«Le gouvernement détruit l’indépendance financière de la Sécu», dénoncent les sénateurs PS
Le groupe socialiste du Sénat sera en « totale opposition » sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Il regrette notamment que l’État ne compense pas le manque à gagner résultant des mesures d’urgence votée à la fin 2018. La réponse à la crise de l’hôpital est jugée insuffisante.

«Le gouvernement détruit l’indépendance financière de la Sécu», dénoncent les sénateurs PS

Le groupe socialiste du Sénat sera en « totale opposition » sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Il regrette notamment que l’État ne compense pas le manque à gagner résultant des mesures d’urgence votée à la fin 2018. La réponse à la crise de l’hôpital est jugée insuffisante.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Les débats, à partir du 12 novembre, sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020 s’annoncent tendus. Le contexte budgétaire s’est particulièrement assombri en un an. Alors que la « Sécu » s’était rapprochée de l’équilibre, son budget replonge, avec un déficit de 5,4 milliards d’euros, dû pour moitié à la conjoncture économique, pour l’autre à cause des mesures adoptées en urgence en décembre 2018, en pleine crise des gilets jaunes, principalement des exonérations de cotisations sociales.

L’État a choisi de ne pas compenser ces manques à gagner : la décision du gouvernement risque de dresser une grande partie des sénateurs contre elle. La commission des Affaires sociales, où la droite et le centre sont majoritaires, s’est prononcée ce mercredi pour annuler cette non-compensation. « Ce n’est pas à la Sécurité sociale de payer les mesures Gilets jaunes », a fait savoir le président (LR) Alain Milon. Les socialistes, eux aussi, sont remontés. « Le gouvernement détruit l’indépendance financière de la Sécu », s’indigne le sénateur Yves Daudigny, chef de file de son groupe sur ce texte. « C’est un déficit artificiel, politique, qui pourra servir d’argument pour attaquer d’autres dispositions de notre modèle de protection sociale ».

Ce phénomène n’est certes pas nouveau, mais il s’intensifie au cours du temps. La disparition progressive de cotisations sociales « porte un coup très fort » à la philosophie de la Sécurité sociale, et remet « en cause ses fondements », selon Yves Daudigny.

Déception sur les moyens supplémentaires fléchés vers l’hôpital

La déception du groupe socialiste est probablement encore plus grande sur le front de l’hôpital, au bord de l’explosion. Les personnels soignants prévoient d’ailleurs de manifester le 14 novembre, en plein examen du texte. « Il ne répond en aucune façon à ce qui est l’urgence du moment », estime le sénateur PS de l’Aisne. Ce PLFSS prévoit une progression maximale de 2,1% des dépenses maladie (Ondam). « Totalement insuffisant » selon lui.

Le groupe socialiste du Sénat entend déposer un amendement pour obliger le gouvernement à présenter au cours du premier trimestre 2020 une loi d’orientation et de programmation pour l’hôpital sur la période 2020-2025. Une solution est aussi mise en avant pour dégager 5 milliards d’euros en deux ans : repousser d’autant la durée de remboursement de la Cades, la Caisse d'amortissement de la dette sociale.

« À quoi cela sert-il que nous siégions dès mardi ? »

Les sénateurs socialistes s’interrogent en parallèle sur le calendrier du gouvernement dans cette séquence budgétaire. La ministre Agnès Buzyn doit présenter au cours du mois un plan pour l’hôpital. Potentiellement, le PLFSS pourrait être caduc. « À quoi cela sert-il que nous siégions dès mardi ? On peut mettre en cause la sincérité du projet de loi car il pourra être complété par d’autres dispositions », s’agace Yves Daudigny. Une large partie du Sénat semble refuser de « naviguer à vue ». La commission a supprimé l’article qui fixe l’Ondam à 2,1% pour 2020, qui n’aurait « aucun sens », dans ces conditions, selon elle.

Autre pomme de discorde : la désindexation des pensions de retraite supérieures à 2000 euros par mois, et des prestations sociales et familiales. La revalorisation sera de 0,3 %, un niveau bien inférieur à l’inflation attendue à 1,2% l’an prochain. Si le PLFSS prévoit des mesures pour les familles monoparentales, la conséquence est une perte sèche de pouvoir d’achat pour les autres. Comme l’an dernier (seules les petites retraites avaient été préservées de la désindexation à l’issue de la séquence budgétaire en 2018), la majorité de droite et du centre du Sénat s’opposera à cette sous-revalorisation.

Partager cet article

Dans la même thématique

General policy speech by Prime Minister at Senate
10min

Politique

Budget : comment le Sénat va réduire l’effort demandé aux collectivités de 4,6 à 2 milliards d’euros

La majorité sénatoriale veut revenir sur l’effort demandé par le gouvernement aux collectivités. Le premier ministre a déjà fait des gestes devant les régions et les départements. « Un premier pas », reconnaît le sénateur LR Stéphane Sautarel, mais insuffisant. Pour compenser l’allègement de l’effort sur les collectivités, la majorité sénatoriale entend renforcer les économies sur d’autres ministères, notamment sur la « jeunesse, la recherche ou la culture ».

Le

7min

Politique

Insécurité dans les territoires d’Outre-mer : « Nous, les maires, nous sommes en première ligne pour lutter, mais on n’a pas de moyens pour le faire »

A la veille de l’ouverture du 107e congrès des maires à Paris, des élus des Outre-mer se sont retrouvés à Issy-les-Moulineaux ce lundi 17 novembre. Alors qu’ils font face à une criminalité et une délinquance grandissantes, dans des territoires en proie au narcotrafic, les maires, aux côtés de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, ont plaidé pour un « choc régalien ».

Le

Paris : session of questions to the government at the French National Assembly
6min

Politique

Budget 2026 : quels scénarios dans un calendrier de plus en plus contraint ?

Avec encore plus de 1 500 amendements restant à examiner en une semaine à l’Assemblée sur la partie recettes du projet de loi de finances, le calendrier budgétaire est de plus en plus contraint. Dans une assemblée divisée et avec le renoncement du gouvernement de recourir au 49.3, la possibilité d’une adoption des deux lois de finances avant le 31 décembre 2025 relève presque de la politique-fiction.

Le

Paris: Salon europeen de l Education
4min

Politique

Budget 2026 : Un rapport du Sénat dénonce « un coup dur porté à la jeunesse », avec une réduction de l’enveloppe dédiée au service civique

Comme en 2025, la mission sport, jeunesse et vie associative subie une sérieuse coupe dans le budget. Le service civique voit son enveloppe budgétaire réduite de 20 %, soit 114,4 millions d’euros par rapport à l’année dernière. « Se priver d’un dispositif qui fonctionne au moment où on a besoin de faire du lien social, c’est incompréhensible », regrette le rapporteur des crédits, Éric Jeansannetas (PS).

Le