La sanction visant Benalla « n’était pas clémente », pour le directeur de la police nationale

La sanction visant Benalla « n’était pas clémente », pour le directeur de la police nationale

Auditionné au Sénat ce mercredi matin, le numéro 1 de la police nationale, Éric Morvan, a estimé que la sanction disciplinaire prononcée contre Alexandre Benalla était adaptée. Il a également pris la défense du fonctionnaire de police qui l’encadrait le 1er mai.
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Lors de son audition devant les sénateurs de la commission des Lois, le directeur général de la police nationale, Éric Morvan, a livré ce mercredi 25 juillet sa lecture sur les dysfonctionnements dans la police pour la journée du 1er mai.

Il a notamment indiqué avoir pris connaissance tardivement que des personnes extérieures aux forces de l’ordre étaient intervenues brutalement place de la Contrescarpe à Paris, lors des manifestations. « Entre le 2 mai et la parution de l’article du journal Le Monde, je n’ai pas été mis au courant de ces circonstances très particulières », a affirmé « haut et fort » ce haut fonctionnaire en poste depuis août 2017. « Je n’étais pas dans la boucle, apparemment restreinte, de ceux qui savaient », a-t-il avoué. « L’IGPN pas davantage. »

Justement, sur les éléments en possession de cette Inspection générale de la police nationale, la « police des polices », Éric Morvan a indiqué qu’une vidéo postée le 3 mai sur leur plateforme Internet, montrant la scène en cause, n’était pas assez « pertinente » pour « déclencher des investigations » (lire notre article). « Aussi surprenant que cela puisse vous paraître, lorsque l’IGPN regarde ces images prises sous un angle particulier […] à ce moment-là, il n’y a aucune raison de penser qu’il y des protagonistes qui ne sont pas des policiers. »

« Je prends acte que les langues se délient »

Invité à réagir sur les révélations des syndicats de police la veille au Sénat, faisant état de relations exécrables entre certains policiers et Alexandre Benalla, le numéro 1 de la police nationale a répondu n’avoir « jamais été destinataire d’informations accréditant cette ambiance » (lire notre article). « Tous les secrétaire généraux [syndicaux] ont mon numéro de portable personnel. À aucun moment, ils ne m’ont alerté sur ce sujet, je prends acte que les langues se délient », a-t-il commenté.

Affaire Benalla : « Je n’ai jamais été destinataire d’informations accréditant cette ambiance exécrable avec les policiers » déclare Eric Morvan
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« Je n’ai jamais été destinataire d’informations accréditant cette ambiance exécrable avec les policiers » déclare Eric Morvan

Au total, Éric Morvan a affirmé avoir « croisé » Alexandre Benalla « une dizaine de fois », lors de déplacements du président de la République ou dans le cadre de cérémonies officielles. « Je ne l’ai pas vu faire le coup de poing, avoir une attitude qui m’ait choquée », a-t-il raconté aux sénateurs.

En sa qualité de haut fonctionnaire, Éric Morvan a également été amené à commenter les sanctions à l’égard d’Alexandre Benalla, un « jeune homme », selon lui, « qui a un peu perdu les pédales, qui a eu un peu la grosse tête » et qui « s’est senti poussé des ailes ».

Sanctions disciplinaires : « J’aurais pris la même décision »

« Contrairement à ce que j’ai entendu, ce n’est pas une sanction clémente », a-t-il souligné (voir la vidéo de tête), parlant de la « vraie vie administrative ». Rappelant qu’il a fait l’objet d’une double sanction (mise à pied et modification du périmètre de ses fonctions), Éric Morvan juge que la sanction prise par le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron « n’est pas légère ». « Elle est même plus sévère que celle qui aurait pu être infligée à un fonctionnaire. J’aurais pris la même décision ».

Qualifiant les faits de « graves », le directeur général de la police nationale a néanmoins estimé que le « préjudice ne l’était pas ». « Les personnes interpellées ne sont pas blessées », a-t-il indiqué.

Cette réponse a été accueillie avec surprise par la sénatrice Catherine Di Folco (LR), qui a évoqué son expérience dans les conseils de discipline. « Un fonctionnaire, s’il était passé en conseil de discipline devant ses pairs et devant les élus, pour une usurpation de fonction et pour des violences physiques, je pense que ça n’aurait pas été 15 jours de suspension, mais une révocation ! »

Le directeur général ne veut pas la tête du policier qui encadrait Alexandre Benalla

Le DG de la police nationale ne veut pas que la tête du policer qui encadrait Benalla tombe
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Le directeur général de la police nationale est enfin revenu sur l’encadrement de la présence des observateurs, lors des évènements de la Contrescarpe. Partageant le point de vue d’Alain Gibelin, directeur de l’ordre public et de la circulation à la préfecture de police de Paris, Éric Morvan aurait également déconseillé la présence d’observateurs, compte tenu des risques de violences qui étaient annoncés le 1er mai.

Au vu du contexte et de la forte sollicitation des forces en présence, le choix d’un major de police comme accompagnateur d’Alexandre Benalla était une erreur, selon lui. « Je ne suis pas sûre que ce soit le bon niveau d’accompagnateur », confesse-t-il aux sénateurs. Plutôt qu’un officier du corps d’encadrement, le numéro 1 de la police aurait préféré une personnalité plus haute dans la hiérarchie, comme un commissaire divisionnaire.

« Dans l’absolu, ce n’est pas bien, il n’aurait pas dû laisser faire », considère Éric Morvan, tout en appelant à faire preuve de clémence envers cet agent qui devait encadrer Alexandre Benalla. « Je ne suis pas de ceux qui réclameront que la tête de ce major roule dans la sciure ».

De manière plus générale, le directeur général a indiqué que l’accueil de personnes en observation dans les opérations de police n’était pas encadré par « un corps de règles spécifiques » « Des règles de bon sens sont appliquées », a-t-il rappelé, indiquant qu’aucune difficulté n’avait été recensée avant l’affaire Benalla.

Voir l'audition complète d'Eric Morvan :

Benalla : audition complète d'Eric Morvan directeur de la police nationale devant la commission d'enquête du Sénat
18:00

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