La commission d’enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments a interrogé ce mardi 11 avril des représentants de médecins et de pharmaciens ainsi que deux membres de l’Académie de médecine. Tous insistent sur la nécessité d’augmenter les prix des médicaments les moins chers, de mieux communiquer aux médecins l’évolution des pénuries ainsi que sur les conséquences néfastes de cette situation pour les patients.
Médicaments : « On a plus de pénuries en France que dans d’autres pays européens », dénonce un médecin au Sénat
La commission d’enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments a interrogé ce mardi 11 avril des représentants de médecins et de pharmaciens ainsi que deux membres de l’Académie de médecine. Tous insistent sur la nécessité d’augmenter les prix des médicaments les moins chers, de mieux communiquer aux médecins l’évolution des pénuries ainsi que sur les conséquences néfastes de cette situation pour les patients.
Le diagnostic posé devant la commission d’enquête sénatoriale sur la pénurie de médicaments par le professeur Jean-Paul Tillement était attendu même s’il n’en demeure pas moins alarmant. « Le manque de médicaments en pharmacie de ville et hospitalière n’est pas nouveau. Dès 2010 des rapports signalent des ruptures d’approvisionnement et attiraient l’attention des pouvoirs publics », explique le pharmacologue, membre de l’Académie de médecine qui regrette l’aggravation des manques de médicaments.
Comme en avaientdéjà témoigné les associations de patients, les premiers touchés par ces pénuries sont les malades. France Assos Santé avançait même, fin mars, devant cette même commission d’enquête, que « 45 % des personnes touchées par une pénurie de médicaments ont dû modifier leur traitement ou y renoncer ». « Inacceptable » juge la docteure Claire Siret, présidente de la section santé publique de l’Ordre national des médecins.
« Conséquences sanitaires dramatiques »
Pour pallier le manque de certains médicaments, les pharmaciens disposent de plusieurs possibilités comme délivrer un générique ou un produit importé d’un autre pays. Une pratique qui pose certaines difficultés : « Récemment, on a reçu du paracétamol en sirop pour enfants d’Allemagne avec des notices uniquement en allemand. Vous imaginez la tête des parents », illustre le docteur Yves Juillet. S’ils n’ont pas d’autres choix, les pharmaciens « se retournent vers le médecin pour trouver une substitution thérapeutique, détaille celui qui est aussi membre de l’Académie de médecine. Mais ce n’est pas la panacée, car quand les gens sont inquiets, ils ne prennent pas leurs médicaments de substitution générique ou thérapeutique ! »
Cette défiance est pour la docteure Claire Siret une « conséquence dramatique de ces pénuries ». Elle estime que pour « adhérer à son traitement, un patient doit être en confiance sauf qu’aujourd’hui, il ne l’est plus ». La médecin dénonce par exemple la procédure trop contraignante mise en place par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) concernant l’amoxicilline qui n’était délivrée par le pharmacien qu’en cas d’angine bactérienne dépistée par le généraliste avec un test. « On ne peut pas travailler comme ça ! C’est remettre en question la capacité du médecin à faire son diagnostic et c’est donner des responsabilités au pharmacien qui le dépasse », considère-t-elle.
Médecins mal informés
Les allers-retours du patient entre son pharmacien et son médecin lorsqu’un médicament manque pourraient être évités grâce à une meilleure communication des praticiens. L’ordre des médecins plaide ainsi pour la mise en place d’une application sur smartphone qui spécifie quels médicaments sont en pénurie, pour quelles raisons et jusqu’à quand. « L’ANSM est censée vous alerter », s’est étonnée la sénatrice communiste Laurence Cohen. « Oui, il y a le site de l’ANSM mais quand doit-on y aller ? Tous les trois jours, tous les jours, trois fois par jour ? Ce n’est pas possible. On a du mal à tout gérer, il faut nous faciliter l’information », rétorque la médecin généraliste Claire Siret pour qui la solution pourrait aussi passer par les logiciels d’aide à la prescription.
