Loi climat : le groupe écologiste au Sénat propose une version alternative du texte

Loi climat : le groupe écologiste au Sénat propose une version alternative du texte

Présentée comme « la vraie loi climat », l’initiative du groupe Ecologiste – Solidarités et Territoires entend aller plus loin que le projet de loi qui arrive en débat en juin au Sénat, en réduisant de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.
Public Sénat

Par Jules Fresard et Sandra Cerqueira

Temps de lecture :

2 min

Publié le

Mis à jour le

L’intitulé est clair, la démarche l’est aussi. En dévoilant mardi 25 mai une version alternative du projet de loi « Climat et résilience » porté par le gouvernement, intitulé « la vraie loi climat », les sénateurs écologistes ont tenu, à moins d’un an de l’élection présidentielle, à réaffirmer leur vision de l’écologie politique. Mais aussi à réexprimer leurs divergences vis-à-vis de la ligne gouvernementale. « Le choix du déterminant est clair. Cette proposition est LA vraie loi climat, car la proposition d’en face n’est pas à la hauteur. La seule proposition concrète, c’est la nôtre » a ainsi affirmé Ronan Dantec, sénateur écologiste de Loire-Atlantique, un des instigateurs du projet.

L’initiative part d’un constat clair. Avec le projet actuel du gouvernement, la France n’arrivera pas, d’ici 2030, à atteindre les nouveaux objectifs fixés par l’Union Européenne en matière de protection de l’environnement, qui vise à une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. « On a une loi qui s’assoit sur les accords de Paris », regrette Ronan Dantec, en évoquant l’actuel projet. D’où la nécessité de proposer un texte alternatif, invitant la France à rentrer dans les clous des annonces européennes, avec des propositions chiffrées permettant d’atteindre les 55 % en 2030. « La loi climat et résilience ne permettra d’atteindre une baisse que de 40 % au mieux. C’est une véritable déception, qui ne répond pas aux objectifs. Le gouvernement se cache derrière un conservatisme, et c’est incompréhensible qu’il ne se donne pas les capacités d’aller plus loin », a de son côté justifié Guillaume Gontard, le président du groupe écologiste.

Renouer avec la Convention citoyenne

Car la proposition des écologistes est l’occasion de revenir sur les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, qui à l’issue de ses travaux avaient formulé 149 propositions pour la protection de l’environnement. Des propositions reprises partiellement dans le projet de loi « Climat et résilience », avec 15 mesures reprises telles quelles. Dans une interview au média Brut, Emmanuel Macron avait d’ailleurs expliqué que ces « 150 citoyens, je les respecte, comme des parlementaires. Mais je ne vais pas dire, parce que ces 150 citoyens ont écrit un truc, c’est la Bible, ou le Coran, ou que sais-je ! ».

Loi climat : "ce qui s'est passé avec la convention citoyenne est problématique" juge Ronan Dantec
01:39

Pour Guillaume Gontard, il s’agit là d’une « trahison démocratique ». D’où les échanges menés par le groupe écologiste avec les citoyens de la Convention lors de l’écriture du texte. « Cette vraie loi climat reprend la majeure partie des propositions de la Convention citoyenne, et nous avons eu à cœur d’y rajouter une quantification globale. […] Ce qui s’est passé avec la Convention est très grave », analyse Ronan Dantec.

Une batterie de mesures pour atteindre les 55 %

Mais comment les écologistes entendent-ils atteindre leurs objectifs ? Au travers d’un bouquet de mesures fortes, déclinées dans sept domaines, allant des transports au stockage du CO2. Et les plus grandes réductions d’émissions de gaz à effet de serre se réaliseraient dans le premier domaine. La « vraie loi climat » entend ainsi interdire en 2030 à la vente les véhicules particuliers neufs utilisant les énergies fossiles, quand le projet gouvernemental entend à la même date n’interdire que les seuls véhicules émettant « plus de 123 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre ». Les écologistes entendent également défendre le train de nuit, en proposant une offre d’ici 2030 pour tout voyage supérieur à 5 heures, quand Jean-Baptiste Djebbari, le ministre chargé des Transports, évoquait lui une dizaine de lignes d’ici 2030. Enfin, l’arrêt des liaisons aériennes domestiques quand une alternative en train inférieur ou égal à 3h30 est annoncée, contre 2h30 actuellement proposé par le gouvernement.

