Le Premier ministre a annoncé plusieurs mesures relatives à l’école, la famille et les réseaux sociaux dans le cadre d’un discours où il a demandé un « sursaut d’autorité ». Si le diagnostic sur la violence des jeunes est partagé par les sénateurs de tous bords, ils veulent maintenant savoir comment cela se traduira concrètement.
Retraites : les sénateurs LREM appellent leurs collègues de l’Assemblée « à la loyauté »
Par Public Sénat
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« C’est peu loyal. Derrière sa démarche de sincérité, ce courrier ne sert pas la cause du gouvernement ». Le patron des sénateurs LREM, François Patriat n’a pas vraiment apprécié la forme et le fond de la lettre adressée au Premier ministre, de deux piliers de la commission des finances de l’Assemblée et dont la presse s’est largement fait l’écho. La députée de la Meuse, Émilie Cariou, et le rapporteur général de la commission des finances, Laurent de Saint-Martin ont, dans une longue missive, fait part de leurs interrogations et de leurs inquiétudes au sujet du financement des différentes compensations liées à la réforme des retraites. Par exemple, au sujet de l’augmentation des salaires des enseignants. : « Quel est le surcoût annuel pour l'État ? » « Quels sont les enseignants ciblés ? » « Qu'adviendra-t-il des autres enseignants ? » s’interrogent les auteurs.
« Un paquet de milliards d’euros » non budgétés
Concernant la baisse de la CSG des indépendants, dont les avocats : « Quels sont les montants annuels de perte de cotisations et contributions sociales ? Comment sera financée la réduction de ces recettes » ? poursuivent-ils.
Dans le journal Le Monde, Émilie Cariou enfonce le cou. « Rien qu’avec les questions de cette lettre, on est sûrement déjà sur un paquet de milliards d’euros » calcule-t-elle.
« Quand on a un problème avec le gouvernement on en parle directement avec lui »
« Je suis dubitatif sur cette façon de travailler. Quand on a un problème avec le gouvernement on en parle directement avec lui » souligne le sénateur LREM, Martin Lévrier. « C’est normal pour un parlementaire de poser des questions car nous devons rendre des comptes. Mais c’est sûr que c’est n’est pas le bon canal. Ça va forcément entraîner des polémiques et c’est déjà tellement compliqué de réformer dans ce pays » soupire la sénatrice LREM, Patricia Schillinger.
Édouard Philippe répondra « point par point »
Le message a été bien reçu par Édouard Philippe. Avec un peu d’ironie, le Premier ministre a déclaré se « réjouir que les éléments de responsabilité financière de la réforme soient portés et pris en compte par deux personnalités éminentes de la majorité ». À l’issue d'une rencontre à Matignon avec les syndicats, Édouard Philippe a indiqué qu’il aurait l'occasion de répondre « point par point » aux questions posées par les deux députés dans ses « échanges nombreux » avec les parlementaires.
« Dans un groupe majoritaire, Il y a toujours des parlementaires qui veulent se singulariser pour exister »
Peut-être plus royaliste que le roi, François Patriat estime quant à lui que ces questions n’étaient pas « fondées ». « On ne peut pas préjuger de ce que donnera la conférence de financement. Mais de toute façon la réforme sera financée quoiqu’il arrive. Dans un groupe majoritaire, Il y a toujours des parlementaires qui veulent se singulariser pour exister » note-il.
Sur Public Sénat, Laurent de Saint-Martin n’a rien laissé paraître
Et pour « exister », Laurent de Saint-Martin préfère visiblement l’écrit à l’oral. Invité sur Public Sénat la veille de l’envoi de son courrier, le député était interrogé sur le « gros vide » du volet budgétaire de la réforme. Le rapporteur général répondait : « Ce que vous appelez ‘gros vide’, c'est tout simplement le respect de la démocratie sociale » justifiait-il en référence aux conclusions de la conférence de financement amenées à compléter le texte après la première lecture « et c’est très bien comme ça ».
« Ils sont inconséquents »
« Je peux comprendre qu’ils soient un peu frustrés. Mais je ne me permettrais pas de juger un règlement de comptes au sein de LREM. On sent bien qu’il y a une tension au groupe. Sur le fond, il y a évidemment des questions qui se posent au sujet du financement. Au Sénat, nous les poserons aux ministres concernés lors des auditions. En agissant de la sorte, ces deux députés donnent du grain à moudre à l’opposition. Ils sont inconséquents dirons-nous » relève le sénateur MODEM, membre du conseil d’orientation des retraites, Jean-Marie Vanlerenberghe.
La lettre n’a effectivement pas échappé au président socialiste de la commission des finances du Sénat. « J’aurais tendance à dire que c’est l’illustration d’une évidence révélée par les principaux soutiens de l’exécutif : celle d’un très grand malaise politique. Ce projet de loi a pour objectif de nous empêcher d’exercer notre travail parlementaire, en nous obligeant à légiférer à tâtons. Je réfute les critiques selon laquelle cette réforme serait mal préparée. Elle est parfaitement préparée pour faire des économies sur le dos des actifs et des retraités de demain au bénéfice de leurs employeurs qu’ils soient privés ou publics » résume Vincent Éblé.
Cette lettre est publiée le lendemain de l’appel à « l’unité » d’Emmanuel Macron aux députés LREM. Un groupe parlementaire passablement ébranlé après le départ de trois députés en une semaine et la séquence désastreuse autour du rejet d’une proposition de loi allongeant la durée du congé après le décès d’un enfant. Les sénateurs LREM n’étaient, eux, pas conviés à l’Élysée, mais le message du Président semble pourtant être bien passé.