlementaire - mais à plusieurs conditions : nous voulons modifier la loi électorale, nous voulons également une révision du règlement du parlement et on demande une attention particulière pour donner plus d’équilibre aux différents pouvoirs »

Parlement Italie

Pourtant, dans le local du parti démocrate, les avis divergent. Au fond d'une ruelle de la capitale, les militants s’opposent farouchement à cette réforme qu’ils jugent populiste : « On compte actuellement 1 parlementaire pour 63 500 habitants sachant qu’en France c’est 1 parlementaire pour 70 000, mais avec cette réforme on va passer d’un extrême à l’autre en ayant une représentation très faible », déplore un militant.

« Avec cette réforme on va passer d’un extrême à l’autre en ayant une représentation très faible »

Mario, autre adhérant au parti démocrate, s'oppose à cette mesure : « ​Je dois dire honnêtement que pour la première fois de ma vie je voterai non à un référendum constitutionnel, une mesure pourtant adoptée par le parti auquel j’appartiens. C’est une décision que j’ai mûrement réfléchie. En réalité le coût de cette réduction du nombre de parlementaires est évalué à quelques dizaines de millions d’euros sur un budget total de l’État de centaines de milliards, cela ne va pas changer grand-chose pour les comptes publics »

Déjà en 2016 lors d'un référendum constitutionnel, Matteo Renzi avait tenté de réduire le nombre de sénateur. Mais les Italiens, à l'époque, s'y étaient opposés car ils craignaient une concentration des pouvoirs.

Les électeurs sont appelés aux urnes le 29 mars pour valider définitivement la baisse du nombre de parlementaires. En cas de victoire du oui au référendum, l’Italie deviendra le pays d’Europe avec le plus petit nombre de représentants élus proportionnellement à sa population.

Italie

Avec cette réduction du nombre de parlementaires, l’Italie espère aussi dégager plus facilement une majorité au Parlement.
Cette mesure censée répondre à l’appel des populistes devrait permettre à la chambre des députés et au sénat d’avoir plus d’autorité. Tout en apportant une meilleure stabilité à des institutions qui peinent à s’asseoir dans la durée.

Dans la même thématique

Brussels Special European Council – Emmanuel Macron Press Conference
3min

Politique

Élections européennes : avant son discours de la Sorbonne, l’Élysée se défend de toute entrée en campagne d’Emmanuel Macron

Ce jeudi 25 avril, le président de la République prononcera un discours sur l’Europe à la Sorbonne, sept ans après une première prise de parole. Une façon de relancer la liste de Valérie Hayer, qui décroche dans les sondages ? L’Élysée dément, affirmant que ce discours n’aura « rien à voir avec un meeting politique ».

Le

Italie : moins de parlementaires, pour plus de démocratie ?
8min

Politique

IA, simplification des formulaires, France Services : Gabriel Attal annonce sa feuille de route pour « débureaucratiser » les démarches administratives

En déplacement à Sceaux ce mardi dans une maison France Services, quelques minutes seulement après avoir présidé le 8e comité interministériel de la Transformation publique, le Premier ministre a annoncé le déploiement massif de l’intelligence artificielle dans les services publics, ainsi que la simplification des démarches. Objectif ? Que « l’Etat soit à la hauteur des attentes des Français ».

Le