Présenter sa carte d’identité pour rejoindre un réseau social : l’idée d’un sénateur contre la haine en ligne

Présenter sa carte d’identité pour rejoindre un réseau social : l’idée d’un sénateur contre la haine en ligne

Une proposition de loi du sénateur LR Alain Cadec veut donner naissance à une « Autorité de contrôle de l’identité numérique ». Elle serait chargée d’attribuer aux internautes un identifiant numérique indispensable pour finaliser ou confirmer l’inscription à un réseau social.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

« Vos papiers, s’il vous plaît. » Et si demain l’inscription à un réseau social – ou la confirmation de son compte – débutait par cette injonction ? Un sénateur replace dans le débat public l’idée, déjà évoquée, de conditionner l’utilisation d’un réseau social au dépôt d’une preuve d’identité. Le sénateur (LR) Alain Cadec a son idée pour « mettre un terme au réel sentiment d’impunité des auteurs de messages haineux, racistes, homophobes ou sexistes ». Il a déposé le 14 octobre une proposition de loi dans ce sens. « L’envoi du scan de leur pièce d’identité doit leur faire prendre conscience qu’ils peuvent être identifiés rapidement », avance-t-il, dans l’exposé des motifs de son texte.

La vérification de l’identité des utilisateurs ne se ferait toutefois pas directement par les plateformes elles-mêmes. La proposition de loi, si elle était adoptée, déboucherait sur la création d’une nouvelle autorité administrative indépendante : « l’Autorité de contrôle de l’identité numérique ». Ce serait elle, qui aurait pour mission de contrôler l’identité d’un utilisateur. Elle collecterait, pour ce faire, des « données officielles » et des informations permettant d’identifier un utilisateur. Un identifiant numérique « non nominatif » serait ensuite transmis pour pouvoir finaliser l’inscription sur un réseau social. Le sénateur souligne que les données détenues par l’Autorité de contrôle seraient « transmises sur seule requête du juge en cas d’action pénale », ce qui éviterait, insiste-t-il d’ « être soumis au bon vouloir d’une entreprise située en Californie ou ailleurs dans le monde ».

Douze mois pour vérifier les comptes existants

Les dispositions n’auraient pas seulement vocation à s’appliquer aux nouveaux utilisateurs. La vérification des comptes déjà en service devra s’effectuer dans un délai de douze mois après la publication d’un décret.

L’idée de faire intervenir un contrôle d’identité pour utiliser un réseau social est loin d’être récente. D’autres parlementaires avant Alain Cadec ont émis l’idée, comme le député Éric Ciotti (LR) en 2016, qui justifiait cette régulation par la lutte antiterroriste. Un an avant lui, le député (PS) Christophe Léonard suggérait au ministère de l’Éducation nationale de réfléchir à imposer aux réseaux sociaux la vérification de l’identité, pour éviter l’inscription de jeunes enfants sur les plateformes. Cependant, ni l’un ni l’autre n’imaginait l’intervention d’une autorité indépendante, comme le propose Alain Cadec.

Plus récemment, la sénatrice LR Laure Darcos, dans le cadre d’un débat au Sénat sur la lutte contre la haine en ligne, avait elle aussi remis l’idée sur le tapis. « Des solutions existent, mais une prise de conscience et une action collective à l’échelle européenne sont nécessaires, comme le souligne très justement mon ami Geoffroy Didier, député au Parlement européen. Cela peut consister à imposer aux futurs utilisateurs des réseaux sociaux la présentation du scan d’une pièce d’identité lors de la création du compte. »

Le secrétaire d’Etat chargé du Numérique, Cédric O, avait rétorqué cette idée n’était pas réalisable, dans un monde où les internautes peuvent se géolocaliser dans d’autres pays via des VPN. « La plupart du temps, les gens ne s’identifient pas et, de toute façon, il est toujours possible de les retrouver ! Par conséquent, la question n’est pas de savoir s’il faut rendre obligatoire cette identification : non seulement cela ne marchera pas, mais encore il faudrait passer des heures à se battre avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

Actuellement, une loi impose à des sites à contenus pornographiques de pouvoir contrôler l’âge de leurs visiteurs, pour protéger les mineurs. Mais les modalités exactes du contrôle se font attendre et le décret d’application manque toujours à l’appel.

Dans la même thématique

Deplacement du Premier Ministre a Viry-Chatillon
7min

Politique

Violence des mineurs : le détail des propositions de Gabriel Attal pour un « sursaut d’autorité »

En visite officielle à Viry-Châtillon ce jeudi 18 avril, le Premier ministre a énuméré plusieurs annonces pour « renouer avec les adolescents et juguler la violence ». Le chef du gouvernement a ainsi ouvert 8 semaines de « travail collectif » sur ces questions afin de réfléchir à des sanctions pour les parents, l’excuse de minorité ou l’addiction aux écrans.

Le

Turin – Marifiori Automotive Park 2003, Italy – 10 Apr 2024
6min

Politique

Au Sénat, la rémunération de 36,5 millions d’euros de Carlos Tavares fait grincer des dents. La gauche veut légiférer.

Les actionnaires de Stellantis ont validé mardi 16 avril une rémunération annuelle à hauteur de 36,5 millions d’euros pour le directeur général de l’entreprise Carlos Tavares. Si les sénateurs de tous bords s’émeuvent d’un montant démesuré, la gauche souhaite légiférer pour limiter les écarts de salaires dans l’entreprise.

Le