Les sénateurs rejettent les crédits de l’agriculture proposés dans le budget 2021

Les sénateurs rejettent les crédits de l’agriculture proposés dans le budget 2021

Le Sénat a rejeté ce 1er décembre les crédits de la mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, dans le projet de loi de finances pour 2021. Il a également voté contre le compte spécial développement agricole et rural.
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Le « non » du Sénat est venu du cœur. Les sénateurs ont refusé ce 1er décembre d’accorder leur soutien au budget de l’agriculture, tel qui leur a été proposé dans le projet de loi de finances pour 2021. Ils ont rejeté les crédits la mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, avant de faire de même pour le compte d’affectation spécial développement agricole et rural (Casdar).

Certains points ont pu satisfaire la haute assemblée et sa majorité de droite et centriste. C’est notamment le cas de la prolongation pour deux ans du dispositif TODE (exonération de cotisations sociales patronales sur les bas salaires des saisonniers), dont le Sénat tente d’obtenir régulièrement la pérennisation, de la stabilisation des budgets des chambres d’agriculture ou encore du 1,2 milliard d’euros inclus dans le plan de relance pour l’agriculture. Mais sur d’autres points, le compte n’y était pas du tout.

Le rapporteur LR de la commission des finances, Vincent Segouin, s’est dit « déçu de ne pas distinguer de lignes claires » à la lecture du budget. « Votre budget pour 2021 n’est pas innovant », a-t-il critiqué. Le sénateur de l’Orne a fait part de ses inquiétudes sur la réforme de la politique agricole commune au niveau européen, mais aussi sur les fonds dédiés à la recherche agricole. « C’est navrant », a même ajouté son collègue socialiste, Patrice Joly, toujours sur la question des investissements en faveur de nouvelles pratiques agricoles. Laurent Duplomb, l’un des sénateurs LR les plus actifs sur les questions agricoles, s’est plaint d’un « budget sans réelle nouveauté ».

Les sénateurs critiquent les absences de certaines lignes sur le budget en faveur de la recherche

L’abaissement du plafond du Casdar de 10 millions d’euros a concentré les critiques. Financé par des taxes prélevées sur les produits agricoles, il sert à financer des actions de développement pour les filières. « Vous vous apprêtez à spolier les cotisations des agriculteurs destinées à financer une recherche qui leur revient », s’est exclamé Laurent Duplomb, dénonçant un « tout de passe-passe budgétaire ». Le socialiste Jean-Claude Tissot a épinglé la baisse des moyens de recherche des instituts techniques. « A la découverture de ce budget, j’ai d’abord cru à une provocation », a-t-il expliqué. Le communiste Fabien Gay a déploré, quant à lui, la baisse de 23 millions d’euros pour la modernisation et le renouvellement des exploitations.

Un amendement soutenu par les trois principaux groupes du Sénat (LR, centristes et socialistes) a été adopté, dans le but de réorienter 21 millions d’euros en faveur de la recherche, dont sept pour la recherche d’alternatives au glyphosate. Cet amendement permet, selon eux, d’afficher « clairement les crédits de recherche annoncés par le ministère, qui ne figurent pas dans le budget ». Julien Denormandie a promis de faire des redéploiements budgétaires. « On tiendra l’ensemble des engagements », a-t-il promis.

« Il faut mettre un peu d’eau dans son vin », demande Julien Denormandie

Pour le sénateur Daniel Gremillet, le volet forestier du budget constitue un « rendez-vous manqué », malgré les 200 millions d’euros du plan de relance, dédiés à la forêt et au bois. Sur de nombreux bancs, les sénateurs ont fait part de leurs inquiétudes sur l’avenir de l’Office national des forêts, après le vote de l’Assemblée nationale qui a annulé une réduction des effectifs. Plusieurs groupes au Sénat (LR, Union centriste et RDSE, à majorité radicale) ont fait adopter un amendement sauvegardant les effectifs du Centre national de la propriété forestière, à son niveau de 2020. Un amendement, créant un fonds de 25 millions d’euros, destiné à l’entretien des peuplements dans le cadre du plan de relance consacré à la forêt française, a aussi été introduit par l’hémicycle.

Interrogé sur les lenteurs du décaissement des aides en faveur des filières les plus touchées par le confinement et la crise sanitaire, le ministre de l’Agriculture a annoncé que la moitié des 300 millions d’euros mobilisés avait déjà été déboursée. Si le budget de la mission agriculture s’élève cette année à près de trois milliards d’euros, en relative stabilité, Julien Denormandie a rappelé que dans la réalité du budget de l’Etat, il pesait en réalité 20 milliards d’euros, grâce aux mesures fiscales.

Face aux critiques, et répondant au sénateur PS Patrice Joly, il a appelé à « mettre un peu d’eau dans son vin » et à « reconnaître là où l’on fait de vraies avancées » (voir la vidéo de tête). Il a par exemple cité les 130 millions d’euros mis sur la table pour la modernisation des abattoirs. Quant aux deux ans de la loi Egalim, censée améliorer le revenu des agriculteurs, dont le bilan est plus que mitigé, le ministre a rappelé que la France n’était « pas dans une économie administrée », mais qu’il fallait instaurer un « rapport de force ». « Il faut passer de la guerre des prix à la transparence des marges », a-t-il appelé.

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