Législatives : Macron demande à ses candidats d’« aller décrocher une majorité parlementaire » et dénonce le « communautarisme » de la gauche

Législatives : Macron demande à ses candidats d’« aller décrocher une majorité parlementaire » et dénonce le « communautarisme » de la gauche

Emmanuel Macron est venu en « capitaine d’équipe » pour mobiliser les candidats de la majorité présidentielle pour la « bataille politique » des législatives. « Rien n’est acquis », prévient le Président, qui demande aux candidats de ne « pas se disperser » et de viser « le cœur » de l’électorat macroniste dans ce « combat de mobilisation », pour faire la différence.
François Vignal

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« Je suis venu voir les copains ». Olivier Véran, ministre de la Santé, est redevenu presque un simple candidat, ce mardi. Celui qui est à nouveau en lice pour les législatives en Isère, a retrouvé tous les candidats de la majorité investis pour le scrutin des 12 et 19 juin prochains. Pas encore la rentrée des classes, mais plutôt une ambiance studieuse pour ce séminaire de formation, aux Docks de Paris, à Aubervilliers, à destination surtout des petits nouveaux. Après un discours d’introduction du président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, et un point sur l’opinion avec l’Ifop, les candidats ont eu droit à des ateliers programme, stratégie de communication avec le patron des députés Christophe Castaner, ou – points importants pour une campagne – conformité aux règles électorales, budget prévisionnel… On a déjà vu certains se faire invalider leur campagne pour de petites erreurs qui coûtent cher.

Emmanuel Macron demande d’« oublier les querelles passées »

Mais cette nouvelle promo n’a plus grand-chose à voir avec celle de 2017. Les candidats issus de la société civile étaient alors nombreux. Revers de la médaille, certains ont ensuite eu du mal à trouver leur place à l’Assemblée. « Soyez fiers d’être des amateurs », leur avait dit Emmanuel Macron. Comprendre, autre chose que des professionnels de la politique.

Contrairement à il y a 5 ans, où il n’avait pas fait le déplacement pour la même réunion, le Président réélu est venu cette fois en personne terminer cette journée de coaching pour lancer la campagne des législatives. « Nous voilà tous et toutes ensemble, avec vos différences », a lancé Emmanuel Macron aux candidats dont il a lui-même validé la liste. « Ensemble », c’est le nom de la nouvelle confédération qui rassemble Renaissance (nouveau nom de LREM), le Modem et Horizons, le parti d’Edouard Philippe, avec qui les discussions ont pu par moment se tendre. Mais s’il y a eu « parfois des différences », le chef de l’Etat demande à ses candidats de se battre « côte à côte » et « d’oublier parfois les querelles passées ». « Ce visage du dépassement », avec « plusieurs élus qui venaient de formations politiques différentes », c’est la volonté depuis 5 ans du chef de l’Etat. Il ajoute :

Pour moi, c’est aussi une histoire qui se poursuit. C’est le sens de cette aventure collective.

« La gauche de progrès et sociale-démocrate est une des composantes de la majorité »

Comme il l’avait dit devant les parlementaires, lors de la présidentielle, le chef de l’Etat prévient à nouveau : « Je vous le dis, rien n’est acquis ». Emmanuel Macron demande à ses candidats d’« aller décrocher cette majorité parlementaire […] qui permettra de porter de grands projets ». Il ajoute : « Vous êtes la condition de cette ambition, en allant convaincre dans les semaines à venir ».

Et convaincre, s’il le faut « le matin, le midi, le soir, si besoin la nuit », « pour aller chercher une majorité à l’Assemblée ». « Il faut passer cette étape du premier tour et ensuite aller gagner l’étape du second tour. Il n’y a aucun territoire perdu et aucun territoire gagné. Rien n’est écrit », insiste le locataire de l’Elysée. Bref, « vous devez vous battre ».

