Ségur de la santé : une proposition de loi qui « n’est pas à la hauteur », selon la commission des affaires sociales du Sénat

Ségur de la santé : une proposition de loi qui « n’est pas à la hauteur », selon la commission des affaires sociales du Sénat

La proposition « de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification », portée par la majorité présidentielle, a déçu la commission des affaires sociales du Sénat. Elle la trouve éloignée des espoirs nés du Ségur de la santé, et des enseignements de la crise sanitaire.
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Le Ségur de la santé, conclu en juillet 2020, après six mois de crise sanitaire et plusieurs années de malaise dans les établissements de santé, s’était matérialisé une première fois dans la loi de financement de la Sécurité sociale, adoptée en novembre. Des revalorisations salariales et des investissements financiers en faveur des établissements financiers y avaient été introduits. Le deuxième volet législatif du « Ségur », centré cette fois sur l’organisation du système hospitalier, approche de sa conclusion. La proposition de loi « visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification » de la majorité présidentielle, adoptée fin 2020 par les députés, est en cours d’examen au Sénat.

Le débat en séance est prévu pour le 17 février. En commission des affaires sociales, le texte a été accueilli froidement. Regrettant un texte à « l’ambition limitée », elle a considéré qu’il ne répondait pas à ses promesses, ni au « choc de confiance et de simplification » réclamé par les soignants. « Ce texte au contenu disparate, sans ligne directrice forte et dépourvu de vision stratégique, n’est pas à la hauteur des espoirs suscités par le Ségur de la santé et ne semble tirer aucun enseignement de la crise sanitaire », s’est ému le rapporteur LR du texte, Alain Milon. Deux points sont jugés « particulièrement décevants » : le recrutement des praticiens hospitaliers et la gouvernance des hôpitaux.

Les groupements hospitaliers de territoires n’ont pas bonne presse

Sur ces deux aspects, l’ancien président de la commission des affaires sociales relève un problème de méthode, car ils ont aussi fait l’objet d’ordonnances, prévues par la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation de notre système de santé. Selon la commission sénatoriale, les réponses apportées au déficit d’attractivité des professions hospitalières sont limitées. Quand elles ne sont pas « contre-productives ». Le recours, dans le texte, aux groupements hospitaliers de territoires (GHT) pour les recrutements, a été qualifié d’ « inopportun » et d’ « excessif » par le rapporteur. Il relève par ailleurs un manque de concertation. La proposition de loi leur accorde, selon lui, un rôle « déterminant » dans la recomposition de l’offre territoriale de santé.

Or, les sénateurs estiment que l’on manque de recul sur cette nouvelle forme d’organisation qui suscite la méfiance des élus locaux, avec la disparition de certains types de soins dans les petits établissements, au détriment de l’établissement « support ». Les sénateurs ont réécrit ce point de la proposition de loi en le recentrant sur le projet territorial de santé (PTS). Un instrument plus large dans la structuration de l’offre de soins, qui fait notamment intervenir la médecine de ville.

La « provocation » de l’article 4 ter

Sur le même thème des recrutements, la commission a supprimé l’article 4 ter, vu par Alain Milon comme une « véritable provocation » à l’égard des praticiens. Le dispositif permet à un directeur d’établissement de consulter un fichier de déclarations préalables à l’embauche pour contrôler les activités extérieures des praticiens. Cette disposition aurait présenté « une atteinte disproportionnée à la protection de la vie privée », note le rapport du Sénat.

Autre axe d’amélioration pour résoudre le problème d’attractivité des personnels paramédicaux : leur participation à la direction. Sur ce sujet, la commission des affaires sociales a observé d’importantes « lacunes ». Les sénateurs ont notamment rehaussé le rôle de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-technique dans la gestion des établissements. La commission a approuvé le principe de clarification du rôle des chefs de service et de meilleure association du personnel médical dans la gouvernance, tout en regrettant un remaniement « à la marge ».

La lutte contre les dérives de l’intérim médical renforcée

Les sénateurs ont également voulu préciser l’article luttant contre le recours abusif à l’intérim médical. La proposition de loi attribue aux comptables publics d’établissement un rôle d’alerte du directeur général de l’ARS lorsque le plafond d’emplois intérimaires autorisé est dépassé. L’ennui, c’est que cette intervention est trop tardive : il faut attendre l’accomplissement de la mission. Le Sénat a préféré introduire un contrôle budgétaire a priori, exercé par le directeur général de l’ARS.

L’examen en commission des affaires sociales s’est aussi achevé avec une décision symbolique : la suppression de l’article 1. Très critiqué par les professionnels de santé, il prévoyait à l’origine la création d’une « profession médicale intermédiaire ». Face à la levée de boucliers, les députés se sont repliés en sollicitant dans un article, un rapport du gouvernement afin de statuer sur une nouvelle profession. Les sénateurs ont préféré enterrer l’article vidé de toute substance législative et demandant surtout un rapport dans un délai très contraint de six mois.

Largement remaniée, la proposition de loi a vu au total 10 articles sur 37 disparaître au cours de l’examen en commission.

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