Loi Climat : après une 1ère victoire au Sénat, les écolos se voient « en chien de berger qui mord au mollet »

Loi Climat : après une 1ère victoire au Sénat, les écolos se voient « en chien de berger qui mord au mollet »

A l’heureuse surprise des sénateurs écologistes, la chambre Haute a adopté à l’unanimité moins deux abstentions un premier amendement pour créer un article préliminaire, selon lequel la France s’engage à respecter l’objectif de baisse de 55 % des émissions de gaz à effet de serre pour 2030, en cours de révision au niveau européen. Le petit groupe écolo se voit en « chien de berger » qui « pousse » le troupeau.
Public Sénat

Par Pierre Maurer

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Certains aimeraient voir la victoire parlementaire se traduire en triomphe footballistique. « Je me suis habillée en bleu blanc rouge pour la circonstance », sourit l’ancienne ministre de François Hollande et députée écolo, Delphine Batho. En référence au match de l’Euro de football France Allemagne de mardi soir ? En conférence de presse ce matin, c’est un autre match gagné que les écologistes fêtent : la veille, la chambre Haute a adopté à l’unanimité moins deux abstentions un premier amendement transpartisan pour créer un article préliminaire, selon lequel la France s’engage à respecter l’objectif de baisse de 55 % des émissions de carbone pour 2030, en cours de révision au niveau européen. De quoi tordre le cou au cliché d’un Sénat arc-bouté sur des positions conservatrices.

« Une véritable évolution du Sénat »

« Cela traduit une véritable évolution du Sénat et de la société », se félicite le coordinateur du groupe pour le PJL Climat, Ronan Dantec. « La majorité des parlementaires sont convaincus des enjeux du changement climatique », veut croire le sénateur de la Loire-Atlantique, « très fier d’avoir atteint cet objectif » au Sénat.

Passé le moment des congratulations, l’adversité politique reprend ses droits : « Certes, la droite sénatoriale a réaffirmé qu’il faut tenir l’engagement de la baisse de 55 % des GEDS (gaz à effet de serre). Mais rien dans le travail de la commission ne le permet. Il y a des avancées et des reculs », résume Ronan Dantec, regrettant particulièrement l’absence de mesures de « justice fiscale et de redistribution ».

D’autres points leur procurent de l’enthousiasme. En tout, les écolos se targuent d’avoir fait adopter 12 « avancées » en commission : interdiction des engrais chimiques non agricoles, sacralisation de la « taxe Chirac » sur les billets d’avion, réduction de la TVA sur le prix des billets de train… Mais tous, craignent un Sénat favorable au nucléaire « plein pot ».

Éric Piolle, le maire écolo de Grenoble, a fait l’effort de passer une tête pour féliciter ses collègues qui « l’épatent ». « On a besoin d’un Etat stratège qui crée des moyens », affirme celui qui ne cache pas ses ambitions élyséennes.

« A l’Assemblée nationale, l’urgence écologique n’était pas encore un constat unanimement partagé »

Le président des sénateurs verts, Guillaume Gontard, observe ses troupes comme autant de « chiens de bergers » sur le texte Climat, face à ceux qui veulent « rester à la bergerie ». « On donne la direction, on pousse, on oriente, des fois on mord un peu au jarret », s’est fendu le sénateur de l’Isère. « On est arrivé à un moment où il y a un constat partagé […]. Par contre là où ça n’est pas encore partagé, c’est sur les actions et sur l’urgence et la mise en application de ces actions », relève-t-il.

« Ce qu’on a constaté à l’Assemblée nationale, c’est que l’urgence écologique n’était pas encore un constat unanimement partagé. Le fait qu’il y ait un changement climatique du fait des activités humaines, oui, mais le calendrier de l’urgence qui découle des rapports du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) pas du tout », renchérit Delphine Batho, ancienne membre de l’éphémère groupe Ecologie démocratie solidarité au Palais Bourbon.

Pessimisme pour un accord entre députés et sénateurs

Guillaume Gontard regrette que les certains n’aient pas pris conscience de l’urgence de la course contre la montre. « Chaque mois perdu, c’est un mois perdu pour le climat et sur le passage à l’acte », insiste-t-il, soulignant « qu’on a 114 mois pour atteindre 55 % de baisse de gaz à effet de serre ».

Après la lecture du Sénat, il faudra encore trouver un accord avec la majorité présidentielle en commission mixte paritaire (réunions de 7 députés et de 7 sénateurs pour trouver un accord sur un texte). Sans ambages, Ronan Dantec se dit « pas très optimiste pour une CMP conclusive ». Delphine Batho complète, avant de filer à Angers pour un match de foot entre écolos en soutien à leur candidat, Matthieu Orphelin, en Pays de la Loire : « La seule info est que le texte n’est pas sur les écrans radar de la session extraordinaire du mois de juillet. Donc le combat va durer et on le retrouvera à la rentrée. »

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