Se battre déjà pour aller chercher les électeurs macronistes. C’est l’enjeu de l’abstention. « Ne vous dispersez pas. Ne cherchez pas à aller convaincre tout le monde. Allez convaincre le cœur de cet électorat et élargissez progressivement », leur conseille-t-il, d’autant que « le ticket d’entrée pour le deuxième tour sera parfois compliqué », en raison de l’abstention et de la difficulté à atteindre le seuil de 12,5 % des inscrits pour se maintenir. Pour Emmanuel Macron, cet électorat est aussi à gauche, alors que le rassemblement autour de LFI passe mal au PS. « La gauche de progrès et sociale-démocrate est une des composantes de la majorité », soutient le chef de l’Etat.

« J’entends parfois des commentaires qui ne sont pas responsables, voulant faire croire qu’il y a un troisième tour » lance Emmanuel Macron

Mais il faut aussi se battre contre les adversaires. « Ce qui a été tranché le 24 avril est tranché. La légitimité du projet présidentielle est installée », « il ne faudrait pas vous laisser intimider par ceux qui voudraient rejouer aux législatives ce qui a été tranché à la présidentielle », affirme Emmanuel Macron, sans citer Jean-Luc Mélenchon. « J’entends parfois des commentaires qui ne sont pas responsables, voulant faire croire qu’il y a un troisième tour », ajoute encore le Président réélu.

Emmanuel Macron dénonce « un projet d’exclusion à l’extrême droite » et, « de l’autre côté, un projet qui a choisi le communautarisme » et qui vise « un traitement de clientèles ». Lui affirme défendre « un universalisme », un projet « respectueux des religions, de l’absence de religion, respectueux des origines, se battant avec force et conviction pour les progrès sociétaux », « l’écologie » et « la justice sociale ».

« Vous portez le seul véritable projet écologique » va jusqu’à affirmer Emmanuel Macron aux candidats, « à l’extrême droite, il n’y a aucune crédibilité écologique. Ils renoncent au renouvelable ». Et « l’extrême gauche » ne propose au fond « qu’une seule chose, la décroissance », selon Emmanuel Macron. Mais c’est avant tout « un combat de mobilisation » de son camp qui compte, car le 19 juin, il faudra « donner des bras et des jambes » à la majorité. Et pour la tête, on l’a compris, ce sera Emmanuel Macron.

De nouveaux profils plus « technos » et des députés « expérimentés »

Alors qu’il reste encore quelques circonscriptions à arrêter, on connaît l’essentiel des candidats. Cinq ans après, les députés sortants sont nombreux à rempiler. Sur 267 députés marcheurs, seuls 33 jettent l’éponge. Parmi les nouveaux, on compte un certain nombre de « technos ». Des conseillers ministériels et politiques. Adrien Ghomi, secrétaire général du groupe RDPI (LREM) du Sénat, fait partie de ceux-là. « C’est vrai que j’ai un profil plus politique. En tant que secrétaire général du groupe de la majorité présidentielle au Sénat, j’étais plutôt derrière, avec une équipe de conseillers techniques », reconnaît celui qui, à 33 ans, est candidat en Seine-et-Marne, dans la circonscription laissée libre par Jean-Michel Fauvergue, l’ancien patron du Raid. Mais il compte sur ses « atouts », sa « connaissance particulièrement précise de l’institution parlementaire, du cheminement de la loi ». Si sa « circo » ne semble pas être la plus difficile, « on va charbonner, aller sur le terrain », assure Adrien Ghomi. Regardez :

Certains sont plus expérimentés. Comme un certain Manuel Valls. L’ancien premier ministre socialiste a obtenu l’investiture dans la 5e circonscription des Français de l’étranger. Quel atelier suit-il ? « Voyage », sourit celui qui a tenté sa chance à Barcelone, avec le succès que l’on sait.

