Non-cumul des mandats : le gouvernement réfléchit à exempter les maires « des petites villes »

Non-cumul des mandats : le gouvernement réfléchit à exempter les maires « des petites villes »

Le ministre des Relations avec le Parlement, Marc Fesneau, est prêt à « réinterroger le cumul du mandat parlementaire avec celui de maire » pour les « petites villes ». Emmanuel Macron avait déjà ouvert la porte il y a deux semaines à une révision de la loi. Gérard Larcher veut aussi relancer le débat.
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Le non-cumul des mandats avait été une des batailles les plus intenses qu’avait connue le Sénat ces dernières années. C’était en 2013. Aujourd’hui, Emmanuel Macron semble prêt à revenir en partie sur cette réforme de François Hollande. Appliquée depuis 2017, elle interdit à un parlementaire de cumuler son mandat avec un exécutif local, maire ou maire-adjoint, président ou vice-président de conseil départemental, régional ou de communauté de communes.

Dans un entretien à L’Opinion ce mercredi 30 janvier, le ministre des Relations avec le Parlement, Marc Fesneau, ouvre clairement la porte à l’instauration d’une exception à l’application du non-cumul pour les maires des petites communes :

« La question de réinterroger le cumul du mandat parlementaire avec celui de maire, maire adjoint ou président de communauté de communes, dans des petites villes, mérite sans doute d’être creusée, pour conserver ce lien avec le territoire. Car d’une certaine façon, l’interdiction du cumul des mandats est à la défaveur des territoires intermédiaires et petits »

Le ministre ajoute : « Etre en situation de responsabilité locale permet de mieux appréhender en continu l’effet d’une mesure ». Reste à définir un seuil d’application. Jusqu’à combien d’habitants un parlementaire pourrait être également maire ? 5.000 ? 10.000 ? 15.000 ? Il est trop tôt pour le dire. De quoi nourrir de futurs débats au Parlement… Marc Fesneau évoque aussi un autre point avec le cumul des indemnités « qu’il faut sans doute encore plus restreindre ». Actuellement, les revenus cumulés d’un élu sont plafonnés à 8.434,85 euros par mois. Mais certains revenus ne rentrent pas dans le calcul.

Macron : « Il n’y a pas de tabou sur ce sujet »

La porte avait déjà été ouverte par Emmanuel Macron le 15 janvier, lors du lancement du grand débat. Répondant à une question d’un maire, il s’était demandé s’il ne fallait « peut-être » pas « permettre » aux parlementaires « de réavoir des mandats locaux, en tout cas dans une certaine proportion, sans être dans des exécutifs de premier plan ». « Il n’y a pas de tabou sur ce sujet non plus » avait assuré le chef de l’Etat.

Emmanuel Macron n’a « pas de tabou » sur le non-cumul des mandats
02:32

Deux jours après, c’est Gérard Larcher, président LR du Sénat, qui embraye. Dénonçant « une erreur majeure, qui était très à la mode il y a 6 ans » qui « est en train de construire une déconnexion », le sénateur des Yvelines en fait « un sujet qui mérite d’être interrogé à nouveau ». En réalité, le président du Sénat avait « échangé avec le Président » sur la question, deux jours avant.

La règle du non cumul des mandats « mérite d’être interrogé de nouveau »
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Améliorer les relations entre l’exécutif et les maires

Pour Emmanuel Macron, revenir en partie sur le non-cumul des mandats permettrait de répondre au sentiment que les parlementaires sont coupés du terrain. Cela permettrait aussi sûrement de brosser les élus dans le sens du poil, alors que les relations entre l’exécutif et les maires sont détériorées depuis des mois. Mais politiquement, dans le contexte d’antiparlementarisme, la mesure ne serait pas facile à défendre. « Est-ce populaire ? Probablement pas » reconnaît un membre de cabinet, « mais quand on voit que des députés de la majorité n’ont pas d’ancrage ou de mandat local… »

Pour l’heure, la petite musique sur le non-cumul s’installe. Interrogé ce matin sur France Inter, François Bayrou s’est montré favorable à l’idée d’un ajustement. « Peut-être que ça donnerait une légitimité plus grande à la voix de ceux qui s’expriment » a-t-il estimé. Et alors que l’idée d’un référendum à choix multiples est évoquée après le grand débat, le président du Modem s’interroge : « Pourquoi un jour les Français ne seraient-ils pas invités à faire ce genre de choix ? »

Le ministre chargé des Collectivités, Sébastien Lecornu, « pas favorable » sauf pour les sénateurs

Le sujet fait cependant débat au gouvernement. Le ministre chargé des Collectivités, Sébastien Lecornu, qui coanime également le grand débat, n’y est aujourd’hui « pas favorable », même si cela « fait partie des sujets qui sont au débat », a-t-il estimé, toujours sur France Inter. « Si j’étais toujours président du conseil départemental de l’Eure en même temps que ministre, (…) je n’arriverais pas à faire les deux en même temps » illustre le ministre.

S’il faut vraiment évoluer, Sébastien Lecornu estime que « la question se pose beaucoup plus peut-être encore pour les sénateurs que pour les députés. Quand on représente les collectivités territoriales, ne pas être à la tête d’un exécutif territorial peut interroger ». Soit ce qu’imaginaient, il y a plus de 5 ans, les sénateurs. Ils avaient adopté la mesure, mais en s’excluant eux-mêmes de son application.

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