Loi Mobilités : le Sénat encadre le déploiement des trottinettes électriques
Les sénateurs ont réécrit l’article 18 du projet de loi d’orientation des mobilités en donnant la possibilité aux communes d’instaurer un régime d’autorisation préalable pour les opérateurs qui installent dans les rues un service de mobilité en « free-floating ». Le dispositif n’a pas recueilli les faveurs du gouvernement.

Loi Mobilités : le Sénat encadre le déploiement des trottinettes électriques

Les sénateurs ont réécrit l’article 18 du projet de loi d’orientation des mobilités en donnant la possibilité aux communes d’instaurer un régime d’autorisation préalable pour les opérateurs qui installent dans les rues un service de mobilité en « free-floating ». Le dispositif n’a pas recueilli les faveurs du gouvernement.
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Depuis plus d’un an, les vélos partagés sans stations d’attache et les trottinettes électriques en libre-service se multiplient sur les trottoirs des grandes villes françaises. Ces nouvelles mobilités en vogue ne sont pas sans poser quelques problèmes sur le partage de l’espace public, qu’il s’agisse de déplacements ou de stationnements. À Lyon, par exemple, on estime leur nombre entre 2 500 et 3 000.

La sénatrice centriste du Rhône, Michèle Vullien, a souligné combien il était important d’assurer un « partage harmonieux de l’espace public, en n’oubliant pas les plus fragiles, et en ne donnant pas une image d’anarchie et d’une ville mal tenue ». Le Sénat a cherché à répondre à ce problème posé aux communes, compétentes sur la voirie.

Dans sa version initiale, l’article 18 du projet de loi d’orientation des mobilités (LOM) donnait bien une marge de manœuvre aux autorités organisatrices de la mobilité pour encadrer ces nouveaux services de partage. Mais beaucoup moins rigide. Au quatrième jour d’examen de ce texte, le Sénat a durci ce régime, en donnant la possibilité aux communes et intercommunalités d’instaurer une autorisation préalable à l’exploitation, pour la durée de leur choix.

La version retenue par les sénateurs fixe également davantage de cas de prescriptions que les opérateurs auraient à respecter. Là où le projet gouvernemental mentionnait surtout les mesures à prendre pour respecter les règles de circulation et stationnement, ou encore les décisions à prendre pour assurer le retrait des engins hors d’usage, les sénateurs ont étendu le champ des possibles.

La Haute assemblée permet ainsi aux communes de fixer une redevance d’occupation du domaine public, de limiter le nombre d’engins déployés par un opérateur, ou encore d’interdire la présence de publicité sur leur flotte (à l’exception de la promotion du service en lui-même).

La ministre renvoie à une concertation

Si la ministre des Transports se dit sensible aux problématiques posées par le Sénat, en reconnaissant que les collectivités territoriales devraient avoir un rôle plus important dans le dispositif, elle doute qu’un régime d’autorisation préalable « soit adapté ». Élisabeth Borne, qui était favorable à un retour à la version initiale de l’article, a précisé que la « concertation » allait se poursuivre « en tenant compte des orientations du Sénat » (le texte doit passer par l’Assemblée nationale avant le début de l’été). L’idée est de parvenir un à « un dispositif qui donne toute leur place aux autorités organisatrices de la mobilité et aux communes, et qui donne de la souplesse, afin d’éviter des procédures coûteuses, tant pour les acteurs économiques que pour les administrations. »

Trottinettes électriques : la ministre des Transports renvoie à une concertation
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Cette précision, qui rappelle les débats de la semaine passée sur le financement des infrastructures de transport, n’a pas satisfait le rapporteur du texte, le sénateur LR Didier Mandelli. « Nous aurions évidemment préféré que dès maintenant ces amendements traduisent le résultat de ces discussions ». En l’état, il a appelé ses collègues à conserver le texte de la commission de l’Aménagement du territoire du Sénat.

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Plusieurs villes n'ont d'ailleurs pas attendu la loi LOM pour tenter de réguler ces nouvelles formes de déplacement. Certaines songent à mettre en place des chartes ou à instaurer des formes de redevances. Le texte de loi devrait néanmoins offrir un cadre commun aux différentes collectivités pour leurs cahiers des charges.

« Stationnements sauvages »

Afin de favoriser l’innovation, le sénateur La République en marche, Frédéric Marchand, a tenté de convaincre l’hémicycle de revenir à la copie du gouvernement, sans quoi l’article allait « freiner le développement de ces nouvelles offres plébiscitées par les usagers ». « Ces règles n’empêcheront ni les incivilités, ni les accidents, ni les trottinettes de rouleur sur les trottoirs », a mis en garde le sénateur du Nord.

Le gouvernement a, en revanche, donné son accord à l’amendement de Philippe Mouiller (LR), précisant que les opérateurs auraient à s’assurer de l’accessibilité de la voie publique aux personnes handicapées ou en perte d’autonomie. Le sénateur des Deux-Sèvres, qui a déploré les « stationnements sauvages », a été suivi par ses collègues.

« C’est en effet un enjeu très important, majeur, sur lequel l’ensemble des personnes fragiles qui souhaitent utiliser tranquillement les trottoirs, peuvent aujourd’hui attendre qu’on régule mieux ces nouveaux services », lui a donné raison la ministre.

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L’article 20, renforçant la responsabilité sociale des plateformes de livraison, a été supprimé

La sénatrice (LR) de Paris, Catherine Dumas, a même reconnu que beaucoup d’abus ne se produiraient pas si les vélos et trottinettes tant décriés disposaient de stations d’attache. L’élue de la capitale s’est d’ailleurs interrogée sur la recharge nocturne des trottinettes par des travailleurs indépendants, dont les « conditions de travail et de rémunération sont peu enviables ».

Au chapitre social, justement, le Sénat a supprimé l’article 20 du projet de loi, qui renforçait la responsabilité sociale des plateformes, comme celles mettant en relation des coursiers et des clients pour la livraison de repas. L’article se contentait d’autoriser les plateformes à signer des chartes facultatives censées apporter de meilleurs droits aux travailleurs indépendants qui utilisent leurs services.

Suivant leur couleur politique, les sénateurs ont déploré le caractère facultatif de la mesure, qui n’avait pas sa place selon eux dans la loi, ou encore – c’était le cas sur les bancs de gauche – un coup porté au Code du travail. D’autres ont mis en avant le caractère fragile de cet article, à l’heure où certains tribunaux requalifient en contrat de travail les relations entre des courriers et les plateformes.

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