A l’hôpital Dupuytren de Draveil, le docteur Patrick Léglise, pharmacien hospitalier, explique avoir des ruptures « toutes les semaines ». « J’appelle les médecins et je leur dis de changer leurs prescriptions », s’amuse celui qui est aussi délégué général de l’Intersyndicat des praticiens hospitaliers lorsqu’on lui demande comment il prévient les praticiens des pénuries à l’hôpital. Un fonctionnement impossible en ville d’après la présidente de la section santé publique de l’ordre national des médecins Claire Siret à cause des standards téléphoniques « saturés ».
Augmenter les prix des médicaments
Au-delà des conséquences concrètes des pénuries de médicaments pour les patients et les médecins, l’audition s’est aussi attardée sur la question clivante du prix des médicaments. Les laboratoires pharmaceutiques jugentles produits matures trop peu chers et donc pas rentables. Un constat que partagé par Patrick Léglise : « Quand un médicament dont le prix est fixé à deux centimes le comprimé, c’est en dessous du prix de revient industriel. C’est évident que l’industriel qui le vend perd de l’argent, donc à un moment il faut payer le vrai prix. »
Bien que les causes de la pénurie soient « multifactorielles », souligne la rapporteure communiste Laurence Cohen, le docteur Yves Juillet estime lui que les prix trop bas sont la raison principale du manque de médicaments en France. « On a plus de pénuries en France que dans d’autres pays européens comparables, en particulier les pays qui ont pris des mesures d’augmentation de prix au Portugal, au Danemark, en Espagne ou en Norvège », indique-t-il.
S’ils s’accordent sur les constats, les professionnels auditionnés sont plus divisés sur les solutions à mettre en place. Patrick Léglise, le délégué général de l’Intersyndicat des praticiens hospitaliers, souhaite que les prix des médicaments soient régulés au niveau européen pour « éviter la concurrence entre Etats sur les médicaments ». Il dénonce également les « effets pervers » de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) qui, selon lui, tend à « tirer les prix au plus bas ».
« L’Ondam c’est le cœur du sujet puisqu’on demande 1 milliard d’euros d’économie sur les médicaments, pointe Corinne Imbert, sénatrice Les Républicains (LR) de la Charente-Maritime, qui demande : tous les pays n’ont pas une sécurité sociale solidaire et généreuse comme la nôtre, comment imaginer un prix régulé européen ? » D’un côté, Patrick Léglise veut se baser sur des « critères objectifs comme le prix de revient ». De l’autre, son confrère Yves Juillet balaie cette proposition qu’il trouve « utopique » car « chaque pays européen a son propre système de protection sociale. »
« Aucune illusion » sur la relocalisation de la production des médicaments pour le Dr Yves Juillet
Lorsque l’on parle de pénurie de médicaments, revient aussi l’enjeu de la relocalisation de la production quele PDG de Pfizer France considérait « impossible » devant cette même commission d’enquête sénatoriale il y a deux semaines. Le professeur Jean-Paul Tillement détaille que « la France produit environ 6 % de ses principes actifs, l’Europe hors France 9 %, ce qui veut dire qu’il faut importer 85 % des principes actifs utilisés et notamment de la Chine. C’est une dépendance insupportable pour un pays comme le nôtre ! »
Pour relocaliser la production de médicament, il faudra « des années et des années » selon l’autre membre de l’Académie de médecine interrogé. Le Dr Yves Juillet prévient qu’il « ne faut se faire aucune illusion. » Même si l’entreprise Seqens qui produit du paracétamol en France pourrait servir d’exemple, Yves Juillet le nuance : « Ce sont les deux dernières étapes de production. Les deux premières resteront toujours en Chine ».
Jean-Paul Tillement se veut plus optimiste : « Il faudrait dire d’abord quels sont les principes actifs indispensables. Nous avons des façonniers et une industrie pharmaceutique capable techniquement de faire des médicaments qu’au départ, elle n’exploite pas. On a vu avec l’amoxicilline que les pharmaciens sont capables d’en produire. » Un sujet que ne manquera pas d’évoquer Audrey Derveloy, la présidente du géant pharmaceutique Sanofi France qui sera interrogée mercredi 12 avril par les sénateurs de la commission d’enquête.
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