L’usage du 49.3 à l’Assemblée nationale pour faire adopter la réforme des retraites a été très mal accueilli auprès des groupes de gauche au Sénat, qui dénoncent à l’unisson un « passage en force ». Ils font part de leur inquiétude sur la « colère » qui risque de l’exprimer.
« Le gouvernement décide de créer une crise majeure dans le pays » : colère de la gauche sénatoriale après le 49.3
L’usage du 49.3 à l’Assemblée nationale pour faire adopter la réforme des retraites a été très mal accueilli auprès des groupes de gauche au Sénat, qui dénoncent à l’unisson un « passage en force ». Ils font part de leur inquiétude sur la « colère » qui risque de l’exprimer.
Par Guillaume Jacquot et François Vignal
Temps de lecture :
4 min
Publié le
Mis à jour le
Dans les rangs de l’opposition sénatoriale, déjà échaudée par le vote bloqué (article 44.3 de la Constitution), le 49.3 à l’Assemblée nationale a tous les attributs de la goutte de trop. Même s’il était attendu. « Il faut que le président de la République retire cette réforme, qu’il apaise ce pays, il est encore temps de reprendre son sang-froid. Personne ne veut de cette réforme, sauf lui. C’est bien un problème personnel. L’intérêt du pays ne peut pas se limiter à une forme d’ego du président de la République. Ce n’est pas possible », tonne Patrick Kanner, le président du groupe socialiste. Le sénateur du Nord, qui parle de « coup de force », considère que ce 49.3 n’est pas un 49.3 comme les autres. « Ce n’est pas contre le Parlement, c’est contre une immense majorité des Français. »
Consternation également pour son homologue du groupe communiste, Éliane Assassi. « C’est quand même assez incroyable que le gouvernement dégaine le 49.3. Cela démontre que le gouvernement est affaibli et n’a pas de majorité ni l’Assemblée nationale, ni dans la société. C’est un nouveau coup de force, on est au cœur d’une crise démocratique, le gouvernement décide sciemment de créer une crise majeure dans le pays. C’est très grave. »
Après plusieurs jours de débats à couteaux tirés avec la majorité sénatoriale, la sénatrice conserve également un mot pour les Républicains. « Le recours au 49.3 est un échec pour la droite parlementaire, du centre », considère-t-elle. À la reprise des travaux en hémicycle à 16 heures, elle a pris la parole pour un rappel au règlement, déclarant : « Macron et son gouvernement devront répondre devant le peuple de ce coup de force. »
« Bruno Retailleau au Sénat s’est transformé en VRP du Président »
Les longues négociations entre Les Républicains et les marcheurs, des jours précédant la présentation de la réforme en Conseil des ministres jusqu’à la nuit précédant la commission mixte paritaire, restent en mémoire dans le groupe écologiste. « Emmanuel Macron a cru qu’avec les LR, c’était gagné, en lien avec Bruno Retailleau au Sénat, qui s’est transformé en VRP du Président. On voit où ça mène… Ça mène nulle part », raille Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste.
D’un groupe à l’autre, les mêmes inquiétudes pour l’avenir. « Je crains les suites qui vont être données à cette annonce du 49.3 », confie Éliane Assassi. Des propos que partage Guillaume Gontard. « Emmanuel Macron utilise l’arme du faible, le 49.3. On va avoir l’adoption de cette réforme. Mais je suis particulièrement inquiet, vu les conditions des débats depuis le début, des débats tronqués à l’Assemblée et au Sénat, par le 47.1. Maintenant qu’ils n’ont pas de majorité, on passe en force par 49.3. Là, j’ai très peur de la réaction des Français, de la colère qui s’exprime. Car on leur dit, « on ne vous entend pas, on ira coûte que coûte ». J’ai très peur de la violence qui peut s’exprimer », met en garde le sénateur de l’Isère. Et d’ajouter : « On met le pays sens dessus dessous et le Président a une responsabilité sans précédent. »
Le Sénat a adopté en deuxième lecture l’article de proposition de loi de programmation énergétique entérinant la relance du nucléaire. L’objectif de construction de six puis huit EPR2 est ainsi inscrit dans la version adoptée par le Sénat, tout comme la composition « majoritairement » nucléaire du mix électrique français à horizon 2050.
La mort brutale d’Olivier Marleix, ancien président du groupe Les Républicains à l’Assemblée nationale, a plongé le monde politique sous le choc. Ce mardi 8 juillet, de nombreux hommages lui ont été rendus au Parlement. Au Sénat, la réunion de groupe des Républicains s’est ouverte dans une atmosphère de recueillement.
Les groupes du socle commun du Sénat contribuent à la réflexion, en mettant sur la table quelques « pistes » d’économies pour un total de 25 milliards d’euros, dont une année blanche, même si le principe fait débat. Pour le centriste Hervé Marseille, il faut « toucher les grandes fortunes, car il faut des signaux », notamment envers le PS, qui veut plus de « justice fiscale ».
Pas de jaloux. Après la tribune de Bruno Retailleau, qui appelle à arrêter les subventions à l’éolien, la majorité sénatoriale LR et centriste va défendre un amendement visant à évaluer « l’impact financier de toutes les formes de production d’énergie », explique le corapporteur centriste Patrick Chauvet, qui ne veut pas « stigmatiser » les énergies renouvelables. L’objectif global de la PPL Gremillet reste cependant bien la relance du nucléaire.