Recherche : un amendement du Sénat suscite la colère du monde universitaire
Examiné en ce moment à la Haute assemblée, le projet de loi de programmation de la recherche a été largement amendé. Un article censé renforcer les libertés académiques des universitaires a déclenché la colère de ces derniers qui craignent au contraire une régression de leurs libertés. La ministre de l’Enseignement supérieur soutient cet amendement.

Recherche : un amendement du Sénat suscite la colère du monde universitaire

Examiné en ce moment à la Haute assemblée, le projet de loi de programmation de la recherche a été largement amendé. Un article censé renforcer les libertés académiques des universitaires a déclenché la colère de ces derniers qui craignent au contraire une régression de leurs libertés. La ministre de l’Enseignement supérieur soutient cet amendement.
Public Sénat

Par Helena Berkaoui

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

« Un instrument de musellement du monde académique. » C’est en ces termes que l’amendement visant à renforcer les libertés académiques des universitaires est qualifié par la rédaction d’Academia composée d’universitaires. L’amendement en question a été déposé par la sénatrice LR, Laure Darcos, lors de l’examen du projet de loi de programmation de la recherche qui est toujours en cours au Sénat.

La sénatrice de l’Essonne a voulu, par cet article, modifier l’article L. 952-2 du code de l’éducation, qui consacre « la pleine indépendance » et « l’entière liberté d’expression » des universitaires, en inscrivant que « les libertés académiques s’exercent dans le respect des valeurs de la République ». Par cet ajout, elle entend « inscrire dans la loi que ces valeurs, au premier rang desquelles la laïcité, constituent le socle sur lequel reposent les libertés académiques et le cadre dans lequel elles s’expriment ».

Cet amendement s’inscrit dans un contexte sensible marqué par l’assassinat du professeur Samuel Paty. Les polémiques explosives qui touchent le monde universitaire sont également liées. En témoignent les propos du ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, qui, après l'assassinat de Samual Paty, affirmait que « l’islamo-gauchisme » faisait « des ravages à l’université ». La Conférence des présidents d'université s'était notamment émue de cette sortie dans un communiqué rappelant que « les universités ne sont pas des lieux d’expression ou d’encouragement du fanatisme ».  

Interrogée dans la matinale de Public Sénat sur cette déclaration, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche tente de rattraper le coche : « Les universités ne sont pas des lieux de radicalisation » (voir la vidéo ci-dessous).

En revanche, la ministre de l’Enseignement supérieur soutient l’amendement de Laure Darcos (LR) : « Les valeurs de la laïcité, de la République, ça ne se discute pas [...] ça ne fait pas de mal de le dire, cet amendement ne me dérangerait pas ». L’amendement de Laure Darcos avait par ailleurs obtenu l'avis favorable du gouvernement. 

Ce n’est évidemment pas l’avis des universitaires qui s’élèvent contre cet amendement. « Jusqu’à présent, les libertés académiques n’étaient pas limitées sur le plan politique. Plus précisément, elles restaient indifférentes aux valeurs politiques, y compris les plus belles, parce qu’elles ne se situaient pas sur ce plan (…) Voilà que depuis hier soir, ce n’est plus le cas : avec l’amendement de Madame Darcos, les libertés académiques sont soumises "de l’extérieur" par des limites qui sont politiques, et qui plus formulées de manière aussi vague et malléable que peuvent l’être les "valeurs de la République" », développe la rédaction d’Academia ici.

Un autre amendement suscite également leur courroux, celui porté par le président de la commission de la Culture, Laurent Lafon. L’article voté en séance prévoit que « toute intrusion dans un établissement d’enseignement supérieur ayant pour but d’entraver la tenue d’un débat organisé dans ses locaux constitue une infraction punie d'un an d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende ».

Toujours en discussion au Sénat, le projet de loi de programmation de la recherche sera débattu en commission mixte parité la semaine prochaine avant son adoption définitive.

Partager cet article

Dans la même thématique

Recherche : un amendement du Sénat suscite la colère du monde universitaire
4min

Politique

Réforme des retraites : « La suspension est un leurre, elle sera retoquée en commision mixte paritaire », avertit Cécile Cukierman (PCF)

Au Sénat, la droite et une partie de la gauche tombent d’accord sur une chose : la procédure parlementaire permettra à la droite et le centre d’enterrer la suspension de la réforme des retraites. Un fait qui inspire de la sérénité à Claude Malhuret (Horizon) sur la possibilité de réécrire la copie de Sébastien Lecornu, et pousse au contraire Cécile Cukierman (PCF) à enjoindre les députés de gauche à le prendre en compte dans leur vote de la censure ce jeudi.

Le

Paris: Questions au gouvernement Assemblee nationale
4min

Politique

Budget : l’abandon du 49.3 va-t-il prendre les socialistes à leur propre piège ?

Avec le non-recours au 49.3, les socialistes ont été entendus par Sébastien Lecornu. Mais ils sont désormais contraints à voter le budget de la Sécurité sociale pour valider la suspension de la réforme des retraites. Un véhicule législatif confirmé par le Premier ministre, ce mercredi. Sans cette arme du parlementarisme rationalisé, les budgets de la Sécurité sociale comme celui de l’Etat seront également amendés par la droite. Ce qui pourrait amener à des copies finales difficiles à assumer pour les socialistes.

Le

Direct. Suivez la déclaration de politique générale de Sébastien Lecornu devant le Sénat
30min

Politique

Sébastien Lecornu accueilli froidement au Sénat : revivez les temps forts de la déclaration de politique générale

Le Premier ministre s'est exprimé devant les sénateurs pour sa déclaration de politique générale. Suspension de la réforme des retraites, décentralisation, budget...Le discours de Sébastien Lecornu était différent de celui prononcé à l'Assemblée la veille. Si l'ambiance était plus calme qu'au Palais Bourbon, l'accueil des sénateurs n'en était pas pour autant très enthousiaste.

Le

Recherche : un amendement du Sénat suscite la colère du monde universitaire
9min

Politique

Budget : « Incertain » en 2029, le passage à 3 % de déficit arrivera « au mieux en 2031 », alerte Pierre Moscovici

« Le scénario économique pour l’année 2026 repose sur une hypothèse optimiste », affirme devant le Sénat Pierre Moscovici, président du Haut conseil des finances publiques. Il doute de la capacité du gouvernement à atteindre ses objectifs, avec un budget dont la copie finale est très incertaine. Seule « bonne nouvelle » : « Un début d’amélioration de nos finances publiques » en 2025, après « le bug majeur de 2024 ».

Le