Le Sénat supprime la taxation des chèques-vacances et chèques-cadeaux

Le Sénat supprime la taxation des chèques-vacances et chèques-cadeaux

Le texte de l’Assemblée nationale prévoyait de soumettre à des cotisations sociales les cadeaux et bons d’achats distribués par les comités d’entreprises ou les employeurs. Le Sénat est revenu sur cette disposition, avec le soutien du ministre Gérald Darmanin. Mais le cœur du débat n’est pas réglé.
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Le gouvernement peut dire merci à la navette parlementaire. Avec la bénédiction de Gérald Darmanin, les sénateurs ont décidé, dans une totale unanimité des groupes politiques (des groupes de gauche aux Républicains en passant les centristes et par La République en marche), de retirer l’un article polémique du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) : l’article 7 bis.

Ce nouvel article, introduit dans le projet de loi au moment de la lecture à l’Assemblée nationale en octobre, suscitait la controverse. Selon l’amendement déposé par le député (UDI) Paul Christophe, les avantages attribués par les comités d’entreprise (ou par l’employeur directement), comme les chèques-cadeaux, les chèques-vacances, l’aide aux vacances ou activités culturelles, auraient été soumis à des cotisations sociales, alors qu’ils en sont exonérés actuellement. Pourtant, certains plafonds existent déjà mais une certaine tolérance semble être appliquée.

Le texte transmis par l’Assemblée prévoyait de soumettre à des cotisations les « aides sociales et culturelles » (ASC) qui auraient dépassé un certain montant accordé chaque année pour un salarié : 331 euros dans le cas des aides aux vacances par exemple (un seuil plus important était prévu pour les parents). La mesure a rapidement provoqué une bronca chez les organisations syndicales ou encore chez les professionnels du tourisme, pour ne citer qu’eux.

« Une ténébreuse affaire », concède Gérald Darmanin

L’idée était d’apporter de la lisibilité aux employeurs sur des gratifications qui n’ont pas d’existence légale. « C’est vrai que cet amendement était inabouti, mais il était pertinent à l’origine », a défendu le président du groupe centriste, le sénateur (UDI), Hervé Marseille. « C’était peut-être maladroit de le faire comme ça a été fait, mais ce n’était pas pour embêter les comités d’entreprises ou ceux qui en bénéficient. C’était pour donner une base juridique », a-t-il justifié. « C’était parfois considéré par les Urssaf comme du salaire déguisé. »

« C’est une ténébreuse affaire qu’il convient de ne pas caricaturer », a expliqué en séance le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin. Pour lui, l’article avait au moins un mérite : celui de donner une existence légale à ces aides et chèques. « L’insécurité décourage les chefs d’entreprise. Elle n’est bonne pour personne cette insécurité », a-t-il déclaré. « Si les choses ne sont pas prêtes – et je sens qu’elles ne sont pas prêtes, je donnerai un avis favorable à la suppression de cet article. »

Craintes sur le pouvoir d’achat des salariés et sur l’emploi

À gauche, les sénateurs socialistes s’étaient notamment inquiétés des risques sur le pouvoir d’achat des salariés les plus modestes, pour qui les aides aux vacances représentent souvent l’essentiel des ressources pour pouvoir partir. Le groupe communiste a dénoncé « une atteinte grave sur le droit aux vacances ».

Par effet ricochet, les sénateurs ont également insisté sur les risques pesant sur le secteur touristique. Pour Nathalie Delattre, sénateur RDSE de la Gironde, l’introduction de cotisations sur ces aides aurait abouti à la « disparition de nombreux emplois ».

Mais la suppression de l’article, réclamée par la commission des Affaires sociales mais aussi par tous les groupes du Sénat, ne signifie pas pour autant que la question est réglée. Loin de là.

« Le débat du législateur n’est pas de pouvoir mettre de la fiscalité »

Gérald Darmanin a proposé aux parlementaires d’intégrer « rapidement » un groupe de travail, en lien avec les professionnels du secteur, les syndicats, le gouvernement et l’administration pour « régler cette histoire ». « Si on peut le faire pour la deuxième lecture [en décembre, NDLR], on le fera. Sinon, ce sera l’année prochaine. » De l’avis d’Alain Milon, le président (LR) de la commission des Affaires sociales du Sénat, il serait plus « raisonnable » de tabler sur des discussions en 2019.

« En attendant », le ministre promet qu’il donnera des « consignes assez claires » aux Urssaf chargées d’inspecter les entreprises. Pour qu’elles « puissent comprendre que, s’il y a contrôle, le débat du législateur n’est pas de pouvoir mettre de la fiscalité sociale sur ces prestations. »

Ce point du PLFSS a en tout cas été l’occasion pour plusieurs sénateurs de pester contre la méthode du gouvernement. La commission des Affaires sociales, elle-même, a considéré que la question n’avait « fait l’objet d’une concertation suffisante » entre les différents acteurs.

« Peut-être aurait-il fallu être clair dès le départ », a également déploré le sénateur socialiste Xavier Iacovelli, qui réclamait les résultats d’une étude d’impact. Le débat méritait, pour lui, « mieux que de la précipitation ». À l’unisson, le sénateur (LR) Gérard Longuet a lui aussi considéré que « cette affaire » méritait « une réflexion plus approfondie ».

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