Le Sénat rejette l’idée d’une taxe sur les superprofits
Le Sénat, porté par la majorité de droite, a rejeté tous les amendements visant à instaurer une taxe sur les superprofits, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificatif.
Par Clara Robert-Motta
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L’entrée de jeu pour ce projet de loi de finances rectificatif aura été sportive. Il aura fallu une heure et demie aux sénateurs et sénatrices pour renoncer définitivement à l’idée d’une taxe sur les superprofits. Avec plus de trente prises de parole dans l’hémicycle pour s’exprimer sur les sept amendements proposés par les communistes, socialistes, écologistes et les centristes, le débat s’est scindé sur une question profondément idéologique.
Les sept amendements proposaient d’instituer un nouvel article avant ceux inscrits dans la version du PLFR transmise au Sénat. Plus ou moins ambitieux sur le taux de taxation, plus ou moins restrictifs sur l’étendue du dispositif, ces amendements voulaient tous taxer les « superprofits » notamment sur les « sociétés pétrolières et gazières, de transport maritime ou encore des concessionnaires d’autoroute ». Une idée proposée dans un contexte de crise énergétique liée à la guerre en Ukraine.
Une différence de vision profonde
Pour Rémi Féraud, sénateur socialiste de Paris, ce débat est l’un des plus importants du PLFR. « Quand on voit les chiffres de l’impôt sur les sociétés qui a effectivement augmenté, et de l’autre côté, quand on apprend que les grandes multinationales paient très peu d’impôts sur les sociétés, il y a une iniquité fiscale entre ceux qui peuvent faire une évasion fiscale et ceux qui ne le font pas mais qui rapportent quand même des ressources fiscales. Cette taxe sur les superprofits rétablirait une équité fiscale. »
On retrouve cette question de la justice fiscale et sociale dans la bouche de tous les sénateurs en faveur de ces amendements. Le socialiste Yan Chantrel, lui, fait le parallèle avec ses amendements rejetés sur la loi d’urgence en soutien au pouvoir d’achat votée vendredi au Sénat. « Vous avez refusé d’augmenter le revenu des plus défavorisé, et avec des pudeurs de gazelle vous refusez de taxer ceux qui profitent de la crise. » Pour le sénateur des Français établis hors de France, le message envoyé ici est « le terreau des révoltes sociales de demain. »
Un argument balayé par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. « La seule révolte sociale qu’on a eue ces dernières années, la seule fois ou les Français sont descendus dans la rue, c’est parce qu’on a créé une taxe supplémentaire, » assure le ministre en référence à la crise des Gilets Jaunes. Malgré les objections dans l’hémicycle, Bruno Le Maire a assuré qu’en France « toutes les révoltes, toutes les révolutions viennent de la surtaxation des ménages ».
Loin d’être convaincus, les sénateurs de gauche ont fait appel à l’Histoire. David Assouline a fait référence au lendemain de la seconde guerre mondiale et aux « profiteurs de guerre », quand Pierre Laurent, sénateur communiste, n’a pas hésité à convoquer les mesures prises par Nicolas Sarkozy après la crise économique de 2008.
La droite défend une « compétitivité »
Pour la droite sénatoriale et le gouvernement, la taxation des entreprises n’est pas la solution et ils rappellent que la France est le pays où l’on taxe le plus. Vincent Segouin, sénateur Les Républicains de l’Orne, assure même peiner à comprendre comment les entreprises restent en France. « Les multinationales regardent ces taux d’imposition qui sont liés à une compétitivité. On va perdre toutes les entreprises qui restent et augmenter le chômage. »
Bruno Retailleau, le patron des Républicains au Sénat, s’interroge sur la taxation des profits en temps de crise et en appelle à l’absurde pour faire comprendre son point de vue. « Quand il va y avoir une canicule, on va taxer ceux qui vendent des glaces ? » Un parallèle dénoncé par ses collègues siégeant à gauche dans l’hémicycle. « Vous savez bien que ça n’arrivera pas, lui répond Jean-Pierre Sueur, sénateur socialiste. Taxer ces entreprises qui ont fait des énormes profits, est-ce si scandaleux ? Nous, nous pensons que c’est juste. »
Malgré ces nombreuses prises de paroles, la gauche sénatoriale n’aura pas eu plus de succès que les députés.Ces amendements ont tous été rejetés après avoir reçu des avis négatifs à la fois de la commission et du gouvernement. Y compris celui des centristes, ainsi que l’amendement de repli du groupe socialiste qui « témoignait de [leur] volonté d’engager un dialogue pour aboutir à un consensus. Qu’à ne cela tienne, les sénateurs de gauche ont déjà annoncé leur ambition de reproposer cette mesure dans le cadre d’un autre projet de loi en octobre.
« La position du PS, c’est de dire que nous sommes favorables au principe de la proportionnelle, mais nous voulons savoir quelle sera la sauce à laquelle les électeurs seront associés », affirme Patrick Kanner, patron du groupe PS du Sénat.
Le président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard, reproche la mollesse de la réponse « des plus hautes autorités de l’Etat », après l’assassinat d’Aboubakar Cissé, fidèle musulman, tout en saluant les « mots justes » employés par François Bayrou. « Le drame du Gard est épouvantable » a rappelé le premier ministre.
En répondant à une question d’actualité au Sénat sur le meurtre d’Aboubakar Cissé, le ministre auprès du ministre de l’Intérieur a affirmé qu’après s’être rendu aux autorités italiennes le principal suspect avait accepté de revenir en France. Il devrait arriver pour la mi-mai.
La présidente du groupe RN de l’Assemblée nationale, Marine le Pen et le président du parti, Jordan Bardella ont entamé le cycle de consultations à Matignon sur le scrutin proportionnel aux législatives. A la sortie, Marine le Pen a indiqué que le Premier ministre penchait pour un retour du mode de scrutin de 1986, « c’est-à-dire la proportionnelle intégrale par département ».
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Dans les Alpes-Maritimes avec Dominique Estrosi Sassone
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