Les socialistes au bord de la crise de nerfs avant le congrès de Marseille

Les socialistes au bord de la crise de nerfs avant le congrès de Marseille

Le 80e congrès du Parti socialiste s’annonce pour le moment comme le congrès de la discorde. Dans le groupe sénatorial, l’humeur n’est pas au beau fixe.
Guillaume Jacquot

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Le PS n’a toujours pas recollé les morceaux. Cinq jours après le vote des militants, le résultat de son élection interne est toujours loin de faire l’unanimité. Le premier secrétaire sortant, Olivier Faure, continue de proclamer sa victoire, à 51,09 % selon les résultats communiqués par le parti.

Ce mardi, sur notre antenne, le député de la Seine-et-Marne a dénoncé des manœuvres de « professionnels de la déstabilisation autour de Nicolas Mayer-Rossignol », son adversaire du second tour qui conteste les résultats. Pour le maire de Rouen, qui dénonce « des irrégularités et des fraudes », la sincérité du scrutin a été altérée. « Personne ne peut s’autoproclamer », a-t-il répété ce mardi sur Sud Radio. Si des échanges ont eu lieu au siège du PS à Ivry-sur-Seine la veille, aucune sortie de crise ne semble pour le moment se dessiner. Autant dire le chaos à l’approche du 80e congrès du parti, ce week-end à Marseille, où les résultats du vote doivent être entérinés.

« On regarde ça avec dépit »

Au groupe socialiste du Sénat, qui tenait sa première réunion de groupe depuis le second tour de l’élection, l’ambiance est morose. Comme une réplique du corps électoral du parti, les soutiens des deux finalistes sont à peu près de taille comparable. Certains sont contrariés, gênés, ou en retrait, d’autres ne laissent rien paraître, préférant se tenir à l’écart des secousses du parti. « Il faut qu’il y ait une sortie de crise, c’est dans l’intérêt du PS et du pays », commente, l’un des soutiens d’Olivier Faure, peu désireux de s’étendre sur le sujet. « On regarde ça avec dépit », s’impatiente Laurence Harribey. Favorable à la motion de Nicolas Mayer Rossignol, la sénatrice de la Gironde note que le PS est inaudible dans les grands dossiers politiques du moment. « C’est assez tendu, l’image est affligeante. J’ai l’impression qu’on est devenus comme les Verts, on s’entredéchire », se lamente le sénateur Joël Bigot. « Je ne suis pas pessimiste, mais il faut qu’on en sorte. »

Par quelle porte de sortie ? Une rencontre a eu lieu hier à Évry entre Olivier Faure et ses concurrents, Nicolas Mayer-Rossignol et Hélène Geoffroy, la maire de Vaulx-en-Velin. Les échanges devraient se poursuivre d’ici au congrès de Marseille. Olivier Faure promet d’assurer une « forme de collégialité » à la tête du parti, en associant ses adversaires à qui il propose des postes de premiers secrétaires adjoints. Nicolas Mayer Rossignol s’est vu proposer la tête de liste aux européennes pour 2024, offre qu’il a déclinée avec fermeté. « On ne m’achète pas avec des postes. » Quant à la future direction, le maire de Rouen rappelle qu’avec Hélène Geoffroy (50,85 % à eux deux au premier tour) il fait « jeu égal » avec Olivier Faure. « Il faut un collège à parts égales de responsabilité. On peut très bien avoir deux premiers secrétaires. »

« Le forcené d’Ivry »

Parmi les soutiens de Nicolas Mayer-Rossignol, au sein du groupe PS, l’idée d’une direction « à 50-50 » s’impose comme l’évidente sortie de crise. « C’est la meilleure solution », martèle une figure du groupe, qui appelle le « forcené d’Ivry » à « se rendre ». Olivier Faure n’a pas permis, selon lui, à la « commission de récolement » d’aller au bout des vérifications des procès-verbaux du scrutin. « Le mec est fou », fustige ce parlementaire.

Pour Rémi Féraud, sénateur de Paris, la clé est dans les mains du premier secrétaire sortant. « À partir du moment où Olivier Faure s’est autoproclamé, la balle est largement dans son camp à ce stade. » L’enjeu ne porte pas seulement sur la gouvernance, mais aussi sur l’orientation du parti. Nicolas Mayer-Rossignol souhaite faire évoluer la Nupes pour que le PS soit « allié mais pas aligné ». « La réalité du congrès, c’est un échec pour la stratégie d’Olivier Faure », note Rémi Féraud.

Joël Bigot veut plutôt croire que les choix d’Olivier Faure de rejoindre une alliance électorale – certes dominée par la France insoumise – ont permis au parti de sortir de l’ornière après la sévère défaite à la présidentielle. « La ligne politique, c’est l’union de la gauche. Une partie des troupes de Nicolas Mayer-Rossignol est sur cette ligne », rappelle-t-il. Sur le terrain, le parti à la rose commençait tout juste à ne plus être « ostracisé », selon lui. « On commençait à réintégrer le giron de la gauche, il y avait moins de suspicion. »

Les discussions, en amont de Marseille, prendront du temps. Pour Joël Bigot, la cohésion des parlementaires n’est même pas assurée à terme. « Une allumette et ça prend feu, y compris chez les sénateurs », s’inquiète-t-il.

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