Accusée d'”ambiguïté” sur l’antisémitisme, La France insoumise au centre d’une polémique

Accusée d'”ambiguïté” sur l’antisémitisme, La France insoumise au centre d’une polémique

La France insoumise se retrouve au centre d'une polémique pour son "ambiguïté" présumée vis-à-vis de l'antisémitisme, alors que...
Public Sénat

Par Baptiste BECQUART

Temps de lecture :

4 min

Publié le

La France insoumise se retrouve au centre d'une polémique pour son "ambiguïté" présumée vis-à-vis de l'antisémitisme, alors que la manifestation de mardi à laquelle pourrait participer Jean-Luc Mélenchon s'annonce tendue, près d'un an après son départ forcé de la marche pour Mireille Knoll.

Des membres du gouvernement ont vilipendé la réaction de M. Mélenchon aux insultes proférées par des "gilets jaunes" samedi à l'encontre du philosophe conservateur, Alain Finkielkraut.

Le patron des députés LFI avait tweeté dimanche: "Conscient de l'instrumentalisation de l'antisémitisme, je crois aussi qu'il ne faut jamais laisser passer le racisme. Autour de Finkielkraut, il y avait aussi des +gilets jaunes+ qui voulaient le défendre et s'opposer à l'attaque. Je suis avec eux".

Pour Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, le leader de la France insoumise "ne condamne pas" les attaques contre le philosophe. "C'est un naufrage, Jean-Luc Mélenchon", a-t-elle lancé, rappelant qu'il "a été républicain, il a été ministre, sénateur, élu européen".

De quoi susciter en retour l'ire de Jean-Luc Mélenchon sur Twitter, lundi: "Agnès Buzyn, au nom du gouvernement contre la France Insoumise, montre que pour les macronistes la lutte contre l'antisémitisme n'est pas sincère. Juste un prétexte politicien pour régler des comptes", a dénoncé sur Twitter Jean-Luc Mélenchon.

Réactivant des soupçons touchant régulièrement la gauche radicale, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Éducation, Gabriel Attal, a attaqué: "Je vois Jean-Luc Mélenchon parler d’+instrumentalisation de l’antisémitisme+. C’est une ambiguïté malsaine. On attend de lui qu’il condamne, point barre, pas qu’il relativise et fasse de la théorie du complot".

Les critiques viennent aussi d'autres formations. La tête de liste EELV, Yannick Jadot, s'est notamment dit "stupéfait, choqué, outré, d'entendre des responsables politiques qui finalement minimisent les actes d'antisémitisme".

La Licra a pour sa part visé les propos de Thomas Guénolé, coresponsable de l’École de formation de LFI, les comparant avec ceux de la "presse d'extrême droite en 1936". Le politologue insoumis avait tweeté, dimanche: "Cela fait des années qu'Alain Finkielkraut répand la haine en France. Contre les jeunes de banlieue. Contre les musulmans. Contre l’Éducation nationale, etc. L'insulter, comme insulter quiconque, est condamnable. Mais le plaindre, certainement pas."

"Ils ne l’ont pas insulté en le traitant de réactionnaire mais comme juif. Ça ne fait jamais tilt? Relativiser c’est déjà accepter ! #çasuffit", a rétorqué Olivier Faure, premier secrétaire du PS.

- Menaces de mort -

Les militants de LFI sont "blessés" par ces controverses, a confié à l'AFP leur directeur des campagnes et numéro 2 sur la liste pour les européennes, Manuel Bompard, qui a clairement condamné dimanche les insultes contre Alain Finkielkraut. "Chez nous, les plus anciens se mobilisent depuis 40 ans contre toute forme de racisme".

Le siège parisien du mouvement a reçu lundi deux appels de menaces de mort, a-t-il rapporté. Le responsable se dit en outre inquiet pour les manifestations de mardi contre l'antisémitisme, dans ce climat et après le précédent de mars 2018, lorsque Jean-Luc Mélenchon avait été contraint à quitter précipitamment la marche blanche pour Mireille Knoll. Craignant que des groupuscules s'organisent pour les exclure, les Insoumis ne confirmeront leur participation qu'au tout dernier moment.

LFI s'est plusieurs fois débattue avec des accusations de complaisance et d’ambiguïté vis-à-vis de l'antisémitisme au nom de la défense des banlieues. En novembre 2017, la députée Danièle Obono, militante antiraciste très active, avait défendu sa "camarade" Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des indigènes de la République (PIR) et régulièrement accusée d'antisémitisme. "Les juifs sont les boucliers, les tirailleurs de la politique impérialiste française et de sa politique islamophobe", déclarait Houria Bouteldja en 2015. Face au tollé, Mme Obono avait dû préciser qu'elle était en "profond désaccord" avec le PIR.

"A la France insoumise, il y a quelque chose qui pose problème", a jugé auprès de l'AFP le directeur de l'Observatoire des radicalités Jean-Yves Camus. "Pas les convictions individuelles de Jean-Luc Mélenchon ou celles de dirigeants comme Manuel Bompard, François Ruffin, mais ce refus idéologique de considérer que certaines formes d'antisionisme mènent à l'antisémitisme".

Dans la même thématique

Brussels Special European Council – Renew Europe
10min

Politique

Européennes 2024 : avec son discours de la Sorbonne 2, Emmanuel Macron « entre en campagne », à la rescousse de la liste Hayer

Emmanuel Macron tient jeudi à la Sorbonne un discours sur l’Europe. Si c’est le chef de l’Etat qui s’exprime officiellement pour « donner une vision », il s’agit aussi de pousser son camp, alors que la liste de la majorité patine dans les sondages. Mais il n’y a « pas un chevalier blanc qui va porter la campagne. Ce n’est pas Valérie Hayer toute seule et ce ne sera même pas Emmanuel Macron tout seul », prévient la porte-parole de la liste, Nathalie Loiseau, qui défend l’idée d’« un collectif ».

Le

Jordan Bardella visite Poste-Frontiere de Menton
5min

Politique

Elections européennes : la tentation des seniors pour le vote RN, symbole de « l’épanouissement du processus de normalisation » du parti, selon Pascal Perrineau

Alors que la liste menée par Jordan Bardella (31.5%) devance de plus de 14 points la liste Renaissance, menée par Valérie Hayer (17%), selon le dernier sondage IFOP-Fiducial pour LCI, le Figaro et Sud-Radio, le parti de Marine Le Pen, mise désormais sur l’électorat âgé, traditionnellement très mobilisé pour les élections intermédiaires. Désormais deuxième force politique chez les plus de 65 ans (le RN conquiert 24% de cet électorat, 7 points de moins que Renaissance), la stratégie semble porter ses fruits. Décryptage avec le politologue Pascal Perrineau, professeur émérite à Sciences Po Paris et récent auteur de l’ouvrage Le Goût de la politique : Un observateur passionné de la Ve République, aux éditions Odile Jacob.

Le

Mairie de Paris, Jeux Olympiques 2024
4min

Politique

JO 2024 : les agents de sécurité privée vont-ils faire défaut ?

A trois mois des Jeux Olympiques, des incertitudes planent sur le nombre d’agents de sécurité privée mobilisés. Le préfet de police de Paris, Laurent Nunez indique « ne pas être inquiet pour l’instant ». Du côté des professionnels du secteur, on évalue un manque de 8 000 agents sur 40 000 nécessaires.

Le