L’impression d’un manque de renouvellement se fait sentir cette fois. « Qu’il y en ait moins, car il y a 350 sortants, je vous le concède bien volontiers », « c’était plus facile en 2017 car on partait d’une feuille totalement vierge », explique Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne, « c’est toujours difficile l’équilibre entre ceux qui sont réinvestis et ceux qui ne le sont pas, car on donne aussi des gages de renouvellement ». Pour les nouveaux venus, « on peut apporter notre expérience pour qu’ils ne commettent pas d’erreurs, les orienter sur quoi faire et ne pas faire », ajoute le député Jean-Baptiste Moreau, porte-parole de Renaissance (voir vidéo ci-dessous). « C’est une majorité qui a beaucoup plus d’expérience. Pour beaucoup, elle est sortante. Elle a cette expérience qui peut être utile », confirme Thomas Mesnier, député de Charente, passé de LREM à Horizons.

« On lance la dynamique de la majorité présidentielle sous cette même bannière, Ensemble », se réjouit Stanislas Guérini, délégué général de LREM/Renaissance, qui insiste sur « la volonté de lancer la campagne législative, avec un programme, un projet pour le pays ». Il ajoute : « On veut une majorité dès cet été active au Parlement pour prendre des décisions importantes pour augmenter les retraites, mieux rémunérer les fonctionnaires, augmenter la prime Macron ».

« L’élection législative va commencer après la nomination du gouvernement » selon Patrick Mignola

Reste que la majorité donne l’impression d’un petit retard à l’allumage, ou d’un faux plat, alors que la gauche a monopolisé l’espace médiatique depuis le second tour. Le fait qu’Emmanuel Macron n’ait toujours pas annoncé le choix de son (ou sa) premier ministre, n’arrange rien. « Les 15 premiers jours, Jean-Luc Mélenchon a fait son numéro », mais « l’élection législative va commencer après la nomination du gouvernement », soutient Patrick Mignola, président du groupe Modem de l’Assemblée.

« Emmanuel Macron vient comme un capitaine d’équipe, dans un moment qui va être intense », explique avant l’arrivée du Président le patron des députés Modem, « il faudra qu’on soit solide ». « C’est une bataille politique » qui s’annonce, ajoute de son côté la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, responsable de Territoires de progrès, sur l’aile gauche macroniste. Elle vise la nouvelle alliance de la gauche, confirmant implicitement qu’elle pourrait faire de l’ombre à la majorité, grâce à son unité : « Cette alliance qu’on appelle NUPES, et que moi j’appelle DUPE, car c’est un marché de dupes, en fait, c’est une alliance purement électoraliste », lance la candidate dans le Val-de-Marne.

Face à la gauche unie, « un accident industriel » n’est pas exclu

Cette union de la gauche est regardée de près, confirme Patrick Mignola, qui imagine divers scénarios. « Il peut y avoir un accident industriel, si toute la gauche devient eurosceptique et poutinienne », raille le député Modem, « ils peuvent se refaire la fraise ». Comme il devrait y avoir encore une fois « très peu de triangulaires », ce sera surtout des duels « contre le RN ou LFI ». Si « l’attelage » de tous les partis de gauche tient, « on peut perdre un peu plus de sièges », reconnaît le président de groupe.

Patrick Mignola pense cependant que le plus probable sera une majorité pour Emmanuel Macron. Mais pas une majorité fleuve. « Cela peut être 320 députés (la majorité absolue est à 289 sièges, ndlr). Une majorité plus courte, mais une majorité quand même », pronostique le député de Savoie, qui compte « aller chercher les électeurs de gauche » déçue pour l’union. Sa suppléante sera d’ailleurs « de gauche ». Mais il faudra avant tout, comme l’a dit le Président, « remobiliser » l’électorat car « une législative se gagne sur l’abstention différentielle ». Pour ça, le discours la veille d’Emmanuel Macron à Strasbourg, au Parlement européen, sur l’Europe, était le bienvenu. « C’est mot compte double pour notre électorat. C’est très bien », sourit Patrick Mignola. Reste plus qu’à faire un Scrabble.

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