Sécurité globale : le Sénat vote le texte après l’avoir remanié

Sécurité globale : le Sénat vote le texte après l’avoir remanié

La majorité sénatoriale de droite et du centre a adopté l’ensemble de la proposition de loi. Elle a complètement réécrit l’article 24, qui avait fait polémique, et a resserré le cadre d’utilisation des drones par la police. La gauche dénonce un texte sécuritaire qui met à mal les libertés publiques.
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L’actualité sanitaire écrase tout. Mais le Parlement continue de légiférer. Après trois jours de débats, le Sénat a adopté la proposition de loi sur la sécurité globale par 238 voix contre 98, après l’avoir modifiée en de nombreux points. Fidèle à sa tradition, la majorité sénatoriale de droite et du centre a cherché à trouver un équilibre entre libertés publiques et sécurité. Equilibre que la gauche estime parfois surjoué ou de posture, face à un texte qu’elle dénonce dans son ensemble.

Les rapporteurs, les sénateurs LR Marc-Philippe Daubresse et l’UDI, Loïc Hervé, ont renommé le texte « projet de loi pour un nouveau pacte de sécurité respectueux des libertés ». Le socialiste Jérôme Durain aurait plutôt vu « loi de sécurité bancale ou loi globalement sécuritaire… »

Gérald Darmanin espère « une commission mixte paritaire conclusive »

Le texte touche de nombreux domaines. Il entend créer un « continuum de sécurité ». Le projet de loi renforce ainsi, par expérimentation, la police municipale, comme les sociétés de sécurité privées. Il donne un cadre juridique à l’utilisation des drones par la police et protège mieux les forces de l’ordre.

Si des désaccords persistent, globalement, le ministre de l’Intérieur a su faire des pas vers le Sénat. Gérald Darmanin espère même « trouver le meilleur compromis possible pour que la commission mixte paritaire soit conclusive ». En CMP, députés et sénateurs essaient de trouver une version commune du texte. Dans le cas contraire, c’est l’Assemblée qui a le dernier mot.

Article 24 totalement réécrit

Fin 2020, c’est l’article 24, accusé de mettre à mal la liberté de la presse, qui avait concentré les critiques. Les sénateurs l’ont totalement réécrit. Exit la référence à la loi de 1881 sur la presse, et création à la place d’un nouveau délit de « provocation à l’identification » des policiers. Une solution qui a bénéficié de la « sagesse » du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et sur laquelle il compte s’appuyer.

Pour la gauche, le compte n’y est pas. Des socialistes aux communistes, en passant par les écologistes, ils ont dénoncé une réécriture qu’ils jugent encore dangereuse et « juridiquement fragile ».

Les sénateurs renforcent le cadre sur l’utilisation des drones par la police

Autre sujet sensible : les drones. Le texte prévoit de donner un cadre à leur utilisation par la police. Car jusqu’ici, la préfecture de police de Paris les utilisait lors des manifestations sans en avoir le droit… Le Conseil d’Etat lui a même intimé l’ordre, à deux reprises, de les laisser au sol. L’article 22 de la proposition de loi des députés Jean-Michel Fauvergue et Alice Thourot remédie à ce vide juridique. Les drones pourront être utilisés en de nombreuses circonstances, comme pour « le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves ». Un dernier cas qui englobe de nombreuses situations.

Mais les sénateurs ont durci les conditions d’utilisation, qui vise notamment, selon la version sortie de la commission, les « crimes ou délits punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à cinq ans ». Les sénateurs ont écarté les enregistrements sonores et la reconnaissance faciale. Les rapporteurs ont également fait adopter un régime d’autorisation préalable par le préfet ou le procureur, avant toute utilisation, ce qu’a dénoncé en séance Gérald Darmanin. La question du contrôle des frontières par les drones a entraîné un échange pour le moins tendu entre le ministre et la gauche, autour de la question des migrants.

Plus de pouvoirs pour la police municipale et la sécurité privée

Les sénateurs ont donné leur feu vert au renforcement des pouvoirs de la police municipale pour les communes volontaires. Une expérimentation portée de 3 à 5 ans par les sénateurs, allongement soutenu par le ministre. Les policiers municipaux pourront constater certains délits, et notamment la consommation de stupéfiants. Le Sénat a aussi ouvert la voie à la création d’une police municipale à Paris, une première historique.

Concernant les entreprises et salariés de la sécurité privée, secteur qui monte en puissance, le texte encadre davantage la profession, tout en lui donnant plus de prérogatives. De nouvelles missions qui font craindre à la gauche que l’Etat « se défausse » de certaines de ses missions sur le privé.

Le Sénat a enfin autorisé le port d’arme pour les policiers hors-service dans les établissements recevant du public. Le sujet fait pourtant largement débat, le président de la commission de l’éducation et de la culture, le centriste Laurent Lafon, ayant même voulu supprimer l’article. Cette disposition engendre une levée de bouclier dans les milieux culturels, notamment les salles de concert et festivals, qui mettent en garde sur les risques engendrés.

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