Concernant le bâtiment, le premier angle d’attaque des écologistes et la lutte contre les passoires thermiques, qui proposent « l’obligation de rénovation énergétique complète et performante dès 2024 des bâtiments au moment de leur vente ». L’interdiction de la location des passoires thermiques classées F et G dès 2025 et E en 2028 est également proposée. Dans l’actuelle loi climat, les bâtiments classés F et G ne seront interdits à la location qu’en 2028, soit 3 ans plus tard.

La nécessité de consommer moins de viande

Sur le plan agricole, les sénateurs souhaitent s’attaquer aux engrais azotés, qui rejettent massivement des gaz à effet de serre, mais aussi lutter contre la surconsommation de viande, en renforçant les alternatives végétariennes dans les cantines. Concernant l’élevage, une des mesures de la proposition de loi sur le bien-être animal d’Esther Benbassa, rejetée en commission, a été introduite dans le document. Il vise à « l’interdiction de construction de tout bâtiment nouveau ou d’extension d’élevage ne respectant pas des conditions de densité maximale et d’accès au plein air ».

Arrêt à 50 % des centrales au gaz en 2030, arrêt des centrales à charbon en 2022, instauration d’une taxation carbone aux frontières de l’UE… Les mesures sont encore nombreuses, et font toutes l’objet de calculs permettant d’appréhender leur impact environnemental. Mais les écologistes entendent également rediriger 1 milliard de financement vers les blocs communaux et régionaux, afin que ces derniers prennent pleinement part à la transition énergétique.

400 amendements annoncés

Alors comment traduire concrètement toutes ces propositions ? Guillaume Gontard a d’ores et déjà annoncé que 400 amendements allaient être déposés concernant le projet de loi « Climat et résilience », étudié au Sénat durant le mois de juin, même si le chef de file du groupe écologiste se fait peu d’illusions quant au devenir du document. « On se fait peu d’espoir que ces propositions passent, même si un débat commence à émerger chez Les Républicains » affirme-t-il.

Mais le plus important n’est pas là, mais dans l’image qu’il donne et les idées qu’il distille, notamment à l’aune de la prochaine échéance présidentielle. Une « vraie loi climat » qui permet, selon Guillaume Gontard, de se « préparer pour 2022 ».

Dans la même thématique

Loi climat : le groupe écologiste au Sénat propose une version alternative du texte
5min

Politique

Européennes 2024 : après le discours d’Emmanuel Macron, Olivier Faure veut saisir l’Arcom au nom de « l’équité » entre les candidats

Le Parti socialiste demande que le discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe, prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne, soit décompté des temps de parole et inscrit dans les comptes de campagne de la majorité présidentielle. Pour le patron du PS, invité de Public Sénat, le chef de l’Etat est devenu « candidat à cette élection européenne ».

Le

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
6min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : « Il se pose en sauveur de sa propre majorité, mais aussi en sauveur de l’Europe »

Le chef de l'Etat a prononcé jeudi 25 avril à la Sorbonne un long discours pour appeler les 27 à bâtir une « Europe puissance ». À l’approche des élections européennes, son intervention apparait aussi comme une manière de dynamiser une campagne électorale dans laquelle la majorité présidentielle peine à percer. Interrogés par Public Sénat, les communicants Philippe Moreau-Chevrolet et Emilie Zapalski décryptent la stratégie du chef de l’Etat.

Le

Paris : Speech of Emmanuel Macron at La Sorbonne
11min

Politique

Discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe : on vous résume les principales annonces

Sept ans après une allocution au même endroit, le président de la République était de retour à La Sorbonne, où il a prononcé ce jeudi 25 avril, un discours long d’1h45 sur l’Europe. Se faisant le garant d’une « Europe puissance et prospérité », le chef de l’Etat a également alerté sur le « risque immense » que le vieux continent soit « fragilisé, voire relégué », au regard de la situation internationale, marquée notamment par la guerre en Ukraine et la politique commerciale agressive des Etats-Unis et de la Chine.

Le

Police Aux Frontieres controle sur Autoroute
5min

Politique

Immigration : la Défenseure des droits alerte sur le non-respect du droit des étrangers à la frontière franco-italienne

Après la Cour de Justice de l’Union européenne et le Conseil d’Etat, c’est au tour de la Défenseure des droits d’appeler le gouvernement à faire cesser « les procédures et pratiques » qui contreviennent au droit européen et au droit national lors du contrôle et l’interpellation des étrangers en situation irrégulière à la frontière franco-italienne.

Le